02/09/2002: Sauver le Petit Hassan : ne pas se laisser tenter par une confusion entre la récupération politique et la dénonciation des carences scandaleuses de la classe politique au pouvoir.

Nous avons reçu par e-mail, ce courrier qui ne comporte pas le nom du signataire ce qui pourrait, en fonction de son contenu, laisser la porte ouverte à différentes suppositions. Malgré cela, en application de nos règles de fonctionnement, nous le publions in extenso, estimant quand même qu’il pourrait être préjudiciable à l’enfant de le mettre sur la place publique, mais avons-nous une autre alternative que de nous ranger à la demande explicite de son auteur, sans être taxés de censure ?

Nous regrettons simplement que l’interlocuteur ait fait le choix d’un style polémique et qu’il préfère, à certains moments, se positionner en donneur de leçons. En effet, ce choix ne nous semble pas tout à fait opportun, sauf s’il y avait matière à satisfaire d’autres motivations parallèles, que des lecteurs, plus au fait de la situation locale, pourraient interpréter sans difficulté.

Refusant de nous laisser engager dans une polémique aussi inutile que stérile, dans les circonstances actuelles, nous nous limiterons à faire deux brèves remarques.

1 – La première remarque concerne la différence à faire entre  » récupération politique  » et  » dénonciations de faits politiques entre l’asservissement d’une population entière « .

Nous reprenons le titre choisi :  » pas de politique pour sauver le petit Hassan  »

Aucune personne censée ne pourrait dire le contraire ! Prétendre que l’ARDHD pourrait avoir un objectif politique à Djibouti serait une interprétation dénaturée qui porterait à sourire si ce n’étaient les circonstances, puisque n’étant pas Djiboutiens nous ne pouvons pas nourrir d’ambition de cet ordre !

Mais attention, il convient d’éviter l’amalgame entre ce que l’auteur qualifie de  » récupération politique d’une situation « , qui ne se justifie pas en effet et  » la dénonciation de faits tragiques et inadmissibles conséquences de l’irresponsabilité des décideurs politiques « , qui doivent être dénoncés fermement, ce que nous continuerons à faire, même si cela déplaît au pouvoir, à ses proches et à ses partisans …

Dans un autre contexte, nous aurions pu nous interroger sur les véritables motivations de l’auteur lorsqu’il pratique la confusion (volontaire ?) entre ces deux notions fondamentalement distinctes ? Il est clair que, depuis quatre ans, si l’ARDHD n’a jamais pratiqué la récupération politique, elle dénonce ouvertement et sans faiblesse les dirigeants du régime, car ils sont responsables personnellement du délabrement de l’Etat, de la Justice, de l’Economie, de l’Education et surtout de la Santé, qui est notre sujet. Nous serions incapables d’imaginer que ce soit cet aspect de nos actions qui puisse déranger notre interlocuteur, sauf alors à se poser des questions de fond sur ses engagements personnels en faveur de la pérennité du régime actuel … mais nous refusons de l’envisager !

Sur les bases établies de cette différence, nous voulons croire que l’auteur s’est laissé un peu emporté dans la conjoncture et nous ne saurions donc lui en tenir grief. En effet, comme nous l’avons toujours écrit, la priorité est de sauver cet enfant, et toutes les interventions qui vont dans ce sens, doivent être reconnues, encouragées et soutenues, en dehors de toutes divergences d’appréciation ou d’objectifs. Même si nos alertes n’avaient eu, pour effet, que de renforcer la prise de conscience des acteurs susceptibles d’intervenir, l’ARDHD en serait fière. Mais nous savons qu’elles ont aussi eu d’autres impacts concrets, sur lesquels nous resterons discrets.

Sur l’aspect purement politique, l’auteur affirme que les autorités djiboutiennes ne sont pas intervenues à quelque niveau que ce soit et nous le citons :  » A propos de  » Politique  » et pour votre information, nous pouvons vous assurez que nous n’avons reçu à ce jour aucun appui de quelque autorité politique que ce soit, y compris de celles en charge de la Santé Publique « . Cela prouve, sans erreur possible, que la politique à Djibouti est en cause puisqu’elle n’est pas intervenue …

Serait-ce alors se rendre coupable  » de récupération politique  » que de condamner cette situation affligeante où les services de santé n’interviennent pas dans un cas aussi tragique ? Faut-il rappeler que ce pays a reçu tant d’aides pour améliorer le secteur de la Santé publique et les soins, qu’il bénéficie conjoncturellement d’une présence militaire internationale importante (France, USA, Allemagne, ..), disposant certainement de moyens médicaux et de possibilités d’évacuation vers des hôpitaux équipés. Répondraient-elles par la négative à une demande d’assistance médicale officielle ? ?

Notre rôle s’est limité à dénoncer la situation qui a conduit à l’établissement de ce constat pour tenter de susciter des améliorations dans l’avenir au seul bénéfice du Peuple djiboutien et de ses enfants et à mobiliser la communauté djiboutienne exilée, souvent par obligation.

