04/08/08 (B459) LA KABYLIE / Attentat meurtrier en Somalie

La somalie replonge dans une situation critique après le coup de force du gouvernement de transition qui avait été appuyé par les troupes éthiopiennes en 2006 pour ravir le pouvoir aux islamistes. Ces derniers ont opposé une résistance armée farouche aux troupes régulières somaliennes jusqu’à la conclusion, en juin dernier, du fragile accord pour une trêve entre une partie de l’opposition et le gouvernement, sous les auspices de l’ONU. Mais l’explosion d’une bombe vient de nouveau déstabiliser un pays embourbé dans une crise politique aiguë.

Ironie du calendrier politique : cet été, au mois de juillet, devait être signé un cessez-le feu pour une première période de trois mois. Mais le mouvement radical du Shebab et des pans de l’opposition les plus extrémistes ont fait pression pour poser comme condition à cette paix des braves le départ immédiat des troupes éthiopiennes encore en position dans le pays depuis leur coup de main au gouvernement actuel en 2006. Des propos politiques qui expliquent ce sabordage évident d’un processus de normalisation presque surnaturel puisqu’il intervient à un moment où une bonne dizaine de ministres ont décidé de démissionner.

Une démission collective pour désavouer «une politique d’inaction et erronée dans l’utilisation des ressources de la nation.» Pour revenir à cet attentat aveugle, il faut savoir qu’il a touché de simples citoyens, des femmes notamment qui nettoyaient la chaussée dans un quartier du sud de Mogadiscio.

L’AFP rapporte ce témoignage bouleversant d’un somalien. «Elles étaient en train de balayer la rue quand une énorme explosion a secoué tout le quartier. J’ai compté jusqu’à quinze corps, pour la plupart des femmes, déchirés en morceaux.» Une quarantaine de personnes auraient été blessée suite à cette folie terroriste. Un bilan provisoire dont nous rendons compte ici tant le carnage n’a pas encore révélé toute son horreur. Une autre source, un médecin de l’hôpital de Medina, principale structure de santé de la capitale, le docteur Dahir Mohamed Mohamoud, a donné le chiffre de 47 blessés admis, dont cinq sont décédés des suites de leurs blessures.

Un rapide décompte macabre nous ramène déjà à un nouveau bilan d’au moins vingt morts. «C’est le plus grand nombre de victimes civiles que nous recevons en un seul incident depuis plusieurs semaines», a déploré le médecin, confirmant que la majorité des victimes sont des femmes. Ces dizaines de femmes en difficulté sociale avaient été recrutées par des associations dans le but de leur insertion, en échange de nettoyer les rues de la ville. Pour l’instant, aucune revendication de cet acte odieux n’a été enregistrée par les autorités somaliennes ; mais beaucoup de rancune, d’adversité empoisonnent la Somalie avec un lot de malheurs, crise de confiance, règlements de compte …

Ainsi, jeudi dernier, le maire de Mogadiscio, un chef de guerre allié du pouvoir contre les islamistes, a pourtant été relevé par le Premier ministre, Nur Hasan Husein. Il était reproché au premier magistrat de la commune de Mogadiscio, Mohamed Omar Habeb, sa tendance à l’abus de pouvoir et des affaires de corruption.

C’est donc sur plusieurs fronts que le gouvernement actuel, transitoire et menacé en permanence de renversement, doit mener son exercice d’équilibriste entre des alliés qui le lâchent et des opposants radicaux qui optent pour la surenchère.

Un gouvernement qui sait qu’à tout moment le pays peut revenir à la case de départ avec une guerre civile désastreuse qui pourrait reprendre comme au lendemain de la chute du régime de l’ancien président Mohammed Siad Barre en 1991. C’est alors toute la Somalie qui en pâtirait avec une poche de désolation irréductible sur ce continent africain déjà bien atteint par les conflits politiques sans fin.