17/12/10 (B582) DECLARATION COMMUNE D’UDT ET DE LA LDDH relative à la situation alarmante des dockers du port international de la République de Djibouti.

Depuis quelques années les dockers djiboutiens, qui sont au nombre de 3800, dépendent du Bureau de la main d’oeuvre (BMO) des dockers du port de Djibouti. Ils sont confrontés, de plus en plus, à des dénis de droit systématiques et flagrants tant sur le plan professionnel que pour celui des garanties sociales.

Leurs niveaux de vie, d’existence et de dignité humaine se dégradent inexorablement au fil de temps. Désormais, ils sont classés comme des citoyens de second rang, voire comme des parias.

Pour le quasi majorité d’entre eux, Ils sont privés du droit au travail ou sinon, ils doivent accepter d’être exploités comme des bêtes de somme qui ne peuvent prétendre à aucune couverture sociale ni à aucune contrepartie salariale.

Comme ils doivent travailler à l’heure ou à la tache, en tant que travailleur journalier, le tour d’embauche censé les faire travailler à tour de rôle, n’est pas respecté. Seul un petit groupe, favorisé par le BMO, est embauché systèmatiquement afin de bénéficier de la couverture de la sécurité sociale.

La grande majorité d’entre eux ne voit plus jamais arriver leur tour, qui est atgtribué dans les faits à une minorité de favorisés.

Dans l’année, certains ne travaillent qu’une ou deux fois par semaine ou même par mois. Parfois ils sont contraints au chomage durant une année, sans aucune explication ni recours possible.

Ce qui les plonge dans l’indigence forcée et les expose, avec leurs familles, à la famine et à la misère.

De ce fait c’est une population de plus de vingt mille individus (les dockers et leurs familles) qui se retrouvent "de facto" sans aucune ressource et contraints à la pauvreté la plus absolue, à la maladie, ainsi qu’à l’impossibilité d’accèder aux soins.

Par voie de conséquence, combien de morts chaque année parmi ces travailleurs fragilisés par manque de soins et par non assistance à personne en danger ?

Cela étant, plus de 96% des dockers n’ont droit à aucune protection sociale et encore moins à la retraite.

Depuis plusieurs décennies que la corporation des dockers existent et jusqu’à présent, aucun d’entre eux n’a bénéficié d’une retraite. Pourtant lorsqu’ ils travaillent à l’heure ou à la tache, les compagnies, qui les emploient retiennent systématiquement sur leurs bulletins de salaire journaliers, les cotisations sociales qui sont versés à l’OPS (Office pour la protection sociale) (Maladie et retraite).

Selon un contrôle officiel effectué il y a quelques années, l’OPS recevait des cotisations mensuelles évaluées de dix à vingt millions de la part des dockers sans que ces derniers ne reçoivent aucune contrepartie en retour, c’est-à-dire ni soin et prise en charge des frais d’hospitalisation même en cas d’accident du travail, ni retraite.

En outre, selon de source fiable, en termes de pourcentage, la part de cotisation prélevée sur les salaisres des dockers était supérieure à celles des autres secteurs économiques du pays.

Et pourtant, en cas d’accident de travail ou de maladie, ces lésés en droit, ne reçoivent de la part de leurs employeurs ni bulletins de prise en charge (parce qu’en réalité ils n’ont pas été déclarés à l’OPS), ni indemnités pour assurer un minimum vitale de revenus aux familles.

Parfois, ils se rendent à l’hôpital, en sacrifiant leurs petites économies. Les arrêts de maladie prescrits par le médecin compétant en la matière, ne sont pas pris en compte par l’employeur.

Pire encore, en cas de vacance du poste (en générale parce que la personne malade est dans l’incapacité de travailler), le Bureau main d’œuvre (BMO) du port de Djibouti embauche une autre personne inconnue, à la place de la personne titulaire et sous son nom (!). Par conséquent ils ne peuvent prétendre à aucune indemnité ni pour les journées de repos ni pour les jours de maladie.