2 – Eviter à tout prix la multiplication de cas semblables.

Dans le prolongement direct du premier point, notre deuxième remarque concerne la situation actuelle et celle des autres enfants djiboutiens victimes de maladie et de manque de traitements.

Faudrait-il se voiler la face, comme pourrait le suggérer indirectement l’auteur du message en occultant les graves responsabilités politiques ?

Certainement pas, car nous estimons qu’il est de notre devoir faire tout ce que nous pouvons pour éviter que des situations semblables ne se reproduisent et ne se développent dans l’avenir. Il est inadmissible que des enfants malades soient les victimes innocentes des carences et des dysfonctionnements des différents services, privés de ressources pour différentes raisons.

Si nous ne disposons d’aucune information précise aujourd’hui sur des cas d’autres enfants malades, cela ne veut pas dire que celui du petit Hassan est un cas unique : il y a vraisemblablement d’autres enfants oubliés sans soin à Djibouti par le système et d’autres familles dans la douleur.

La gravité du cas du petit Hassan justifie pleinement les moyens et la mobilisation de toutes les bonnes volontés, sans aucune arrière-pensée, mais personne ne peut être dupe : cela fait huit mois qu’il était abandonné sans soin non seulement par la médecine djiboutienne, mais aussi par la médecine militaire française.

Qui ne serait pas révolté en lisant cette phrase douloureusement accusatrice de l’auteur, que nous reprenons en lui en laissant la responsabilité :  » Ce contact (avec la famille) nous a permis d’accéder au dossier du petit et de constater que l’enfant avait été suivi par l’hôpital militaire français Bouffard qui l’avait laissé rejoindre son foyer familial, faute d’équipements sanitaires adéquats « .

Nous serions bien surpris d’apprendre que les solutions qui pourraient être mise en œuvre aujourd’hui (Evacuation sanitaire par exemple) n’étaient pas accessibles, il y a huit mois. Difficile à croire et à admettre et en tout cas, très peu flatteur, pour les médecins militaires français qui pourraient alors être tenus pour responsables, sur les bases de cette déclaration publique, de ‘non-assistance à personne en danger’.

3 – La troisième remarque aurait pu concerner les motivations de son auteur.
Du fait de son anonymat (nous ne savons pas qui il est), nous ne voudrions surtout pas émettre de suppositions ou diffuser certains doutes que nous pourrions avoir sur l’auteur.

Certes, nous sommes un peu étonnés que l’essentiel du message (et l’une de ses principales finalités) soit consacré à démontrer, chronologie à l’appui, que son action est la première du genre. Comme il le dit en fin de compte, seule la santé de l’enfant compte. Pour rassurer pleinement notre interlocuteur, nous tenons à ce qu’il sache que nous ne sommes pas intéressés par une première place dans ce type de compétition. C’est la raison pour laquelle, nous lui donnons volontiers acte des faits qu’il rapporte sans chercher à les contredire, car il est clair que nous n’avons rien à démontrer dans ce domaine, d’autant plus que nous sommes situés à 8.000 kms de Djibouti. Nos motivations, sont limitées à l’aspect humanitaire, sans aucune visée, en tout cas, en ce qui nous concerne, sur le plan d’une notoriété qui n’est plus à établir et qui est au service exclusif des Djiboutiens lassés de la situation actuelle. Mais ce n’est pas le sujet et nous refusons de nous y laisser entraîner plus avant.

En conclusion, ce message ‘un peu surprenant’ nous a été adressé en réponse à des questions classiques de notre part, pour recevoir des nouvelles de l’enfant, être assurés de sa prise en charge par l’hôpital militaire français ce matin et obtenir une évaluation des besoins de la famille sur le plan matériel, afin de lui adresser, via la LDDH, l’intégralité des fonds recueillis afin de l’aider à accompagner son enfant dans les épreuves, y compris si elle doit effectuer un voyage en France.

Enfin, nous restons toujours très perplexes sur les finalités réelles d’un accord passé avec le journal La Nation (et/ou l’ADI), dont l’indépendance (c’est le moins que l’on puisse dire) n’a jamais été clairement établie. Nous ne suivrons pas l’auteur sur les raisons des accords qu’il a négociés avec ces deux média, car les organes de communication officielle du pouvoir sont trop contestés par toute l’opposition et relativement discrédités pour leur engagement total au côté de la dictature, de l’injustice et de la répression. La soudaineté de l’information publiée par La Nation ouvre, pour certains, la possibilité d’une manoeuvre médiatique dont les fondements seraient relativement éloignés des besoins réels de ce malheureux enfant et de sa famille. Sans aller jusque là, nous pensons qu’il convient de rester assez prudent face à ce retournement humanitaire, inhabituel et imprévu de La Nation.

Avant de mettre un point final à ce débat qui n’aurait jamais du avoir lieu (au moins sur la place publique) et pour rester sur un terrain purement apolitique, nous renouvelons nos plus sincères félicitations à cette personne pour ses initiatives, car elles ont, fort heureusement, débouchées sur la prise en charge du petit malade par les médecins militaires français, ce qui est rassurant et probablement la meilleure solution pour réaliser une évacuation sanitaire urgente, si elle est encore possible, après huit mois de non-traitement.

