21/05/02 LETTRE OUVERTE AU PRESIDENT DE LA CHAMBRE DES COMPTES DE LA COUR SUPREME DU TRUBUNAL DE DJIBOUTI POUR POSER DES QUESTIONS PRECISES SUR LA GESTION DES FINANCES PUBLIQUES 0 DJIBOUTI (LDDH)

Le Président


Djibouti le 11 MAI 2002


Monsieur le Président,

C’est un honneur
pour nous de suivre avec un grand intérêt les différentes
Décisions de la Chambre des Comptes.

En effet,
l’une des actions pour freiner les détournements effrénés
des fonds publics est celle des Enquêtes à caractères
judiciaires sur la gestion publique, Enquêtes qui doivent
être diligentées par votre Juridiction.

En cette période
pré-électorale, permettez-nous, Monsieur le Président
de vous saisir en attirant votre aimable attention sur la situation
financière désastreuse, et sur la gestion de l’Assemblée
Nationale, qui laisse franchement à désirer.

Il est important
que la gestion financière du Pouvoir Législatif,
Pouvoir qui en principe est chargé des enquêtes parlementaires,
qui est chargé du contrôle de la bonne gestion des
deniers de l’Etat, il est important que la gestion financière
du Législateur soit exemplaire ; ce qui actuellement ne
semble pas être le cas.

Face au manque
total de transparence de la gestion et des finances de l’Assemblée
nationale, face au manque total de contrôle de la gestion
et des finances du Pouvoir législatif, face à l’incompréhensible
secret qui entoure l’exploitation financière ainsi que
la gestion administrative suite à l’Autonomie financière
du deuxième pilier de l’Etat, face au prochain renouvellement
des membres de l’Assemblée nationale :


  • il est plus que souhaitable, avant la dernière session
    budgétaire de cette législature, avant les vacances
    Judiciaires, avant novembre 2002,


  • il est plus que souhaitable, que votre Haute Juridiction fasse
    un état des lieux sur le plan financier, que votre Haute
    Juridiction enquête sur la gestion administrative et financière
    du Président et du Secrétaire Questeur du Bureau
    de l’Assemblée Nationale, que votre Haute Juridiction
    prenne les mesures adéquates qui s’imposent.

A notre connaissance,
et depuis que l’Assemblée Nationale jouit d’une complète
Autonomie financière, à part le Président
et probablement le Secrétaire Questeur, personne d’autre
à notre connaissance n’a le droit de connaître et
aucune Instance, aucune Commission Parlementaire n’a le droit
d’approuver ou de désapprouver par vote les dépenses
effectuées ou réalisées, dont le montant
global est, chaque année, prévu par le Budget prévisionnel
de l’Assemblée Nationale,

Les comptes
financiers des dépenses du Gouvernement sont soumis et
approuvés d’abord par les membres du Gouvernement avant
d’être inclus d’une manière globale dans le Projet
de Loi du Compte Définitif du Budget de l’Etat.

Quant aux
dépenses financières engagées par le Président
et/ou par le Questeur, elles ne sont ni approuvées, ni
soumises à la vérification et aux votes des députés
ou tout au moins de la Commission des Finances de l’Assemblée
Nationale.

Dépenses
financières des fonds de l’Etat, qui ne font plus l’objet
d’une Loi, d’une Résolution ayant force de Loi.

C’est la porte
grande ouverte à toutes les formes de gabegies ou détournements
effrénés des fonds publics, des impôts des
citoyens djiboutiens et étrangers.

A notre connaissance,
seuls deux hommes politiques décident l’engagement des
dépenses, donnent des ordres aux fonctionnaires comptables
d’exécuter telles ou telles dépenses, de suspendre
les indemnités de tel parlementaire ou tel fonctionnaire
et de l’utiliser (par exemple) pour l’achat des nouvelles moquettes,
ou d’une nouvelle 4×4 (grosse cylindrée à la mode).

Seuls deux
hommes politiques gardent dans le plus grand secret toutes les
dépenses des deniers publics et des biens sociaux, dépenses
engagées par eux deux seulement, dépenses qui restent
sans contrôles et sans aucune Résolution adoptée
par des parlementaires.

