01/02/2000 – UN LECTEUR RÉPOND AU COMMUNIQUE DE « LA FAMILLE JUDICIAIRE » DE DJIBOUTI.

J’ai pris connaissance du communiqué de presse de la  » famille judiciaire  » (expression choisie par les intéressés) ainsi que d’un précédent communiqué publié dans la Liberté. Jusqu’aujourd’hui, je ne voulais pas engager de polémique avec cette  » Famille Judiciaire « . Je ne pouvais rester impassible face à l’indécence et au culot de cette  » Honorable Famille « .

Cette fois-ci, j’ai l’impression que c’est un communiqué de trop. Les avocats et les magistrats – c’est paraît-il leur profession- de cette famille aurait pu se taire et essayer de faire un véritable examen de conscience sur la manière d’exercer leur profession, sur les libertés individuelles qu’ils sont censés protéger et garantir. Sont-ils en mesure de se regarder dans une glace et de dire :  » Chaque jour, je m’acquitte du mieux que je peux de ma mission, sans violer les droits les plus élémentaires et sans fermer les yeux sur les exactions quasi quotidiennes en matière de droits de l’Homme. J’attends vos réponses Messieurs !

A la lecture de ce communiqué, je me suis astreint à une gymnastique intellectuelle en essayant de me mettre à la place de l’une de ces personnes ( de la famille judiciaire) – chose très déplaisante-

je me suis télé déporté au sein du Palais de Justice de Djibouti. Et là, j’ai retrouvé cette atmosphère lourde et malsaine. On y voit de pauvres personnes déambulant à longueur de journée dans le maigre espoir de voir juger un jour leur cause. Entre ces ombres errantes, un observateur habitué assistera aux perpétuels marchandages. Dans un coin de bureau, le substitut de permanence marchande pour quelques milliers de francs Djibouti (1 franc français vaut 30 francs Djibouti) la liberté ou les poursuites contre les personnes. On peut quand même reconnaître un seul mérite : cette  » famille  » s’adapte aux capacités de chaque justiciable. Du plus petit employé au plus grand commerçant, tout le monde paye !

L’avocat, quand il ne spolie pas son client, s’adonne à son exercice favori d’intermédiaire entre le justiciable et le Juge. Cette fidèle description d’une tranche de vie, au Tribunal de Djibouti, nous donne une certaine idée de la  » parodie de justice  » qui s’y déroule et surtout de la grande intégrité de cette famille. Malgré tout cela, j’ai fait preuve de beaucoup d’indulgence en essayant de leur accorder les circonstances atténuantes. Je me suis dit, c’est certainement des personnes qui n’ont pas eu le courage – trait de caractère qui n’est pas donné à tout le monde – de résister aux différentes pressions et tentations.

En tout état de cause, ces personnes trahissent quotidiennement et apparemment sans le moindre remord leur serment d’exercer dignement et loyalement leur profession.

Consciemment ils sont devenus l’alibi judiciaire du régime en place.
A défaut de courage pour résister, ils auraient pu avoir au moins le courage et la décence de se taire. Un silence aurait pu peut être plaider pour eux. Ils ont voulu surenchérir en se comptant comme de véritables Pitbulls sortant griffes et canines pour protéger leur petit fond de commerce.

En essayant d’analyser le texte et surtout le terme  » Famille  » – dans ce contexte quasi maffieux- je ne pouvais m’empêcher de penser au Parrain de F.F COPPOLA. L’image de cette famille cimentée par une communauté d’intérêts et régie par ce fameux  » code d’honneur « . Répondant à ces même règles, la famille judiciaire s’est levée comme un seul homme pour défendre  » l’Honneur de la Famille « .

cette fois-ci, vous vous êtes complètement compromis et discrédités en vendant vos âmes et vos consciences. Il n’est jamais trop tard pour bien faire. Un petit sursaut peut encore vous sauver en dénonçant haut et fort les violations quotidiennes des droits de l’homme et en refusant d’être un instrument au service du pouvoir.

L’actualité est plutôt rassurante – pas pour vous- et nous porte à croire que la Justice (avec un Grand  » J  » et pas la votre) finit toujours par passer. En effet, un jour ou l’autre, il y aura toujours quelqu’un qui se lèvera pour vous demander des comptes. Ce jour, ne dites pas qu’on ne vous avait pas prévenu.

Un Djiboutien