30/03/05 (B291) Transcription de l’interview du Président de la LDDH (Jean-Paul Noël Abdi) sur les ondes de la BBC.

TRANSCRIPTION
DE L’INTERVIEW DU PRESIDENT DE LA LDDH
SUR LE REPORT DES ELECTIONS

PAR
CHRISTOPHE FARAH
DE LA BBC SECTION FRANCAISE
LE 24 MARS 2005

Questions
de Christophe Farah à M. Jean-Paul ABDI NOEL

Le
Ministre M. Abdoulkader Doualeh Waiss avait mis en garde l’Opposition contre toutes
manifestations avant la tenue du scrutin. Une élection que l’Opposition
a décidé de boycotter, le Président sortant Ismaël Omar
Guelleh est ainsi le seul candidat en lice.

Le
Ministre de l’Intérieur a déclaré dans une Conférence
de Presse que les Partis politiques peuvent prôner l’abstention, mais il
a souligné que les auteurs de toutes manifestations de nature à
troubler l’ordre public sont passibles de sanctions pénales.

Le
Président de la Ligue Djiboutienne des Droits Humains M. Jean-Paul ABDI
NOEL demande pour sa part, un report du scrutin, il affirme que les conditions
ne sont pas réunies pour une élection pluraliste.

Réponse
:

La refonte des listes électorales n’a jamais été
faite depuis l’indépendance.

Une
refonte c’est une sorte de recensement, on revoit toutes les listes, parce à
Djibouti, et le Président le reconnaît à la télévision
récemment, reconnaissance implicite, en disant que l’Opposition va dire
qu’il y a des morts qui votent.

 

Question
:
Quels sont les autres facteurs qui plaident pour un report du scrutin ?

Réponse
:
D’abord comme vous pouvez le constater, je vous ai dit, que j’ai
écrit une lettre au Président de l’Assemblée Nationale, parce
qu’il y a une vacance de Pouvoir, lorsqu’un Président en exercice se présente
lui-même en tant que candidat, à ce moment là, il ne peut
pas être juge et partie. Il faut qu’il démissionne et à ce
moment là il devient un simple citoyen. C ‘est alors que la Présidente
de la Cour Suprême en principe le remplace ;

En
effet, avec le Président de la République qui est Chef du Gouvernement,
Chef des Armées, Chef de la Justice, en tant que Premier Magistrat, Chef
des Deniers Publics, je crois que c’est très, très malsain, comme
opération.

 

Question
:
Est-ce qu’il y a un point de la Constitution qui dit que le Président
sortant doit démissionner dans une élection présidentielle,
s’il n’a pas de rival, est-ce qu’il y a un point précis en la matière
?

Réponse
:
La nécessité d’un rival, c’est le principe même
de la pluralité qui est imprimé dans la Constitution djiboutienne.

La pluralité
des élections est si vous voulez le principe fondamental même de
la Démocratie, ce qui aujourd’hui n’est pas le cas.


COMPLEMENT
D’INFORMATION

Tenant compte du peu de temps accordé sur les
ondes de la BBC, il s’avère nécessaire de reprendre des passages
de la Constitution pour une meilleure compréhension de la nécessité
d’un report que malheureusement le Gouvernement a outrepassé.


1er Sur les articles en faveur du report.
Les articles 87 et 88 déterminent
les dispositions pour la révision de la Constitution.
Dans le cadre
d’un projet d’amendement provisoire de l’article 25 de la Constitution du 4 septembre
1992, et suite à la question du Ministre de l’Intérieur au Président
de la LDDH, il a été proposé cette proposition suivante :

Article
1er
L’article 25 de la Constitution est provisoirement amendé comme
suit :
Au lieu de
Les élections présidentielles ont lieu
trente jours au moins et quarante jours au plus avant l’expiration du mandat du
président en exercice.

Lire
A
titre exceptionnelle, et afin de mettre en application le principe de la pluralité
qui découle de la Constitution de 1992 et de l’ensemble des Instruments
Internationaux et nationaux, les élections présidentielles seront
reportés pour une durée au maximum d’un an à compter du 8
avril 2005

Article
2

La préparation, l’organisation, la surveillance, et le déroulement
de tous les processus des prochaines élections présidentielles seront
fixés après consultations et accords entre les deux blocs politiques.

La Constitution dans le premier et dernier alinéa de son article 87 permet
au législateur d’apporter des amendements provisoires de formes sans porter
atteintes aux dispositions de l’article 88.

Article
87 1er et dernier alinéa :

L’initiative de la révision de
la Constitution appartient concurremment au Président de la République
et aux députés…
…Toutefois, la procédure référendaire
peut être évitée sur décision du président de
la République ; dans ce cas, le projet ou la proposition de révision
ne sont approuvés que s’ils réunissent la majorité des deux
tiers des membres composant l’Assemblée nationale.

Article
88

Aucune procédure de révision ne peut être engagée
si elle met en cause l’existence de l’Etat ou porte atteinte à l’intégrité
du territoire, à la forme républicaine du gouvernement ou au caractère
pluraliste de la démocratie djiboutienne.
– 2ème Sur le principe
de la pluralité base même de la Démocratie.
Comme vous
pouvez le constater dans la dernière phrase de l’article 88 qui dit :  »
au caractère pluraliste de la démocratie djiboutienne.  » ainsi
que le deuxième alinéa du

Préambule
de la Constitution qui stipule :  » Il (le Peuple djiboutien) affirme sa détermination
à établir un Etat de Droit et de Démocratie pluraliste garantissant
le plein épanouissement des libertés et droits individuels et collectifs
ainsi que le développement harmonieux de la communauté nationale.
« 

Vous
pouvez le constater le fait d’imposer une seule candidature à la prochaine
élection présidentielle dénote une nette volonté politique
de se maintenir au pouvoir.
Face à l’opacité du processus électorale
entretenue depuis 1992 et l’absence de dialogue entre les deux blocs politiques
nationaux ;

La
Ligue Djiboutienne des Droits Humains exige la sauvegarde de la Paix sociale,
dans le respect du principe de l’Etat de Droit garantissant tous les aspects de
la démocratie républicaine.

CONSTAT
Avec
le refus de reporter les élections présidentielles du 8 avril 2005,
il est légitime de constater, que la Constitution nationale vient d’être
clairement bafouée et que la voie de la dictature vient de s’établir
de manière flagrante en République de Djibouti.

NB
Suite
à la déclaration du Ministre de l’Intérieur contre d’éventuelles
manifestations populaires et pacifiques qui seraient organisées par l’Opposition
qui prône le boycott des élections présidentielles, la LDDH
très préoccupée dénonce toutes les remises en cause
des libertés d’expressions et des communications en faveur du pluralisme
électoral et de la démocratie des urnes.

M.
NOEL ABDI Jean-Paul