01/10/10 (B572) LA MAISON EN VERRE ET LA MAISON EN DUR (Par Cassim Ahmed Dini)

Sous le numéro (B571) l’ARDHD a publié le 28 dernier le courrier d’un lecteur évoquant une réunion entre opposants qui se serait tenue à Paris. (*)

Médisez, médisez, il en restera toujours quelque chose : ce texte m’ayant été indûment attribué par tel ou tel ectoplasme politique s’essoufflant à dénigrer urbi et orbi depuis près de deux ans (les oreilles agressées ou complaisantes savent de quoi je parle), je me dois de préciser deux ou trois points.

Préalable prophylaxique : n’étant plus délégué plénipotentiaire de l’ARD, les lignes qui suivent n’engagent que moi.

Il ne m’appartient pas de confirmer ou d’infirmer la tenue d’une telle réunion de l’opposition, mais je tiens à relever dans ledit courrier de lecteur deux contrevérités qui semblent procéder d’une sournoise intention de semer la zizanie.

1) Présenter Abdourahman Boreh comme « l’ancien homme de paille et d’affaires d’IOG » est mesquin et inexact : ancien peut-être, homme de paille certainement pas. Même dans un système démocratique et de libre concurrence, Boreh aurait réussi et, pour preuve, son implantation à Dubaï. Que l’opposition travaille avec lui montre son importance pour elle. Et tout le monde sait que, dans une dictature comme celle d’IOG, aucun opposant n’a réussi en affaires. Ni en politique d’ailleurs…

2) Evoquer, même au conditionnel, l’intention d’Ismael Guedi Hared, de se présenter à la prochaine élection présidentielle est une deuxième contrevérité. Telle qu’il l’a présentée dans le cadre de l’UAD, sa position est claire : si participation électorale il y aura, elle fera l’objet d’un débat au sein de cette coalition à l’examen des conditions de transparence exigées par elle depuis 2003.

Pour mettre en perspective tous les sous-entendus de ce courrier de lecteur, il ne faut pas oublier que c’est LOI qui, dans son édition du 25 septembre, fait état d’une telle réunion de l’opposition autour d’Abdourahman Boreh à Paris.

Si la réunion a véritablement eu lieu, il s’agirait alors d’une indiscrétion qui n’arrange pas tous les participants présumés au même titre et qui augure mal d’une future entente entre eux.

Mais on croit deviner d’où vient la fuite car LOI semble avoir au moins visité la conscience (l’inconscience ?) d’un des participants présumés.

Lequel, partisan de la lutte armée, mettrait « comme condition à sa participation à une telle alliance la rédaction d’une plateforme politique commune ne se limitant pas à la demande de transparence électorale. »

Certes, il est normal de se retrouver entre compatriotes pour discuter des problèmes du pays et des moyens de les résoudre. Il y a d’ailleurs un célèbre précédent : un ministre en exercice du gouvernement Gouled se rendant à Addis-Abéba s’entretenir avec le dirigeant du FRUD.

Il y a perdu son poste, mais n’a pas été emprisonné pour cela.

Par contre, dire que l’opposition pacifique prépare un plan d’action avec un mouvement armé est à la fois bête et méchant.

D’une part parce que ce serait à coup sûr condamner son parti à l’illégalité et à la dissolution, ce à quoi aucun responsable politique digne de ce nom ne se risquerait, sous peine de devenir le François Bayrou de Djibouti conduisant son mouvement à la perte pour cause de mésalliance stérile.

D’autre part, pour légitimes que soient les réticences quant à la pertinence de l’option pacifique face à ce genre de régime (aucune dictature de ce type n’a jusqu’à présent été vaincue sans recours aux armes), exhiber une quelconque alliance entre ces deux options, ne renforcerait en rien la lutte armée. Ce serait tout juste un coup de projecteur éphémère sur une prétendue direction exilée et dont l’action se réduit à l’infraction : sans aucune légitimité procédant des vrais combattants sur le terrain, l’illusionniste finit par être publiquement démasqué et démystifié. Ce qui ne saurait tarder.

En attendant, la médisance croit pitoyablement cacher l’impuissance.

Il ne s’est pas agi pour moi ici d’y répondre : un autre point de vue se semblait utile au lecteur soucieux de confronter différentes versions.

Enfin, Li Wadjhillah, à méditer ce conseil de Mengistu : « celui qui habite une maison en verre ne doit pas jeter des pierres contre celle d’autrui construite en dur ».

Cassim Ahmed Dini
Ancien délégué de l’ARD

(*) Afin d’éviter toute mauvaise interprétation, je signale qu’en écrivant cela, il n’est nullement dans mes intentions de reprocher à l’ARDHD d’avoir publié ce courrier des lecteurs (car l’équipe a raison de permettre à chacun de s’exprimer librement dans ses colonnes) mais je réagis simplement par rapport au contenu proposé par ce lecteur.