07/01/11 (B585) Somaliland: le pays qui n’existe pas ! (Métro – Canada / Montréal)

Tandis que la Somalie s’enfonce dans le chaos, la région sécessionniste du Somaliland s’enorgueillit de sa stabilité et de son régime démocratique. Son président explique à Métro en quoi ce pays, même s’il n’est pas reconnu, est important sur le plan international.

Ahmed Mohamed Silanyo dirige un «pays» aux mœurs démocratiques, où l’on trouve des commerces, une police et même l’internet. Il est le président du Somaliland, région qui a proclamé son indépendance de la Somalie en 1991. Aucun pays, toutefois, ne reconnaît le Somaliland. Silanyo, chef du Parti kulmiye et ancien ministre des Finances, a été élu président plus tôt cette année.

Il a fait de la reconnaissance internationale de son pays son cheval de bataille et voyage partout dans le monde à cette fin. Récemment, il a récolté les premiers fruits de son labeur quand les États-Unis ont annoncé l’augmentation de leur aide au Somaliland. Métro s’est entretenu avec Silanyo, ainsi qu’avec le ministre des Affaires étrangères de Somaliland, Mohamed Abdullahi Omar, et le ministre de la Planification, le Dr Sa’ad Ali Shire.

Pourquoi la communauté internationale devrait-elle reconnaître le Somaliland?

Silanyo :
Notre pays est démocratique, vit en paix et coopère avec la communauté internationale. Il est un rempart contre les dangers qui viennent de la Somalie, lesquels menacent aussi le reste du monde. Même si nous ne sommes pas reconnus, des pays comme les États-Unis commencent à avoir des relations avec nous. La sécession, reconnue internationalement, du Sud-Soudan nous conforte par ailleurs dans notre position.

Quand recevrez-vous cette reconnaissance, selon vous?

Omar : Je ne sais pas, mais la communauté internationale a compris que nous étions un bon partenaire dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et la piraterie.

Le chaos qui règne en Somalie et la piraterie jouent-ils en votre faveur?
Omar : Nous aidons à combattre ces deux maux, ce dont la communauté internationale devra se souvenir quand nous demanderons d’être reconnus. Une fois cette reconnaissance obtenue, nous serons en mesure d’en faire encore plus. Ce qu’accomplit le Somaliland en luttant contre la piraterie et le terrorisme est utile à notre population, mais aussi au reste du monde.

Quelle incidence la piraterie et le chaos en Somalie ont-ils sur le Somaliland?
Silanyo : Le risque que la violence gagne notre pays est toujours présent. Nous ne pouvons pas changer la situation en Somalie, mais la communauté internationale nous aide à tenir le danger à distance, et ce, parce qu’il s’agit d’une guerre entre l’extrémisme et la communauté internationale.

Vous aide-t-elle en vous donnant de l’argent ou des armes?
Silanyo : Elle collabore avec nos forces de sécurité sur le plan du renseignement. Dans ce type de guerre, l’information est cruciale.

Quels défis faut-il relever quand on gouverne un pays qui, officiellement, n’existe pas?
Shire : L’un d’eux est de poursuivre le développement. Les pays reconnus obtiennent de l’argent par l’intermédiaire de programmes d’aide et auprès de la Banque mondiale et du FMI, ou grâce à des investissements étrangers. N’étant pas reconnus, nous ne pouvons profiter de ces mesures. On nous répond : «Désolés, mais la seule façon dont nous pouvons vous aider est par l’entremise d’ONG.» Les investisseurs sont en outre peu enclins à investir dans un pays qui n’est pas reconnu.

On confond souvent Somaliland et Somalie. Avez-vous songé à changer de nom?
Silanyo : Cela fait l’objet de discussions, mais c’est notre nom depuis 1888. Nous sommes un vieux pays.

Monsieur le président, avec quel passeport voyagez-vous?
Silanyo : Je dispose de documents de voyage somalilandais, mais le ministre des Affaires étrangères et le ministre de la Planification ont des passeports britanniques.