29/11/09 (B527) FreeDjibouti -> L’administration djiboutienne : UNE NAVIGATION A VUE

Par FreeDjibouti

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L’administration publique djiboutienne peut-elle se présenter comme un outil au développement du pays ? Le manque d’infrastructures et de personnel qualifié, la mauvaise gestion des biens et le comportement agressif des agents de commandement, etc. rendent inopérant le but recherché.

Au lendemain des indépendances africaines, les responsables politiques ont maintes fois affirmé la nécessité de mener des actions susceptibles d’élever le niveau de vie des populations et de conduire leurs pays vers un réel développement socio-économique. Les administrations apparaissent comme le moteur de cette philosophie. Mais sur le terrain, les choses se déroulent autrement. A Djibouti, les limites de l’administration sont nombreuses et l’empêchent de se moderniser pour jouer pleinement son rôle.

La première limite
de l’administration djiboutienne réside dans la mauvaise gestion des carrières des fonctionnaires. Normalement, lorsqu’un Djiboutien sort d’une grande école, d’une université ou d’un institut, il est d’abord intégré à la Fonction publique. Ensuite, il passe un stage et obtient sa titularisation.

Il gravit honnêtement les échelons tout en acquérant des expériences. Après, l’État peut lui confier une responsabilité. S’il fait normalement son travail, il reçoit de ses supérieurs une lettre de félicitations ou de citation. Cette dernière lui permet d’obtenir des distinctions honorifiques et des témoignages de satisfaction.

Il peut ainsi changer de catégorie. Mais, de nos jours, c’est le contraire qui se passe dans l’administration djiboutienne. Même si ces mérites sont reconnus, ils ne profitent pas à ceux qui travaillent véritablement. Les conséquences de ces diverses frustrations sont la démotivation, l’indolence, l’incompétence, la lenteur et la désertion. Aujourd’hui, la fonction publique est remplie d’agents démotivés qui ne produisent rien en contrepartie du salaire qu’ils perçoivent.

La deuxième limite
est la politisation à outrance de l’administration djiboutienne.

Actuellement, il est très difficile de sanctionner un fonctionnaire qui commet une faute professionnelle. Parfois, c’est celui qui devrait recevoir une sanction qui devient subitement le chef hiérarchique de celui qui prend la sanction. Cette situation décourage bon nombre de responsables administratifs qui adoptent un profil bas face aux pratiques nuisibles qui se développent dans l’administration.

La formule consacrée est “pas vu, pas pris”.

On ferme les yeux sur la corruption, la concussion et la gabegie. Un cas récent s’est produit dans une des grandes institutions du pays où le Directeur général a pris une décision pour muter un agent. Mais le ministre a décidé de remettre en cause la décision qui avait toute sa raison d’être. Peut-on réellement bien produire dans une telle ambiance ? La politisation occasionne le non-respect de la hiérarchie, la mauvaise circulation de l’information ou sa rétention. Cela encourage aussi l’indiscrétion. Un ancien ministre n’a-t-il pas déclaré que dans ce pays, les décisions prises en Conseil des ministres sont connues des Djiboutiens avant la fin de ce Conseil ?

La troisième limite
est l’absence de gestion prévisionnelle des ressources humaines. Le perfectionnement des administrateurs qui devrait être planifié n’a pas suffisamment fait l’objet de préoccupation des autorités. Hérité d’un système de type régalien, trop dirigiste, le système administratif djiboutienne est incapable de se muer en une administration de développement. Il n’existe pas de plans de formation, de recyclage et de perfectionnement. Comment les fonctionnaires djiboutiens peuvent-ils s’adapter réellement aux mutations et exigences technologiques de l’heure ? C’est de la navigation à vue. Dès que l’opportunité de formation ou de recyclage se présente, ce sont les mêmes qui en bénéficient comme si l’administration était devenue leur chasse gardée. D’autres qui se voient exclus du système recherchent et trouvent eux-mêmes des possibilités de recyclage. Alors que toute formation répond nécessairement aux besoins d’une institution. D’autres encore espèrent contourner cette difficulté en regardant vers les statuts particuliers.

Le semblant de démocratisation qui vient de souffler à Djibouti représente un facteur d’émergence de l’État de droit qui appelle une réflexion profonde sur les missions fondamentales de la Fonction publique. Il faudrait que les administrateurs vivent leur époque avec de nouvelles approches. Rien de tel à Djibouti où l’administration est affectée par l’archaïsme dans son ensemble. La gestion des ressources humaines ne se fait pas en fonction des besoins. Aujourd’hui, on assiste à une concentration des agents de l’administration dans la capitale pendant qu’on continue à engager des volontaires dans les circuits administratifs dans les régions de l’intérieur ? Personne n’est prêt “à aller moisir en province et travailler dans des conditions inimaginables”, entend-on souvent dire.

La quatrième limite
et non des moindres de l’administration djiboutienne est la question de la retraite des travailleurs. Beaucoup de fonctionnaires passent tout leur temps à cotiser pour espérer assurer une retraite paisible, mais ils se retrouvent dans le dénuement total en fin de carrière. L’État ne reconnaît pas les mérites de ses serviteurs. Même si on décide de payer les retraités, généralement, on paie ceux qui n’ont pas cotisé et on abandonne ceux qui l’ont fait. Cela engendre des frustrations et le découragement de bon nombre de fonctionnaires.

Ceux qui sont prudents embrassent d’autres carrières dans le privé.

L’hémorragie actuelle des cadres compétents de l’administration vers les secteurs privés et parapublics explique la crainte éprouvée par les agents quant à la finalité de leur carrière.

L’indigence matérielle à laquelle les agents de l’administration font face dans l’exercice de leur fonction constitue également la cinquième limite qui ronge le secteur public djiboutien. Pourtant, par le passé, l’administration octroyait des crédits aux fonctionnaires. Ce qui leur permettait de construire des logements.

Certains avaient bénéficié des locations-ventes.

Ils étaient épargnés de la misère dont souffrent leurs collègues. C’était une marque de reconnaissance qui fidélisait les agents. Comme on le sait, l’administration djiboutienne est trop limitée pour pouvoir se moderniser et réaliser le bien-être des citoyens.

Il appartient aux autorités et à leurs partenaires nationaux et internationaux de se pencher au chevet de cette institution sans laquelle le pays prendra un sérieux coup dans son semblant de marche vers le progrès.

FreeDjibouti

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