03/02/11 (B589) Que ce soit au niveau du sport et de la vie courante, pour gagner de manière durable … (Par Bouh Warsama)


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Que ce soit au niveau du sport et de la vie courante, pour gagner de manière durable, il faut faire confiance à l’humain et l’accompagner dans sa manière de se découvrir et de se transcender ; plutôt que d’utiliser « le bâton » à longueur de journée.



Bouh Warsama

Avec un quatrième titre mondial, agrémenté d’une qualification pour les prochains jeux olympiques qui se dérouleront à Londres l’an prochain obtenant, en prime, un « ticket d’entrée prioritaire » pour une participation au Mondial 2013 en Espagne, constat est fait que l’équipe de France de hand-ball vient de toucher de manière magistrale le « gros lot » en matière de réussite sportive en battant celle du Danemark, dimanche en finale du dernier Mondial.

Mais ceci ne s’est pas fait tout seul.

C’est un long chemin qu’a parcouru cette équipe et les deux entraineurs qui se sont succédés à sa tête avant d’en arriver là avec au départ, et il y a bien des années de cela, un « boss » devenu depuis légendaire ; je veux parler de Daniel Costantini.

Quand Claude Onesta a repris en main l’équipe de France, aucun entraîneur n’en voulait tant la tâche de succéder à Costantini paraissait insurmontable.
Devenir entraîneur de cette équipe à cette époque là n’avait rien d’un cadeau pour Claude Onesta, loin s’en faut et la sixième place obtenue à sa première compétition à l’Euro 2002 en Suède n’allait en rien arranger les choses.

Il est vrai que Costantini, ancien entraineur du Stade Marseillais Université Club (SMUC) de 1973 jusqu’en 1985, avait quitté la place auréolé de gloire avec derrière lui un palmarès éloquent et 16 années « d’excellents et loyaux services ».

Lorsqu’il prend en charge l’équipe de France de handball masculin en 1985, celle-ci est classée au19eme rang mondial.

Ce qui coûtait le plus cher dans le hand-ball français de l’époque, c’étaient les erreurs cumulées avec une forme de fatalisme entretenu qui n’arrangeait rien, du genre : « Les Allemands sont bien plus forts que nous..les Espagnols aussi…de même que les Russes et les Suédois …etc ».

Les budgets sont faibles, les moyens presque miséreux, les installations obsolètes pour un niveau mondial ! Nîmes Champion de France en 1985 a tout à envier ne serait-ce qu’à l’Atlético de Madrid, finaliste de la prestigieuse Ligue des Champions.

C’est en prenant son travail à bras le corps et en changeant radicalement les mauvaises habitudes instaurées et entretenues au sein d’une Fédération française de hand-ball archaïque, que Daniel Costantini se fera bien des ennemis à cette époque.

Notamment parmi les vieux caciques du « pouvoir si peu handballistique », adeptes du doux ronronnement protégeant outrancièrement leur siège à la FFHB par un immobilisme de « mauvais aloi » et qui ne risquent pas de faire « péter les coutures » de leu fauteuil par une trop grande agitation ; tout en abusant et en protégeant à outrance leurs privilèges surannés.

La meilleure réponse qu’il peut leur opposer est de faire taire « les corbeaux » en conduisant d’abord l’équipe de France à l’obtention d’une médaille de bronze aux Jeux olympiques d’été de 1992.

Ce qui sera chose faite.

Puis à une première consécration mondiale aux Championnats du monde de hand-ball masculin de 1995 en Islande avec une équipe de joueurs à forte personnalité, que la presse sportive nationale puis internationale va presqu’aussitôt surnommer les Barjots.

Des Barjots qui ont appris le goût de l’effort, savent souffrir ensemble sur un terrain comme dans la vie et peuvent tout gagner ; des hommes qui vont très vite conquérir le cœur des Français et surtout celui de tous les amoureux du hand-ball et du bon jeu offensif dans les pays francophones.

