23/12/09 (B530) Nouvelles de Somalie (2 articles)

_____________________________ 2 – Afrique en Ligne

Le Kenya ordonne le renforcement du contrôle des réfugiés somaliens

Le gouvernement kenyan a appelé au contrôle strict et au suivi de tous les réfugiés entrant sur son territoire et qui fuient la guerre en Somalie, en vue d’empêcher des insurgés d’acquérir un statut officiel de réfugié dans ce pays d’Afrique de l’Est, a rapporté lundi l’Agence kenyane d’informations (KNA).

Le ministre kenyan des Affaires étrangères, Moses Wetangula, a affirmé que le gouvernement continuerait à contrôler les étrangers à la recherche d’un statut de réfugié pour limiter le risque de voir les insurgés somaliens disposer de la reconnaissance officielle de réfugié, a précisé l’agence de presse kenyane.

"Nous ne pouvons pas oublier l’attentat à la bombe à Nairobi en 1998 et celui de Kikambala qui ont été perpétrés par des groupes terroristes. Tous les Kenyans doivent dénoncer les étrangers douteux", a affirmé le ministre des Affaires étrangères qui était en visite dans la ville de Kitui, située dans l’Est du pays.

Le Kenya a fermé ses frontières avec la Somalie en 2006 à la suite d’une offensive militaire éthiopienne destinée à débusquer des terroristes basés en Somalie.

La frontière a été ouverte partiellement pour permettre à des vols aériens en provenance de Mogadiscio et d’autres parties de la Somalie de passer par le Kenya.

Les organisations internationales de défense des droits humains ont condamné l’attitude du gouvernement kenyan qui consistait à fermer la frontière aux Somaliens qui fuient les combats dans leur pays.

M. Wetangula a affirmé que bien que le Kenya soit signataire des accords de l’ONU, ces accords ne devraient pas être considérés comme des chèques en blanc pour permettre à ceux qui fuient la Somalie d’infiltrer le Kenya.

Les autorités kenyanes ont arrêté plus de 80 Somaliens fuyant vers le Kenya au cours du mois précédent, selon des ONG de défense des droits de l’Homme.

Renforçant la position du gouvernement vis-à-vis des Somaliens, le ministre kenyan de la Sécurité intérieure, George Saitoti, a demandé aux responsables provinciaux de sécurité de contrôler strictement la frontière avec la Somalie durant les prochaines fêtes de fin d’année.

Il a affirmé que les responsables de la sécurité devaient s’assurer qu’il n’y ait pas de mouvement vers ou à partir de la Somalie, "car pendant que certains combattants se déguisent en réfugiés pour se rendre au Kenya, des Kenyans d’origine somalienne risquent de rejoindre les insurgés".

_____________________________ 1 – AFP

Somalie: les humanitaires sous la pression des shebab

De Hervé BAR

Sous l’influence croissante de jihadistes étrangers, les insurgés radicaux shebab se font de plus en plus menaçants sur les rares organisations humanitaires internationales opérant encore en zone islamiste, dans le centre et le sud de la Somalie.

En fin de semaine, les shebab se sont emparés des locaux à Baïdoa d’une agence de l’ONU spécialisée dans le déminage (UNMAS), après en avoir interdit les activités au motif qu’elle aurait notamment "incité (…) à la rébellion contre l’administration islamique".

L’incident est le dernier épisode d’une campagne implacable des shebab contre les organisations humanitaires étrangères qui tentent de venir en aide aux populations dans les territoires qu’ils contrôlent.

Ces ONG et agences de l’ONU sont la cible d’un harcèlement quotidien et permanent, sur des motifs les plus divers et souvent motivés par l’argent.

Mais début novembre, les insurgés ont annoncé la mise en oeuvre imminente dans la région de Bay et Bakool (200 km au nord-ouest de Mogadiscio) d’une nouvelle réglementation leur imposant "onze conditions" drastiques. Ils exigent ainsi que les humanitaires cessent d’"interférer avec la religion islamique", qu’ils licencient leurs personnels féminins et, plus prosaïquement, qu’ils paient tous les six mois une taxe de 20.000 dollars.

En juillet, les shebab avaient déjà interdit à trois organismes des Nations unies (PNUD, UNPOS et UNDSS), qualifiés d’"ennemis de l’islam", de travailler en Somalie et leurs locaux avaient été pillés.

Les "onze conditions", qui ne sont pas sans rappeler la législation ultra-répressive imposée aux ONG sous le régime des talibans à Kaboul (1996-2001), ne s’appliquent pour l’instant qu’à Bay et Bakool.

Réputé pour son extrémisme et ses appels aux meurtres contre les "infidèles" et leurs supposés "espions", le gouverneur shebab de la région, cheikh Mahad Omar Abdikarim, en est le principal maître d’oeuvre. Le gouverneur Mahad "est actuellement la personne clé dans ce dossier", confirme à l’AFP une source onusienne. Des négociations se poursuivent avec les notables locaux et leaders communautaires, qui sont opposés à la mise en oeuvre de telles mesures.

Un moment le principal interlocuteur des organisations étrangères, cheikh Mukhtar Robow, figure historique de la hiérarchie shebab, "n’est pas impliqué dans ces négociations", explique la même source. "Il a clairement déclaré que la décision d’imposer les onze conditions relevait du gouverneur et qu’il n’interviendrait qu’en cas d’échec des discussions".

C’est le signe que cheikh Robow, dit "Abu Mansour", pourtant un vétéran de l’Afghanistan et l’un des visages les plus connus des shebab, "a perdu de son influence au profit des éléments les plus radicaux".

Toujours selon la source onusienne, "la situation dans Bay et Bakool doit être analysée à la lumière de la stratégie générale des shebab, désormais largement influencée par les jihadistes étrangers" d’al-Qaïda.

Le gouverneur Mahad est un fervent partisan de ces volontaires internationaux, qu’il appelle régulièrement à venir faire le jihad (guerre sainte) en Somalie.

Avec la multiplication des attentats suicide, la campagne contre les humanitaires est une nouvelle illustration de l’influence grandissante des jihadistes étrangers au sein des shebab.

Elle se déroule alors que des rumeurs persistantes, non confirmées à ce jour, font état de l’arrivée à la tête de la milice islamiste du Comorien Fazul Abdullah, leader supposé d’al-Qaïda dans la Corne de l’Afrique, en remplacement de "l’émir" somalien Ahmed Abdi Godane, dit cheikh Mukhtar "Abu Zubaïr".