16/09/08 (B465) AFP / Somalie: récit de la libération des otages français

Les trente commandos marine ont mis dix minutes pour mener l’assaut contre le voilier « Carré d’As » et libérer le couple d’otages français retenus par sept pirates somaliens, une opération soigneusement planifiée par les armées et la DGSE, les renseignements extérieurs.

Nicolas Sarkozy l’a raconté devant la presse à l’Elysée, flanqué du Premier ministre François Fillon et du chef d’état-major des armées, le général Jean-Louis Georgelin: « Hier (lundi) à 21 heures, j’ai donné l’ordre au chef d’état-major des armées de mener une opération pour libérer les deux Français retenus en otage depuis deux semaines ».

« L’opération a engagé une trentaine d’hommes; dix minutes après l’assaut du Carré d’As, les otages étaient sains et saufs, libres; dix minutes plus tard, le Carré d’As appareillait pour Djibouti », où la France possède sa plus importante base militaire à l’étranger, a expliqué le président, chef des armées.

Les hommes de plusieurs commandos marine, dont les nageurs de combat du commando Hubert, fer de lance des forces spéciales, ont affronté des pirates « lourdement armés » de RPG et de Kalachnikov, a-t-il souligné.

Un preneur d’otages a été tué et six capturés, mais aucun soldat français n’a été touché. L’affaire a été bouclée vers 03H30, heure française.

Les commandos patientaient depuis trois jours au large des côtes somaliennes, retenus par une brise soutenue de force 5.

Avant de lancer l’assaut proprement dit, ils se sont « infiltrés à proximité de l’objectif » et ont mené « une manoeuvre de diversion », faisant croire aux pirates qu’ils arrivaient par un autre côté, selon une source proche du dossier.

Contrairement à l’opération menée le 11 avril pour libérer les otages du Ponant « où l’on a montré nos muscles, ici, on a considéré que la discrétion et la surprise étaient des critères déterminants », selon cette source.

Depuis l’attaque du voilier le 2 septembre, les armées avaient déployé un vaste dispositif au large de la Somalie.

La frégate Courbet, dont l’hélicoptère a permis de localiser le Carré d’As dans la nuit de lundi à mardi et de guider l’assaut, ainsi que deux Atlantique-2 –avions d’observation maritime ultra-sophistiqués dont l’un est basé à Djibouti et un second appelé en renfort aérienne– avaient été mobilisés.

La France, a précisé sans plus de détails M. Sarkozy, a également reçu « l’appui » de l’Allemagne et de la Malaisie.

Il n’y a « jamais eu de négociation » avec les pirates qui avaient réclamé deux millions de dollars de rançon par la radio de bord du voilier, selon une source informée.

La Direction générale de la sécurité extérieur (DGSE), a été associée « de bout en bout » à cette opération, a-t-on expliqué. Son directeur Pierre Brochant était d’ailleurs présent au premier rang lors de la conférence de presse à l’Elysée.

« Nos services de renseignement ont été performants, efficaces et très disponibles », a simplement déclaré Nicolas Sarkozy.

La DGSE, a-t-on précisé, a apporté « sa connaissance de la zone, de la psychologie » des pirates, un « ciblage très précis de leur région d’origine, nord ou sud-Puntland », une sorte de « profilage » destiné notamment à déterminer le clan des pirates, Darod Majerteen ou Warsangali.

L’objectif était d’empêcher que les pirates ne parviennent à rejoindre Eyl, leur « nid de frelon » situé dans le nord-est de la Somalie, à environ 800 km au nord de Mogadiscio. « Une fois là-bas, on ne maîtrisait plus rien », a-t-on souligné.

Six jours de mer seront encore nécessaires pour que le Courbet rejoigne Djibouti en escortant le Carré d’As, un voilier de 16 mètres qui ne peut croiser à plus de 5 noeuds (10 km/h environ). A bord de la frégate: les ex-otages, les six prisonniers et le corps du pirate tué.