15/10/02> «Limburg» : le Yémen admet du bout des lèvres la thèse de l’attentat (Extrait du FIGARO)

Des enquêteurs examinaient, samedi, la coque du Limburg.

La partie visée par les terroristes était l’une des trois cuves

sur les quinze du navire à contenir du pétrole.
(Photo Abdel Naby/Reuter.)

Al-Mukalla : de notre envoyé
spécial Adrien Jaulmes – Extrait du Figaro
[14 octobre 2002]

Le hors-bord fonce vers
le large. Assis à l’arrière de sa longue pirogue de fibre de
verre, Ali actionne avec désinvolture la manette des gaz du moteur.
Les vaguelettes se brisent sous l’étrave avec de petits chocs sourds.
Des nuées de petits poissons argentés sautent devant la barque.
Le soleil est déjà brûlant au-dessus du golfe d’Aden,
alors que la ligne beige de la côte et les maisons blanches du port
de Mukalla disparaissent dans le lointain.
Le bateau d’Ali se rapproche maintenant à toute vitesse de l’immense
coque du superpétrolier Limburg. Un remorqueur traîne péniblement
le navire géant dans un sillage nauséabond de gas-oil, à
plus de 12 milles de la côte, en dehors des eaux territoriales yéménites.
On distingue à présent une caverne noire au niveau de la ligne
de flottaison. C’est là où une embarcation pleine d’explosifs
s’est, selon toute vraisemblance, jetée contre le pétrolier
dimanche 7 octobre. Le reste du flanc tribord du Limburg est calciné,
d’un aspect curieusement gaufré par les tôles d’acier déformées
par la chaleur. Le château arrière est noirci par la fumée.
Un canot de sauvetage à moitié fondu pend à ses bossoirs.
L’énorme incendie qui a suivi l’explosion a forcé l’équipage,
composé de vingt-cinq marins bulgares et français, à
abandonner le navire, avant d’être maîtrisé par des remorqueurs
venus de la côte.

Ali fait le tour du pétrolier
à petite vitesse, minuscule barcasse au pied du bateau géant.
Les débris d’une embarcation de fibre de verre, comme le canot d’Ali,
ont été retrouvés par les enquêteurs. Ces bateaux
légers et résistants sont construits près du port de
Mukalla, et ont remplacé les « sambouks » et les «
dhows » de bois des pêcheurs.

Après une semaine
d’atermoiements et de démentis, les autorités yéménites
commencent à admettre ce dont sont persuadés depuis le début
les enquêteurs : l’explosion du pétrolier Limburg est due à
un attentat terroriste. « Les Yéménites ont fini par accepter
cette idée, au moins dans le cadre de nos réunions, confiait
hier un enquêteur. Il leur reste cependant à l’admettre publiquement
! »

De plus, l’attaque indique
un haut degré de préparation, qui est devenu la « marque
de fabrique » d’Al Qaida : l’embarcation suicide est arrivée
du côté du large, alors que l’attention de l’équipage
se portait vers la côte. La partie de la coque visée était
l’une des trois cuves sur les quinze du navire à contenir du pétrole.
Et, selon le commandant Ardillon, capitaine du Limburg, « seul un retard
de vingt-quatre heures dû au terminal pétrolier de as-Shir nous
à empêchés de nous trouver amarrés à la
bouée de chargement au moment de l’attaque. Si cela avait été
le cas, nous n’aurions pas pu sortir des flammes, et le bateau aurait été
entièrement détruit, ainsi que le terminal », estime-t-il.

Un second attentat retentissant
contre des intérêts occidentaux, deux ans après l’attaque
presque similaire du destroyer américain USS Cole en rade d’Aden, embarrasse
au plus haut point les autorités yéménites. Déjà
mis sur la sellette par les Américains, qui reprochent sa faiblesse
au gouvernement de Sanaa face aux réseaux islamistes implantés
dans ce pays montagneux, voisin de l’Arabie saoudite, le Yémen se serait
bien passé d’une nouvelle action terroriste sur son territoire.

————— Note de l’ARDHD
Certains esprits, forcément mal orientés (!) se demandent s’il n’y aurait pas une connexion plus ou moins directe, plus ou moins lointaine avec Guelleh, qui est de plus en plus soupçonné d’avoir aidé directement ou indirectement Al Quayda.

En l’état de nos connaissances, ce serait aller trop loin et nous ne pouvons pas suivre des hyptohèses.