19/06/07 (B400 B) AFP /Affaire Borrel : un document suggère d’éventuelles pressions sur RFI (Info lectrice) Le limogeage contesté de David Servenay de RFI trouve une explication que nous avions évoquée à l’époque… (Note ARDHD)

PARIS (AFP) – Une note diplomatique, que l’AFP
a pu consulter, suggère que Djibouti a demandé en 2005 la mise
à l’écart d’un journaliste de RFI travaillant sur le dossier
Borrel, la direction de RFI assurant de son côté n’avoir subi
aucune pression.

Le journaliste s’est vu progressivement retirer la couverture du dossier à
partir d’octobre 2005, avant de quitter définitivement l’entreprise
en mai 2007, a-t-on appris de source syndicale à Radio France Internationale.

La veuve du juge Bernard Borrel, tué en 1995 à Djibouti, avait
expliqué le 13 juin que des pressions avaient été exercées
sur la justice, mais également sur la presse, en citant le cas d’un
journaliste de RFI.

Djibouti avait conclu à un suicide du magistrat mais l’enquête
française privilégie désormais la thèse de l’assassinat.
Des témoignages mettent directement en cause le président Ismaël
Omar Guelleh et son entourage.

"Pourquoi RFI laisse-t-elle systématiquement l’un de ses journalistes
attaquer Djibouti et son président à l’antenne?", interroge
le ministre des Affaires étrangères djiboutien, Ali Abdi Farah,
cité dans une note diplomatique de l’ambassadeur de France à
Djibouti, Philippe Selz, du 24 janvier 2005, saisie par la justice au Quai
d’Orsay et que l’AFP a pu consulter.

"Tout cela est connu et se répète à longueur de
temps. On sait, vous savez que ce journaliste de RFI, toujours le même,
prend systématiquement fait et cause pour la veuve Borrel. Ne pouvez-vous
demander à RFI, et obtenir, qu’il ne s’occupe plus de Djibouti?",
demande le ministre.

Interrogé par l’AFP, le directeur de la communication de RFI, André
Sarfati, a affirmé que "les autorités de RFI" n’avaient
jamais subi "de pression ou d’intervention" politique, notamment
du quai d’Orsay, dans cette affaire.

Entré en 1996 à RFI, le journaliste mis en cause, David Servenay,
a travaillé à partir de 2002 sur le dossier Borrel. "Il
a beaucoup écrit, s’est beaucoup impliqué dans ce dossier et
l’a toujours fait dans les meilleurs conditions", a expliqué M.
Sarfati.

"Je ne souhaite pas faire de commentaire sur le conflit qui m’a opposé
à RFI ces dernières années. Je réserve mes déclarations
à la justice si elle souhaite m’interroger sur cette affaire",
a déclaré le journaliste à l’AFP.

"On avait expliqué à David qu’il n’y avait pas de place
sur RFI pour un journaliste qui ne ferait que de l’investigation. Mais lui
ne voulait faire que cela.

Je pense que c’est pour cette raison qu’il a souhaité quitter l’entreprise",
a expliqué à l’AFP Dominique Burg, directrice de la rédaction
de RFI.

"Je n’ai personnellement jamais subi la moindre pression, jamais reçu
de coup de fil des Djiboutiens ou du Quai d’Orsay. Je suis affirmative",
a-t-elle ajouté. Interrogé par l’AFP, le Quai d’Orsay s’est
refusé à tout commentaire.

Le traitement de l’affaire Borrel par RFI, radio financée à
60% par le Quai d’Orsay et considéré dans certains pays africains
comme "la voix de la France", selon l’expression de journalistes
de la station, avait provoqué en janvier 2005 les foudres de Djibouti
qui avait coupé l’émetteur local.

En interne, le retrait d’un reportage de David Servenay sur Mme Borrel et
d’un article sur le site internet de RFI avait été dénoncé
le 19 mai 2005 par le personnel comme "un cas de censure".

Le reportage et le sujet internet ont finalement été diffusés,
"après l’introduction du point de vue de Djibouti", pour
le premier, et "la suppression de passages qui pouvaient être diffamatoires",
pour le second, explique Dominique Burg.

"On se souvient qu’à l’époque, la direction avait affirmé
que c’était pour des raisons éditoriales que ce journaliste
était relevé du dossier Borrel. Mais s’il existe un lien entre
la note diplomatique et la décision, c’est proprement scandaleux",
a estimé Marc Thiebault, délégué CFDT à
RFI.