22/12/06 (B374) REUTERS : 4e jour de combats en Somalie, mouvements de chars éthiopiens.

REUTERS
: vendredi 22 décembre 2006
par Hassan Yare

BAIDOA,
Somalie (Reuters) – Au quatrième jour de combats entre les forces islamistes
au pouvoir à Mogadiscio et les troupes du gouvernement fédéral
transitoire assiégé dans la localité de Baidoa, des chars
éthiopiens sont montés au front pour défendre celui-ci.

Les deux
camps, face à face à Daynunay, 20 km au sud-est de Baidoa, et
Idaale, 70 km au sud-ouest du siège du gouvernement, échangeaient
à distance des tirs d’artillerie et de roquettes, flirtant avec une
guerre totale dont nombre d’experts craignent qu’elle ne dégénère
en affrontement régional.

Les islamistes,
qui ont chassé en juin de Mogadiscio les chefs de guerre qui y faisaient
régner depuis 15 ans leur loi sanglante, ont en effet annoncé
qu’ils dépêcheraient samedi au front des renforts terrestres
massifs en vue d’une offensive en bonne et due forme.

"Nos
troupes n’ont pas encore commencé à attaquer. A partir de demain,
l’attaque va commencer", a annoncé à la presse Ibrahim
Choukri, porte-parole du Conseil des tribunaux islamiques somaliens (CTIS),
qui contrôle la plus grande partie du sud de l’ancienne colonie italienne.

Des habitants
de la région déclarent avoir été réveillés
vendredi avant l’aube par le grondement des chars éthiopiens montant
au front. "En me levant j’ai vu sept chars éthiopiens se diriger
vers Daynunay", a confié à Reuters Abdullahi Ali, un habitant
de Baidoa.

Un agriculteur
de la région, Mohamed Adan, a confirmé pour sa part avoir vu
une vingtaine de chars partir de Baidoa, certains en direction de Daynunay,
d’autres vers Idaale, seule autre localité encore tenue par les forces
gouvernementales.

Le gouvernement
éthiopien, qui nie la présence de milliers de ses militaires
en territoire somalien et ne reconnaît que celle de quelques centaines
de conseillers chargés d’épauler le gouvernement transitoire,
n’a fait aucun commentaire sur ces mouvements de blindés.

DJIHAD

Selon
le CTIS, l’Ethiopie a également acheminé par voies terrestre
et aérienne des troupes à Galkaayo, une ville stratégique
du centre aux mains des forces de la région semi-autonome du Puntland
alliées à l’armée régulière du gouvernement
de Baidoa.

"Nous
espérons que les combats débuteront simultanément là
aussi et nous appelons tous les Somaliens à se soulever et à
rejoindre la djihad contre notre ennemie l’Ethiopie", a déclaré
à la presse Ibrahim Souley, secrétaire du CTIS.

Si l’Ethiopie
engage des chars dans la bataille contre les islamistes, qui sont pour leur
part soutenus par sa "soeur ennemie" l’Erythrée, le conflit
risque de déborder des frontières de la Somalie pour contaminer
toute la Corne de l’Afrique, craignent les experts.

Les quatre
jours de combats qui ont opposé les forces islamistes et gouvernementales
dans les plaines désolées qui entourent Baidoa ont d’ores et
déjà fait des centaines de morts selon les bilans – invérifiables
indépendamment – fournis de part et d’autre.

Les hostilités
ont été engagées mardi soir, à l’expiration d’un
ultimatum d’une semaine lancé par le CTIS aux troupes éthiopiennes
pour qu’elles décampent du sol somalien faute de quoi elle devront
affronter une "djihad" (guerre sainte).

Vingt-quatre
heures plus tard, il apparaissait évident que les efforts diplomatiques
de l’émissaire de l’Union européenne Louis Michel pour ramener
les deux parties à la table des négociations étaient
déployés en vain.

Selon
les Etats-Unis et l’Ethiopie, considérée par Washington comme
son meilleur allié régional dans la lutte contre le terrorisme,
le CTIS, qui impose la charia dans les régions qu’il a conquises, serait
lié à Al Qaïda.

Les dirigeants
islamistes le démentent et assurent jouir du soutien populaire qui
faisait défaut au gouvernement transitoire reconnu par la communauté
internationale, et qui leur a permis de rétablir l’ordre dans un pays
livré à l’anarchie depuis la chute du dictateur Mohamed Siad
Barré en 1991.