14/09/03 (B212) L’Afrique, terre d’accueil et d’expulsion des clandestins (AFP Nairobi)

NAIROBI, 13 sept (AFP)
– A l’exemple de Djibouti qui a fixé à lundi un ultimatum pour
le départ des personnes en situation irrégulière, depuis
leur indépendance plusieurs pays africains ont ordonné aux clandestins
de faire leurs bagages, contraignant des dizaines de milliers de personnes
à fuir.

Depuis fin juillet, près
de 80.000 clandestins, essentiellement Ethiopiens et Somaliens, ont quitté
Djibouti, petit pays au coeur du dispositif anti-terroriste mis en place par
les Américains dans la Corne de l’Afrique.

Selon les autorités
djiboutiennes, il resterait autant de clandestins dans le pays. Une fois l’ultimatum
passé, lundi à minuit (21h00 GMT), ces immigrés risquent
d’être expulsés, le gouvernement ayant annoncé des « rafles ».

Ces départs forcés
de clandestins interviennent alors que les pays occidentaux renforcent considérablement
leur dispositif de protection aux frontières.

Avec cette politique de
fermeture des pays du nord et la multiplication des conflits, notamment en
Afrique, « les flux migratoires qui se dirigeaient vers les pays riches
sont bloqués sur le continent africain », explique à l’AFP
Driss El Yazami, secrétaire général de la Fédération
internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), basée à
Paris.

L’Afrique est devenue
« la première zone réceptrice de réfugiés
et de demandeurs d’asile », ajoute-t-il. Elle accueille aujourd’hui plus
de la moitié des 25 millions de réfugiés dans le monde,
selon la FIDH.

Parallèlement,
le continent noir est devenu une terre d’expulsion. Car l’exode de clandestins
de Djibouti n’est pas le premier du genre en Afrique.

L’opération la
plus spectaculaire a été organisée en 1983 au Nigeria.
A la veille de l’élection présidentielle, Lagos a ordonné
l’expulsion de tous les étrangers en situation irrégulière,
provoquant l’exode sans précédent de plus de deux millions de
personnes, essentiellement des Ghanéens. Deux ans plus tard, les autorités
nigérianes chassaient encore 700.000 clandestins.

Ces expulsions, pour
des raisons économiques ou politiques, sont souvent synonymes de spoliations,
brutalités, rackets, parfois de morts. En revanche, le départ
des clandestins de Djibouti s’est effectué, jusqu’à présent,
de façon pacifique.

Ces expulsions sont souvent
décidées par des pays à l’économie relativement
dynamique: le Nigeria, important producteur de brut, Djibouti, qui jouit d’une
certaine prospérité avec la présence de bases militaires
américaine et française, ou encore le Gabon, autre puissance
pétrolière, qui a expulsé en 1995 80.000 étrangers
qui ne s’étaient pas acquittés, notamment, des frais de cartes
de séjour.

Plus récemment,
poursuit Driss El Yazami pour expliquer les expulsions, les pays qui hébergent
des clandestins, notamment les Etats africains, ont subi « une double
pression, américaine et européenne, leur demandant de jouer
le rôle de surveillance des flux migratoires ».

Enfin, les Etats sont
devenus très méfiants à l’égard des immigrés
clandestins en raison de la « confusion récente entre le demandeur
d’asile, le travailleur immigré économique et le présumé
terroriste », ajoute-t-il, en citant notamment le cas de Djibouti.

En mai dernier, plusieurs
pays occidentaux, dont les Etats-Unis, avaient estimé que ce petit
pays pouvait être la cible d’attentats.