En ce qui concerne les dockers, à l’heure actuelle, aucun barème officiel de tarif horaire à la tache n’existe, qui pourrait leur permettre de prétendre à une rémunération reconnue.

Les compagnies les paient selon leurs bons vouloirs, sans aucun minimum garanti officiellement.

Il existait un barème tarifaire qui datait de 1968, mais il n’est pas applicable actuellement.

Les pouvoirs publics, en dépit des revendications des dockers et de leurs syndicats n’ont jamais voulu le réviser pour l’actualiser, comme c’est le cas aussi pour la grille des conventions collectives des secteurs publics et parapublics qui n’ont pas été également révisés depuis 1976.

Il faut noter également que certaines zones d’activités portuaires sont interdites aux dockers. Dans ces zones seule une équipe employée par les dirigeants du BMO peut intervenir : ce sont les zones dites « chasse gardée du BMO ». Il s’agit des secteurs du FRISOM (zone franche), de la SDTV dont le propriétaire est AL AMOUDI…

D’autre part, pour que les dockers ne puissent rien revendiquer légalement, leurs organisations syndicales, après avoirs été malmenées durant plus d’une décennie sont réprimées systématiquement et officiellement mise en quarantaine.

Toutes les tentative d’organiser un congrès ou une assemblée générale afin de renouveler les instances de leurs syndicats ont été violement réprimées.

Quatre ou cinq individus issus de dockers, mais qui n’ont aucune légitimité à être leurs représentants légaux sont systématiquement instrumentalisés par les pouvoirs publics pour servir "d’alibis" syndicaux.

Leurs taches consistent à diviser les dockers et à prévenir toute tentative de restructuration et de régularisation de la liberté syndicale, en renouvelant la direction conformément aux dispositions statuaires.

Durant ces cinq dernières années, plusieurs tentatives d’organiser des élections syndicales ont été entravées par les forces de l’ordre. Ils ont été plusieurs fois intimidés, violentés et parfois incarcérés violement dans le centre de détention de Nagad.

Durant des années, ne serait ce que pour l’année 2010, ces derniers ont été souvent brutalisés et emprisonnés par centaines et parfois leurs domiciles ont été incendiés.

Ces types de situation se sont répétés à maintes reprises.

Ni les pouvoirs publics djiboutiens, ni les autorités portuaires de DP World qui assurent la gestion du port et dont ils sont censés être employés sous leur tutelle, au mieux ne se soucient guère de leur sort et au pire ils contribuent activement à agraver leur calvaire au quotidien.

Par mesure de rétorsion, le BMOD retire et confisque par la force les cartes de certains dockers qu’il soupçonne d’être des meneurs ou parce qu’ils revendiquent tout haut leurs droits bafoués, leur interdisant nominativement l’accès au port.

Ainsi un nombre important de dockers se sont retrouvés au fil des ans, radiés de la profession de manière abusive et arbitraire et des dizaines se retrouvent chaque année, victimes de ces procédés barbares.

Etant devenus des citoyens de second zone, marginalisés et oppressés dans leurs propre pays, le cas des dockers est aujourd’hui un drame national auquel il faut apporter de toute urgence des solutions viables et durables.

Dans son rapport, la mission d’enquête internationale de la Fédération internationale des Ligues des Droits de l’Homme (FIDH), conduite en 2006, avait soulevé la situation inhumaine des Dockers.

Par conséquent les dockers lancent un SOS. Les mouvements syndicaux djiboutiens, ainsi que la Ligue Djiboutienne des Droits Humains (LDDH) lance nt un appel pressant à l’opinion nationale et internationale pour remédier à cette inqualifiable calvaire et aux exploitations intolérables des dockers djiboutiens

Cet appel pressant est envoyé à la CSI, à la FIDH, à l’OIT et au BIT pour qu’ils dénoncent les faits et fassent pression sur le régime djiboutien qui ne respecte jamais les Conventions internationales qu’il a pourtant signées et ratifiées.

MOHAMED ADAN ABDOU
Secrétaire Général de l’UDT

NOEL ABDI Jean-Paul
Président de la LDDH