Toutefois,
et afin de vous faciliter la tâche il nous paraît
urgent de se poser un certain nombre de questions, qui nécessitent
l’urgence à procéder à une enquête
Judiciaire indépendante comme la vôtre, dans l’unique
but que celui d’avoir le cœur net, et dans les uniques soucis
que ceux de mettre fin aux rumeurs et aux impunités.

Questions

Est-ce vrai
:

– Que depuis
un certain temps l’autonomie financière de l’Assemblée
Nationale est bloquée par le Trésor ?

– Que les
chèques au nom de l’Assemblée Nationale et signés
par le Président sont systématiquement rejetés
par les Banques de la place sur ordre du Trésor National
?

– Que des
chèques de l’ordre de 250 000FD à 400 000FD ont
été émis en faveur de vendeuses de KHAT ?
Si ceci est vrai, quel scandale !

– Il est
très facile à la Chambre des Comptes de vérifier
auprès des Banques de la place tous les chèques
émis et signés soit par le ou les comptables, soit
par le Président de l’Assemblée Nationale Monsieur
Said Ibrahim Badoul, ceci depuis que l’autonomie financière
est devenue effective.

– A combien
se chiffrent actuellement les découverts des comptes au
nom de l’Assemblée Nationale ou au nom de son Président
?

– Pourquoi
des retards dans le paiement des indemnités parlementaires
qui sont pourtant périodiquement versées par le
Trésor et la Banque Nationale ?

– A quoi
ont été utilisées les indemnités des
cinq mois non payés ?

– Est-ce
que les fonctionnaires de l’Assemblée Nationale ont aussi
un retard dans le paiement de leurs salaires de cinq à
six mois ?

– Est-ce
vrai que les cotisations en suspens auprès de l’UNION INERTPARLEMANTAIRE
(UIP), D’ AFRIQUE CARAIBES PACIFIQUE (ACP), etc. … depuis
1993, n’ont pas été régularisées ?

– Est-ce
vrai que depuis ces dernières années, depuis que
les cotisations ne sont pas honorées, les députés
djiboutiens qui se rendent aux Conférences de ces Organismes
Internationaux ou Régionaux, que nos députés
n’ont pas droit à la parole encore moins aux votes ?

– Alors
c’est à se demander pourquoi se rendre à de telles
Conférences, pourquoi toutes ces dépenses, alors
que l’on ne sert à rien ? Alors que les participations
de nos députés ne servent strictement à rien,
puisqu’ils n’ont rien à faire là-bas.

– Alors
pourquoi toutes ces dépenses inutiles ? Dépenses
qui s’élèvent en moyenne entre deux mille et trois
mille dollars US par personne.

Monsieur
le Président,

Il serait
hautement appréciable, que subsidiairement à votre
enquête financière, qu’une étude soit faite,
si possible, sur les différentes violations tant sur le
plan administratif, que sur le plan des procédures législatives.

Ayant personnellement,
une assez bonne connaissance par expérience du fonctionnement
de la Machine Administrative de l’Auguste Assemblée Nationale,
ainsi que de certains rouages des procédures législatives,
je peux vous affirmer mon entière disponibilité
à votre égard, pour vous apporte ma modeste contribution.

Permettez-moi,
Monsieur le Président de vous témoigner mon entière
solidarité à votre égard et à l’égard
de tous les membres de la Chambre des Comptes, dans votre noble
combat visant à mettre fin à l’Impunité,
aux Détournements des Fonds Publics, à la Corruption
en République de Djibouti.

La sévérité
et l’efficacité de vos Jugements seront sans aucun doute
appréciées par le Chef de l’Etat, par toutes les
personnes éprises de Justice, par l’ensemble des contribuables
djiboutiens.

La sévérité
et l’efficacité de vos Jugements mettront inéluctablement
un sérieux coup de frein aux irresponsabilités de
bon nombre de nos Hauts Décideurs.

Avec mes
sentiments déférents.

Jean-Paul Noël ABDI

Pour Information
:

Le Ministre
de la Justice chargé des Droits de l’Homme
Mme K. ABEBA Présidente de la Cour Suprême