16/12/06 (B374) Somalie. Amnesty Belgique. Craintes pour les droit humains dans le conflit qui menace.


Déclaration publique

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AI : AFR 52/004/2006 (Public) Bulletin n° : 324 ÉFAI 15 décembre
2006

Amnesty
International met en garde contre une escalade du conflit en Somalie qui pourrait
se traduire par des violations graves et systématiques du droit international
humanitaire par toutes les parties. On peut s’attendre à des
atteintes graves aux droits fondamentaux des civils, des femmes et des enfants
notamment. Le conflit engendrerait aussi inévitablement un nouveau
déplacement massif de réfugiés à l’intérieur
du pays et en direction des pays voisins.

Amnesty
International demande donc instamment de toute urgence à toutes les
parties au conflit et à la communauté internationale de faire
de la protection des civils, du respect pour les droits humains et de l’accès
des civils à l’aide humanitaire d’urgence, des questions
de priorité.

Le 6 décembre,
le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté une
résolution autorisant l’envoi d’une force régionale
de maintien de la paix en Somalie, sous les auspices de l’Autorité
intergouvernementale pour le développement (IGAD) et de l’Union
africaine (UA). Le mandat de l’IGAD en Somalie (IGASOM)), force de maintien
de la paix de 8 000 hommes, est principalement de protéger le gouvernement
fédéral de transition et de former ses forces de sécurité.
Des heurts de plus en plus nombreux se produisent entre l’importante
force éthiopienne présente dans le pays qui soutient le gouvernement
fédéral de transition et l’Union des tribunaux islamiques.
Les tribunaux islamiques ont déclaré qu’ils combattront
l’IGASOM, bien que son déploiement ne soit pas prévu avant
quelque temps.

Amnesty
International, qui a redit que la protection des droits humains doit être
prise en compte dans toute résolution du conflit, demande instamment
que soit accordée une attention spéciale aux questions humanitaires
et relatives aux droits humains urgentes, notamment lors des pourparlers de
paix qui doivent reprendre bientôt à Khartoum entre le gouvernement
fédéral de transition et les tribunaux islamiques.

Complément
d’information Le gouvernement fédéral de transition a
été établi en 2004 après deux années de
pourparlers de paix entre factions armées claniques et treize années
d’effondrement de l’État. Toutefois, en dépit de
la reconnaissance internationale dont il bénéficie, le gouvernement
fédéral de transition n’a pas réussi à s’imposer
en dehors de sa base, dans la ville de Baidoa. Il est soutenu par une importante
force éthiopienne appelée en renfort par le président
Abdullahi Yusuf pour défendre les institutions fédérales
contre les forces des tribunaux islamiques. En juin, des milices des tribunaux
islamiques à Mogadiscio, la capitale, l’ont emporté sur
les dirigeants de factions précédemment liées au gouvernement
fédéral et ont étendu leur contrôle au centre et
au sud de la Somalie.

En octobre,
les tribunaux islamiques ont déclaré la djihad (guerre sainte)
contre les troupes éthiopiennes en Somalie et appelé au retrait
de toutes les « forces étrangères » de Somalie.
En novembre, le Premier ministre Meles Zenawi a annoncé des préparatifs
de guerre contre les tribunaux islamiques. Outre le fait que cela créé
de nouveaux obstacles à l’aide humanitaire d’urgence destinée
aux victimes des inondations et retarde les projets d’aide internationale
à la reconstruction et au développement, l’élargissement
du conflit pourrait affecter d’autres pays de la région et réactiver
les tensions entre l’Éthiopie et l’Érythrée,
dont les frontières sont toujours sous la surveillance d’observateurs
des Nations unies.

Le 29
novembre, le Conseil de sécurité des Nations unies a condamné
l’afflux d’armes entrant en Somalie en quantités toujours
plus grandes, en violation de l’embargo sur les armes décrété
en 1992. Le groupe de surveillance des Nations unies a signalé des
violations par 11 États, dont l’Éthiopie en faveur du
gouvernement fédéral de transition et l’Érythrée
en soutien aux tribunaux islamiques.

Les tribunaux
islamiques qui réclament l’instauration d’un État
islamique en Somalie, ont rétabli la paix à Mogadiscio et mis
un terme à des années d’atteintes graves aux droits fondamentaux
des civils par les factions armées. Les défenseurs somaliens
des droits humains s’inquiètent cependant beaucoup de l’impact
que pourrait avoir l’interprétation, par les tribunaux, de la
loi islamique (charia) qui impose d’importantes restrictions aux droits
fondamentaux des personnes, aux droits des femmes et à la liberté
d’expression.