23/07/09 (B508) Nouvelles de Somalie (3 articles en Français)

___________________ 3 – Libération (Blog)

Otages en Somalie : le point sur une situation dangereuse

Plus d’une semaine après, les responsables français ne cachent pas leur inquiétude sur le sort des deux fonctionnaires de la DGSE enlevés le 14 juillet à Mogadiscio (Somalie).

Ils sont « en vie » et « bien traités » assure Claude Guéant, le secrétaire général de l’Elysée. Pour le reste, le silence est de plomb. A peine Bernard Kouchner affirme-t-il savoir « qu’ils sont séparés » et qu’ils pourraient être détenus par « deux groupes différents ». Le chef de la diplomatie française le reconnaît : « il y a des informations très contradictoires » venant de Somalie. C’est le moins qu’on puisse dire. Tentons d’y voir plus clair.

Qui sont ces « agents français » et que faisaient-ils là-bas?

Officiellement, Paris parle de «conseillers français en mission officielle d’assistance auprès du gouvernement somalien». En clair, deux fonctionnaires de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE).

Ils seraient rattachés à la Direction des opérations, qui se voit confier des missions de liaison et de conseils là où personne d’autres ne peut aller. Comme les autres pays occidentaux, la France n’a plus de représentation diplomatique en Somalie.Pas plus que de réseaux ou d’agents de renseignement.

Trop dangereux.

Arrivés à Mogadiscio vers le 5 juillet, via le Kenya, ces deux hommes, civils ou militaires, ne sont pas des espions agissant sous couvert dans le cadre d’une opération clandestine. Ce sont des fonctionnaires envoyés officiellement mais discrètement par la France pour aider les autorités « légales » de Somalie, le « gouvernement fédéral de transition » de l’islamiste « modéré » Sharif Cheikh Ahmed.

Leur rôle était double : évaluer les besoins en matière de sécurité du président somalien et servir d’éléments précurseurs pour la formation d’un bataillon militaire.

En mai 2009, la France et les Etats-Unis se sont engagés à aider le gouvernement somalien à se doter d’une petite « garde prétorienne » comme le dit Kouchner : Paris et Washington formant chacun 500 hommes, à Djibouti et en Ouganda.

Comment ont-il été enlevés ?

Les deux fonctionnaires logeaient à l’hotel Sahafi, situé à un carrefour très fréquenté de Mogadiscio (« kilomètre 4 »), où séjournent également des ministres et des responsables du gouvernement. Cet établissement est situé non loin de Somalia House, le siège du gouvernement de transition, dans un quartier en principe protégé par la force africaine Amison. Le kidnapping a eu lieu mardi matin et s’est déroulé rapidement. L’hypothèse la plus vraisemblable est qu’il ait été le fait de soldats ou de miliciens proches des autorités légales. Les deux otages ont ensuite été « revendus » à d’autres groupes comme cela se pratique couramment en Somalie.

Les deux Français se sont-ils fait passés pour des journalistes ? Ce n’est pas prouvé, même Reporters sans frontières le reconnaît. Le Quai d’Orsay conteste cette information, qui provient du directeur de l’hotel Sahafi. En langue somalie, Sahafi signifie « presse ».

L’enlèvement a-t-il un lien avec la piraterie? C’est peu probable, estiment les autorités françaises, sauf si des pirates tués ou capturés par les forces spéciales françaises ont des liens familiaux ou claniques avec les ravisseurs.

Négocier ou intervenir ? Même si les autorités françaises n’excluent a priori aucune solution, y compris une intervention de vive force, la priorité est aujourd’hui à la négociation avec les ravisseurs. Des contacts ont vraisemblablement été pris, via l’ambassade de France à Nairobi, mais semblent peu avancés.

Qui les détient ?

Deux groupes sont évoqués : les Shabab (« jeunes » en arabe), milice islamiste radicale et le parti Hizbul-al-Islam de Cheikh Dahir Aweys, ancien dirigeants des Trbinaux islamiques, qui ont régné en 2006 sur Mogadiscio. Ces groupes, liés à Al-Qaida, s’apparentent aux Talibans afghans. Ils agissent d’abord pour des raisons idéologiques et non mafieuses. Ce qui complique les négociations de libération. Mieux vaut en effet discuter avec un bandit avide de dollars qu’avec un fou de Dieu.

D’où l’inquiétude qui règne à Paris.

__________________________ 2 – RFI

Les Nations unies restent malgré tout

L’Onu ne partira pas du pays. Le secrétaire général adjoint aux Affaires humanitaires John Holmes l’a confirmé en indiquant que «l’Onu ne fera pas marche arrière». La question se posait après le pillage, lundi, de trois agences des Nations unies par les milices islamistes shebab à Baïdoa et Wajid, respectivement à 250 et à 150 kilomètres à l’ouest de la capitale Mogadiscio. Témoignage d’un jeune Somalien qui a quitté le groupe.

Les activités humanitaires de l’organisation sont donc suspendues dans ces deux villes mais temporairement, le temps de remplacer les équipements pillés par les milices shebab (« jeunes » en arabe) qui accusent les organisations internationales d’œuvrer « contre l’édification d’un Etat islamique en Somalie ».

