19/01/07 (B378) MOGADISCIO (AFP) – Somalie : l’ONU presse le président d’œuvrer à la réconciliation (Info lectrice)

L’envoyé
spécial de l’ONU pour la Somalie, François Fall, a pressé
jeudi le président somalien Abdullahi Yusuf Ahmed d’oeuvrer à
la réconciliation nationale, après l’éviction du chef
du Parlement perçue comme un refus du gouvernement d’un dialogue politique.

Se disant "heureux"
de rencontrer M. Yusuf à la Villa Somalia, résidence officielle
des présidents somaliens criblée d’impacts de balles et désertée
depuis le début de la guerre civile en 1991, M. Fall a souligné
l’urgence pour le gouvernement de transition d’ouvrir un dialogue avec toutes
les parties somaliennes après la défaite militaire des forces
des tribunaux islamiques.

"Après
16 ans de guerre, nous sommes très heureux de voir le président
à la Villa Somalia (…) La route est encore longue et nous avons tant
à faire", a commenté l’envoyé de l’ONU après
ses entretiens avec M. Yusuf. "Le président nous a donné
des assurances qu’il continuera les négociations", a ajouté
l’envoyé de l’ONU, dont c’était la première visite à
Mogadiscio depuis la défaite des islamistes fin décembre-début
janvier face aux troupes gouvernementales appuyées par l’armée
éthiopienne.

"Le dialogue
continue et cela est la volonté de la communauté internationale
et des Nations unies de voir une Somalie réconciliée",
a-t-il jugé.

Mercredi, M. Fall
avait indiqué qu’il demanderait une explication au président
somalien sur la destitution du président du Parlement de transition,
Sharif Hassan Sheikh Aden, partisan d’un compromis entre les factions somaliennes
pour ramener la paix dans le pays et perçu par la communauté
internationale comme un homme susceptible de faire le lien entre le gouvernement
et les islamistes "modérés".

Le porte-parole
du gouvernement somalien, Abdirahman Dinari, a justifié devant l’envoyé
de l’ONU l’éviction de M. Aden, insistant sur son caractère
"légal". "Nous avons dit (à M. Fall) que le président
du Parlement avait été destitué légalement (…)
et que c’est aux Somaliens de décider qui est bon pour eux", a
déclaré à la presse M. Dinari.

Depuis leur mise
en place en 2004, les institutions de transition somaliennes étaient
impuissantes à établir leur autorité dans le pays.

La donne a changé
en décembre lorsque l’Ethiopie a engagé son armée aux
côtés des forces gouvernementales contre les milices des tribunaux
islamiques, qui avaient pris le contrôle depuis la mi-2006 de la majeure
partie du centre et du sud du pays.

Revenu à
Mogadiscio, M. Yusuf a instauré la loi martiale pour établir
l’autorité du gouvernement et signé un accord de désarmement
avec les chefs de guerre qui tenaient la ville sous leur coupe jusqu’à
l’arrivée des islamistes. Des dissensions opposaient le président
somalien, associé au Premier ministre Ali Mohamed Gedi, au président
du Parlement, favorable à un accord avec les dirigeants "modérés"
des islamistes et qui a tenté à plusieurs reprises, contre la
volonté du gouvernement, d’ouvrir des négociations avec eux.

Son éviction
a été désapprouvée par les Etats-Unis selon qui
elle pourrait avoir un "impact négatif sur le dialogue" intersomalien,
jugé indispensable par la communauté internationale pour sortir
le pays de la guerre.

De l’avis des experts
de la Somalie, sa destitution "est un message extrêmement négatif
envoyé à la Somalie", selon l’expression de Roland Marchal,
chercheur du Centre d’études et de recherches internationales (Ceri)
de Paris. "Elle montre combien le gouvernement fédéral
de transition n’a aucune volonté de négocier.

Elle
rend le dialogue presque impossible", selon lui.

Le renversement
de M. Aden est "à moyen et long terme, la recette de l’instabilité"
en Somalie, avec la possibilité "de voir apparaître une
insurrection", a commenté de son côté Matt Bryden,
analyste pour l’International Crisis Group (ICG).