02/05/06 (B348-A) Appel conjoint du 26 avril 2006 de : Acat, Aedh, Agir ici, CCFD, Survie, au Président Chirac, concernant le Tchad et la position des autorités françaises.

TCHAD
APPEL AU PRESIDENT FRANÇAIS

Monsieur le Président de la République,

Les développements de la situation au Tchad sont d’une extrême gravité et suscitent notre plus vive inquiétude pour les populations de ce pays. C’est en concertation étroite avec les associations tchadiennes que nous nous adressons à vous dans l’urgence.

Les raisons de cette crise sont multiples : le régime despotique, brutal et corrompu que préside Idriss Déby Itno est en décomposition. Il est miné par des luttes internes et engagé dans un conflit avec le Soudan par groupes rebelles interposés, auquel participe, à son encontre, une partie importante de son armée.

Le Président Déby est en conflit avec la Banque mondiale, le consortium pétrolier, son opposition politique démocratique ainsi qu’avec la société civile…. La France
apparaît aujourd’hui comme le dernier soutien de ce régime.

1. Nous pensons que la politique française pour garantir la stabilité du Tchad et de la sousrégion par le soutien au régime de Déby est un échec. Nous pensons également que la stratégie française de sortie de crise, basée sur la réélection (inévitablement frauduleuse) du Président Déby suivie d’un dialogue politique incertain exacerbera en fait les tensions et violences politiques dans ce pays. Le remplacement de Déby par un autre seigneur de guerre serait également une stratégie inopérante.

2. Nous dénonçons donc l’appui politique inconditionnel de la France au régime de Déby, qui s’est caractérisé ces derniers jours par un soutien de l’armée française —très coûteux pour les contribuables français — déterminant dans le maintien au pouvoir du clan présidentiel. De même, nous dénonçons toute tentative de prise de pouvoir par les armes au Tchad.

3. Nous vous demandons instamment d’abandonner cette politique dangereuse pour les populations tchadiennes comme pour nos concitoyens français vivant sur place au profit d’une véritable démarche de soutien à la paix et à la démocratie telle que le proposent les organisations de la société civile tchadienne : cessez le feu, protection des populations civiles, mise en place d’une transition politique, dialogue national pour une réconciliation, et enfin des élections libres et transparentes. Le dispositif Epervier pourrait assurer la sécurisation d’un tel processus au Tchad, dans le cadre d’un mandat précis de la communauté internationale et en présence d’observateurs indépendants, dans l’attente d’une force internationale de maintien de la paix.

4. Nous souhaitons aussi que vous agissiez auprès de l’Union européenne afin que celle-ci s’engage dans cette option politique, afin de rompre avec une logique strictement francotchadienne, qui plus est, développée hors de tout contrôle législatif.

5. Nous demandons par ailleurs qu’un débat parlementaire ait lieu dès que possible sur la politique française au Tchad. En 1998, le Parlement avait clairement fait la proposition d’être associé pour tout engagement extérieur des forces françaises. L’implication des services de renseignement français et de l’armée française dans le conflit tchadien justifient amplement cette demande.

Marc Zarrouati
Président de l’ACAT-France

André Barthélémy
Président d’AEDH

Reynal Blion
Président d’Agir Ici

Joël Thomas
Président du CCFD

Odile Biyidi
Présidente de Survie