Il faut savoir que ces milices extrémistes contrôlent une bonne partie du sud du pays ainsi que plusieurs quartiers de Mogadiscio, où des affrontements ont lieu quasiment tous les jours avec les troupes du gouvernement de transition. Les shebab recrutent parmi la population. Mais il y a aussi, selon plusieurs rapports d’experts, des centaines de combattants étrangers qui se battent à leurs côtés.

Un ancien milicien a décidé de s’échapper

Notre envoyée spéciale à Mogadiscio, Stéphanie Braquehais, a pu entrer en contact avec un ancien milicien qui, lui, a décidé de s’enfuir au péril de sa vie. Ce jeune homme, dont les lunettes finement cerclées de fer lui donnent une allure d’étudiant studieux, avait il y a encore quelques jours un AK47 entre les mains et se battait aux côtés des shebab dans les rues dévastées de Mogadiscio.

Il a posé des bombes télécommandées, tiré au mortier, écouté les sermons sur le jihad et les « ennemis d’Allah ». Un jour, un ami est venu lui dire qu’il était devenu suspect et que les shebab voulaient l’assassiner. Il a réussi à s’enfuir in extremis.

Un ancien milicien

« Je ne peux plus communiquer avec les shebab car j’ai peur qu’ils s’en prennent à ma famille ».

Il a rejoint les shebab en 2007, pour lutter contre l’armée éthiopienne. Il pensait défendre son pays. Mais il s’est de moins en moins reconnu dans le discours extrémiste des shebab.

Tout en parlant, il jette de temps à autre des regards inquiets vers la fenêtre, pour vérifier que personne ne l’écoute. Il vit désormais dans la crainte d’être démasqué.

A Mogadiscio, il est impossible d’être un jeune homme et de ne pas prendre parti pour l’un ou l’autre camp ; impossible d’être un homme et de ne pas prendre les armes.

__________________________ 1 – IJAMBO (Kenya) avec AFP

Somalie: l’UA « très inquiète » d’un retrait de l’Amisom

Le président de la Commission de l’Union africaine (UA) Jean Ping s’est dit « très inquiet » de l’éventualité d’un retrait des soldats de la force de paix africaine en Somalie (Amisom), et a espéré qu’il sera évité.

« Nous sommes vraiment très inquiets, mais nous espérons que quelque chose sera fait pour éviter » un retrait des 3.400 soldats Ougandais et Burundais de l’Amisom, a déclaré M. Ping lors d’un point de presse au siège de l’UA à Addis Abeba.

« Un retrait de Somalie est inacceptable pour l’UA, mais aussi pour le reste du monde », a-t-il estimé, évoquant les populations somaliennes qui souffrent de la guerre civile depuis 1991.

L’Ouganda et le Burundi envisagent leur retrait « mais j’espère sincèrement que cela n’arrivera pas », a-t-il ajouté.

Le Premier ministre éthiopien avait jeudi semé le trouble et ravivé le spectre d’un vide sécuritaire en Somalie en assurant que le Burundi et l’Ouganda voulaient retirer leurs hommes avant le départ des troupes éthiopiennes prévu début 2009, suscitant un vif démenti de Kampala.

A la surprise générale, Meles Zenawi, s’exprimant devant le Parlement éthiopien, avait affirmé que le Burundi et l’Ouganda, qui fournissent actuellement l’intégralité des 3.400 troupes de la mission de l’Union africaine (UA) en Somalie (Amisom), lui avaient fait part de leur intention de se désengager du pays avant le départ des troupes éthiopiennes.

L’Ouganda et le Burundi « nous ont déjà informé qu’ils souhaiteraient se retirer avant que nous le fassions, et nous attendons seulement que des bateaux et des avions arrivent en Somalie pour qu’ils puissent organiser leur retrait », avait-il déclaré.

L’armée éthiopienne, qui intervient officiellement depuis fin 2006 en Somalie voisine et a mis en déroute début 2007 les tribunaux islamiques qui contrôlaient depuis six mois la majeure partie du centre et du sud du pays, dont la capitale Mogadiscio, a annoncé son retrait total du pays d’ici début 2009.

Depuis la débâcle des islamistes, Mogadiscio et plusieurs régions du pays sont le théâtre d’attaques meurtrières quasi quotidiennes. Les insurgés, menés par la mouvance islamiste, mènent régulièrement des attentats meurtriers visant en particulier les forces somaliennes et éthiopiennes, l’Amisom et les représentants gouvernementaux.

« Nous ne reviendrons jamais sur notre décision, quoi que la communauté internationale dise ou fasse. Nous pouvons partir demain ou les jours d’après, mais notre position est d’assurer que les soldats de la paix de l’UA puissent se retirer en sécurité grâce à des moyens logistiques suffisants », avait renchéri M. Meles, en répondant à la question d’un parlementaire.

L’Ouganda, par la voie de son ministère des Affaires étrangères, avait catégoriquement et sèchement réfuté cette affirmation.

« C’est totalement faux et c’est contraire à tout ce que nous avons dit. Notre position a toujours été que, si l’Ethiopie se retire de Somalie, nous y augmenterons notre présence », avait réagi auprès de l’AFP le ministre adjoint ougandais des Affaires étrangères Okello Oryem.

« Je suis surpris par cette déclaration. L’Ouganda est prêt à envoyer un bataillon supplémentaire si nécessaire », a-t-il ajouté.