27/03/04 (B240) Le Ministre de la Défense suit l’avis de la Commission et décide de lever le secret Défense pour 10 documents (sur 12 au total) qui concernent l’assassinat du Juge Borrel. (AFP)

Paris lève le
secret défense dans l’affaire du juge Borrel mort à Djibouti

PARIS, 27 mars (AFP) –
Le gouvernement français a transmis à la justice dix documents
émanant de la Direction générale de la sécurité
extérieurerenseignements extérieurs) relatifs à la mort
du juge Bernard Borrel, décédé dans des conditions suspectes
à Djibouti en 1995, ce qui pourrait accélérer l’enquête
judiciaire.

Le
ministre de la Défense Michèle Alliot-Marie « a décidé
la levée du secret défense » sur les documents de la DGSE
concernant le décès du magistrat, alors conseiller du ministre
de la Justice djiboutien, a annoncé samedi le ministère de la
Défense.

« C’est une bonne
nouvelle. On va pouvoir enfin avoir accès rapidement à ces documents »,
s’est félicitée samedi la veuve du magistrat, Elisabeth Borrel.

La thèse du suicide
du juge Borrel – dont le corps calciné avait été retrouvé
le 19 octobre 1995 à 80 km de Djibouti – a longtemps été
privilégiée avant d’être mise à mal par une série
d’expertises remises depuis un an à la juge d’instruction de Paris
Sophie Clément, en charge de l’affaire.

Dans un avis, publié
samedi au Journal officiel, la Commission consultative du secret de la défense
nationale (CCSDN) se dit « favorable à la déclassification »
de dix documents de la DGSE « confidentiel défense » (le niveau
le plus faible de classification) et ne se prononce pas sur deux autres notes
qui ne portent « aucun marquage de classification au titre de la protection
du secret de la défense ».

Selon le ministère
de la Défense, « la procédure relative à l’examen
de la demande de déclassification de documents concernant le décès
du juge Borrel s’est déroulée de façon normale ».
Mme Alliot-Marie a « fait connaître sa décision de lever
le secret sur ces documents afin qu’ils puissent être transmis au juge »,
a-t-on ajouté.

Lors d’une conférence
de presse organisée avant l’annonce du ministère de la Défense,
Mme Borrel avait estimé qu' »une démocratie comme la France
ne peut couvrir les assassins d’un magistrat chargé d’une coopération
judiciaire internationale ».

« C’est tout de même
triste de devoir faire une conférence de presse pour contraindre un
ministère à respecter la loi. Je pense qu’on va découvrir,
à la faveur de ces documents, que le gouvernement savait que Bernard
a été assassiné », a affirmé Mme Borrel.

« Ca a été
très long et en tant que magistrate, je suis bien placée pour
savoir que le dépérissement des preuves, ça existe »,
a-t-elle déploré.

La thèse du suicide
du juge Borrel s’est trouvée contrariée par un rapport remis
le 4 novembre à la magistrate et réalisé par trois experts
médicaux-légaux et un spécialiste de la propagation des
incendies.

Les experts ont relevé
que le cadavre du magistrat présentait une alternance de zones brûlées
et de zones préservées sur l’ensemble du corps.

Or, selon eux, de telles
constatations semblent peu compatibles avec le comportement d’une personne
qui se serait immolée par le feu.

Elles sont par contre
compatibles avec un corps « immobile, en position couchée »,
sur lequel le combustible a été « déversé
de manière aléatoire ».

Par ailleurs, le procureur
de la République Yves Bot avait déclaré à Mme
Borrel, lors d’un entretien le 1er mars, qu’il retenait désormais la
thèse de l’homicide volontaire.

La
veuve du juge Borrel accuse l’actuel président djiboutien Ismaël
Omar Guelleh d’être l’un des commanditaires de l’assassinat de son mari.