Bien entendu, nous sommes à sa disposition et à celles de tous ceux qui nous solliciteront pour organiser la liaison entre :
– les Associations en France, que nous contacterons dès que nous aurons été informés de la suite qui sera donnée après le diagnostic médical et qui ne manqueront pas de se proposer pour suivre cet enfant en France,
– et les personnes responsables à Djibouti.

Nous adressons surtout tous nos encouragements à la famille du petit Hassan et nous prions pour que l’enfant retrouve la santé et une existence normale. Ce sera la récompense des efforts conjugués de tous.

______________________________________ Texte du message :

Cher Monsieur Schaal,

Suite à vos différents écrits concernant le cas du petit HASSAN, le Comité de Soutien « SOS BEBE HASSAN », sis à Djibouti, tient à vous faire part de
cette mise au point que vous voudrez bien diffusez sur votre site, in extenso.

Déroulement des faits

1. La constitution du Comité de Soutien « SOS BEBE HASSAN » (la tante du petit en est membre)date du jour même de la parution de l’article de La
Nation à savoir le 22 Août 2002, dans l’après-midi et au sein précisément d’un mabraz de citoyens ordinaires.

2. Samedi 24 : prise de contact avec la famille pour la mise en ouvre des actions à entreprendre d’urgence. Ce contact nous a permis d’accéder au
dossier du petit et de constater que l’enfant avait été suivi par l’hôpital militaire français Bouffard qui l’avait laissé rejoindre son foyer familial,
faute d’équipements sanitaires adéquats.

3. Dimanche 25 : (1er jour ouvrable des banques de la place). En accord avec la famille le Comité procède à l’ouverture d’un compte bancaire destiné à
collecter les fonds nécessaires à une éventuelle évacuation.

4. Lundi 26 : Rencontre d’une délégation du Comité avec le Général de l’Hôpital Bouffard, dossier du petit à l’appui, pour demander la réintégration du petit jusqu’à son évacuation éventuelle. Requête acceptée par le Général DURAND, gestionnaire de l’hôpital Bouffard.

5. Mardi 27 : Point de presse avec l’organe La Nation, à l’origine de cette mobilisation, pour rendre compte de nos actions. La Nation relatera dans son édition du Jeudi 29 Août de cet entretien et l’ADI en fera une dépêche dans l’après midi. Laquelle depêche que vous interpréterez, hélàs, de manière
tendancieuse. En effet, ce n’est pas La Nation qui indiquera faire preuve de « transparence ». Mais plutôt nous qui déclarerons à l’ADI notre requête
acceptée par La Nation pour disposer d’un espace dans ses colonnes afin de nous permettre de rendre compte « en toute transparence » de l’évolution du
dossier et notamment des diverses donations.

6. Dimanche 1er septembre : Intégration du petit à l’hôpital Bouffard, comme prévu, ce matin à 8 h, heure locale.

Ce rappel des faits pour vous précisez que :

. La mobilisation à Djibouti autour du petit HASSAN provoquée par la lecture du Journal La Nation a été immédiate et donc antérieure à la vôtre….

. Notre Comité n’est l’émanation d’aucun mouvement politique et ne roule pour personne sinon que pour le petit Hassan.

. A cet égard, contrairement à vos écrits ce ne sont pas « les autorités de Djibouti » qui l’ont suscité mais bel et bien des citoyens et des citoyennes
de Djibouti, désintéressés, mus par un élan de solidarité à l’endroit d’un petit compatriote malade et indigent.

. L’Acceptation par Bouffard de réintégrer le petit ne doit rien à vos appels. Et, en toute modestie, vous nous contraigniez à l’affirmer, ce geste
est à inscrire à l’actif de notre Comité qui a entrepris les démarches nécessaires sur place et ce, sans interférence politique.

. A propos de « Politique » et pour votre information, nous pouvons vous assurez que nous n’avons reçu à ce jour aucun appui de quelque autorité politique que ce soit, y compris de celles en charge de la Santé Publique.

Pour conclure :

De grâce cessons toute récupération et toute exploitation politique qui, en
définitive, ne feraient que nuire à la cause que nous entendons tous défendre.

Cela dit, nous saluons vos efforts pour mobiliser la solidarité Internationale autour de ce petit mais vous prions instamment de vous garder de mobiliser les énergies sur des bases politiques. A cet égard toute contribution doit se faire sans arrières pensées et dans le seul but de sauver l’enfant.

Ce que nous souhaiterions, c’est d’avoir en dehors de Djibouti un interlocuteur unique, une sorte de Comité de Coordination pour rationaliser les différentes initiatives et susceptible de prendre le relais en france, une fois l’évacuation du petit assurée. En effet, notre mission ne pourra se
limiter qu’à cette étape.

Merci de votre compréhension.

Salutations solidaires

Le Comité de Soutien « SOS BEBE HASSAN »