08/12/06 (B372) Somalie: La levée de l’embargo sur les armes, un décision dangereuse pour les tribunaux islamiques (Selon une dépêche de l’IRIN – Réseau d’information Nations Unies- relayée par All Africa)


UN Integrated Regional Information Networks

7
Décembre 2006
Publié sur le web le 7 Décembre 2006

Nairobi

La
décision du Conseil de sécurité des Nations Unies (ONU)
de lever l’embargo sur les armes contre la Somalie a vivement été
critiquée par l’Union des tribunaux islamiques qui craint un accroissement
de l’instabilité dans le pays. Toutefois, cette mesure devrait permettre
le déploiement d’une force de paix africaine chargée d’assurer
la sécurité des institutions fédérales de transition.

«
Cette décision est inopportune », a déclaré Ibrahim
Hassan Adow, le secrétaire de l’Union des tribunaux islamiques pour
les Affaires étrangères. « Elle ne fera qu’accroître
l’instabilité dans le pays. »

Les
tribunaux islamiques, qui contrôlent une bonne partie du sud et du centre
de la Somalie, ont prévenu les Etats africains que toute participation
à cette force de paix sera considérée comme une déclaration
de guerre ou un acte d’agression contre la Somalie.

Le
Conseil de sécurité a autorisé mercredi la création
par les pays africains d’une force de paix en Somalie. Cette force sera constituée
de contingents militaires fournis par l’Autorité intergouvernementale
de développement (Igad) qui regroupe le Kenya, l’Ouganda, le Soudan,
Djibouti, l’Ethiopie, l’Erythrée et le gouvernement de transition de
Somalie.

La résolution
prévoit notamment l’envoi de 8 000 hommes de l’Igasom, la mission de
maintien de la paix de l’Igad en Somalie. Elle disposera d’un mandat de six
mois et sera chargée de protéger le fragile gouvernement somalien.
Toutefois, aucune troupe des pays limitrophes de la Somalie ne prendra part
à cette opération.

L’Igasom
devra protéger les membres des institutions fédérales
de transition et du gouvernement, former les forces de sécurité
gouvernementales, rétablir les forces de défense nationales
et veiller à la sécurité dans Baïdoa, ville où
est installé le gouvernement de transition du pays. En outre, l’Igasom
suivra l’évolution des pourparlers entre le gouvernement somalien et
les tribunaux islamiques et assurera la libre circulation et la sécurité
de toutes les personnes impliquées dans les négociations.

Pour
Ibrahim Hassan Adow, ceux qui ont fait adopter cette résolution ne
souhaitent pas la paix et la stabilité en Somalie.

Selon
l’analyste international Matt Bryden, la résolution finale du Conseil
de sécurité est meilleure que le « projet de résolution
présenté par les Etats-Unis. Toutefois, au stade où en
est le processus de paix, l’adoption de la résolution sur la Somalie
pourrait plutôt faire pencher la balance vers la guerre que vers la
paix. »

Quant
au gouvernement somalien, il a favorablement accueilli la résolution
et a appelé au déploiement rapide des forces de maintien de
la paix.

«
Nous nous félicitons de l’adoption de cette résolution. C’est
important pour la Somalie. Elle contribuera à instaurer la paix et
la stabilité dans le pays », a souligné le ministre de
l’Information Ali Jama Jangali. « Nous espérons que la résolution
sera appliquée à la lettre. »

«
L’adoption de la résolution intervient au mauvais moment et elle ne
favorise pas la poursuite du dialogue entre les deux parties », a déclaré
M. Muhammad Nur Ga’al, directeur adjoint de la Civil Society in Action, une
coalition de groupes de la société civile.

Selon
lui, les groupes de la société civile se concertent actuellement
et feront connaître leur position plus tard. Toutefois, a-t-il précisé,
« l’envoi de forces étrangères ne fera qu’aggraver la
situation et l’ONU aurait dû exercer une pression sur les deux parties
pour les obliger à poursuivre les pourparlers de paix de Khartoum.
»

Des représentants
des tribunaux islamiques et du gouvernement de transition s’étaient
rencontrés à Khartoum, la capitale soudanaise, mais n’étaient
pas parvenus à conclure un accord de paix définitif.

L’Ouganda,
qui est membre de l’Igad, a entre temps fait savoir qu’il enverra des troupes
en Somalie et qu’il est prêt à se conformer au texte de la résolution.

«
Il y a longtemps que nous [Forces de défense populaires de l’Ouganda]
avions pris la décision d’envoyer des troupes en Somalie, mais nous
attendions que le feu vert de l’ONU, a confié à IRIN le Major
Félix Kulaigye, porte-parole des Forces de défense populaires
de l’Ouganda (UDFP).

«
Un bataillon, formé aux opérations de maintien de la paix, est
prêt depuis l’année dernière », a-t-il ajouté.
« Nous pouvons désormais mettre en route nos procédures
internes, notamment solliciter l’approbation du parlement pour l’envoi de
nos troupes à l’étranger. Le ministre de la Défense devrait
très prochainement présenter une demande d’autorisation devant
le parlement. »

Mais
pour nombre d’observateurs, le déploiement de cette force, s’il devait
avoir lieu, n’est pas pour demain.

«
Si les troupes des pays limitrophes de la Somalie sont exclues de l’opération,
de quels pays viendront les autres contingents, puisque jusqu’à présent,
seul l’Ouganda a promis d’envoyer des troupes », s’est demandé
l’un des observateurs.

De
même, il faudra régler le problème du financement de l’opération.
« A mon avis, le déploiement des forces de l’ Igasom n’est pas
pour demain », a-t-il ajouté.

Le gouvernement
de transition de Somalie a été installé fin 2004 à
Nairobi pour tenter de ramener la paix et la sécurité dans ce
pays de la Corne de l’Afrique qui n’était plus dirigé depuis
près de 16 ans.

En juin
2006, les miliciens des tribunaux islamiques ont combattu les Seigneurs de
guerre qui contrôlaient le pays depuis 1991, après le renversement
du régime du défunt Président Muhammad Siyad Barre.