28/08/07 (B410) LE FIGARO : Affaire Borrel : deux hauts responsables djiboutiens devant la justice française

Pour la première fois, deux proches du président Ismaël Omar Guelleh, sont renvoyés devant la justice française pour subornation de témoins.

Des responsables djiboutiens vont enfin être traduits devant la justice française. Le procureur général de Djibouti Djama Souleiman et le chef des services secrets Hassan Saïd sont renvoyés pour "subornation de témoins" devant le tribunal correctionnel de Versailles par une ordonnance du juge Magali Tabareau, datée du 20 août. Les avocats de la veuve du juge ont salué "cette première victoire judiciaire" la justice française « renvoyant devant le tribunal deux proches de l’actuel président djiboutien".

Ce n’est pas la première fois que les noms de ces hauts fonctionnaires apparaissent dans l’instruction. En septembre 2006, ils avaient fait l’objet de mandats d’arrêt internationaux, valant mises en examen. Ils sont soupçonnés d’avoir exercé des pressions sur des témoins, qui mettaient en cause le président et des dignitaires du régime de Djibouti.

La première victime de ces pressions est un ex-membre de la garde présidentielle, Mohamed Saleh Alhoumekani, exilé en Belgique. Il explique en décembre 1996 avoir entendu, le jour de la mort du juge, cinq hommes déclarer à l’actuel président djiboutien Ismaël Omar Guelleh, alors directeur de cabinet de son prédécesseur, que le "juge fouineur est mort" et qu’"il n’y a pas de trace".

Le second témoin, dont la famille est menacée de représailles, est l’ex-chef de la garde présidentielle. Egalement réfugié à Bruxelles, Ali Iftin affirme que le chef des services secrets djiboutiens l’avait obligé à mentir.

Une instruction en trois volets

Mais cette avancée est loin de dissiper tous les blocages qui entravent l’affaire Borrel. Le dossier de subornation de témoins n’est que l’un des volets de l’affaire. Concernant le dossier d’assassinat instruit par la juge parisienne Sophie Clément, des mandats d’arrêt internationaux ont été délivrés en octobre 2006 à l’encontre des deux repris de justice en fuite, Awalleh Guelleh et Hamouda Hassan Adouani, suspectés d’avoir été les exécutants de cet assassinat.

Il y a deux mois, un ex-membre du renseignement militaire français avait déclaré devant la magistrate que le juge Borrel avait été chargé avant sa mort par le ministre djiboutien de la Justice d’enquêter sur "des trafics" auxquels Ismaël Omar Guelleh aurait alors été mêlé.

Parallèlement à l’instruction de Sophie Clément, deux autres magistrates parisiennes, Fabienne Pous et Michèle Ganascia, enquêtent sur d’éventuelles pressions politiques sur la justice française. Elles avaient vainement tenté le 2 mai de mener une perquisition à l’Elysée, sous la présidence de Jacques Chirac, après avoir saisi, deux semaines auparavant de nombreux documents aux ministères des Affaires étrangères et de la Justice.