Des joueurs d’exception tels que Frédéric Volle, Philippe Gardent, Denis Lathoud , Stéphane Stoecklin avec de plus un magicien du hand-ball, venu de l’île de la Réunion.

Un Jackson Richardson, un éclair d’Outre mer qui sème la panique dans les rangs de l’équipe adverse réduite aux pires expédients pour tenter de l’arrêter ; souvent sans succès. Un surdoué capable de ramasser des coups sans broncher pour faire basculer le résultat d’un match, à lui seul et en quelques dixièmes de seconde, tant son talent est grand.

Après quelques déceptions comme les Jeux olympiques d’été de 1996 et ceux de l’année 2000 Daniel Costantini reconduit, pour sa dernière compétition, l’équipe de France à la médaille d’or lors des Championnats du monde 2001 en France avec des joueurs tels que l’éternel Jackson Richardson, son capitaine, et Grégory Anquetil.

Puis il cède le flambeau à Claude Onesta.

-Claude Onesta, un patron participatif.

Lorsque l’on observe aujourd’hui son calme et la sérénité absolue dont il fait preuve en toute circonstance et avec laquelle il « manage » l’équipe de France de hand-ball, on a peine à se remémorer ce que furent les neuf années de parcours difficile de cet ancien professeur de gymnastique à l’accent méridional et au caractère bien trempé.

Ancien joueur de l’équipe de Toulouse de 1968 à 1987, le nouveau « boss » de l’équipe de France masculine qui succède à Costantini en 2002 va s’efforcer de s’installer dans le calme tout en prenant conscience de la grande difficulté de succéder à un entraineur auréolé de deux titres de Champion du Monde.

A cette époque, on va exiger d’Onesta qu’il fasse au moins aussi bien que son prédécesseur, oubliant que l’équipe de France est arrivée au sommet de son art et que, face aux autres grandes équipes de l’époque qui lui couraient après …, sa position étant instable elle risque que redescendre momentanément d’une voire de plusieurs marches dans la hiérarchie sportive mondiale.

Sous la conduite de Claude Onesta, l’équipe de France obtient deux nouvelles médailles mondiales avec le bronze de 2003 et en 2005 en Tunisie pour les adieux de Jackson Richardson à l’équipe nationale.

Durant ce Championnat du Monde 2005 en Tunisie, l’entraîneur français est à deux doigts d’être limogé après le très mauvais départ de la sélection française.

Dans une partie à quitte ou double le 29 janvier 2005 l’équipe se « sort les tripes » et s’impose face au Danemark (32-26) tout en sauvant la tête du « boss » avant de décrocher la troisième place de ce Championnat du Monde.

Le boulet de la déroute ayant soufflé très prêt, ceci aura le mérite de faire réfléchir véritablement « équipe et entraineur ».

Un an plus tard, lors du Championnat d’Europe 2006, Claude Onesta marque enfin de son empreinte indélébile le handball français en parvenant à réaliser un objectif qu’aucun de ses prédécesseurs n’avait rempli.
Il remporte une médaille dans un Championnat d’Europe, compétition réputée pour être la plus difficile tant la concurrence est grande.

Observons que le hand-ball est un sport dont les plus grandes nations au monde sont, à cette époque, toutes européennes.

L’objectif sera rempli de la plus belle des façons avec le titre de Champion d’Europe, en battant en finale les Champions du monde en titre l’Espagne, après avoir éliminé en demi-finale les Champions olympiques Croates.

Pour le Championnat d’Europe 2008 qui va suivre et se déroule en Norvège, Claude Onesta doit faire face aux forfaits de Michaël Guigou et Joël Abati et la préparation perturbée de Bertrand Gille en raison d’une blessure à l’épaule.

L’équipe de France va se transcender en remportant les trois matchs de son premier tour, puis elle battra l’Espagne et l’Allemagne lors du tour principal, ce qui lui assure alors une place en demi-finale.

Celle-ci l’oppose à la Croatie menée par Ivano Balić et Petar Metličić, deux joueurs d’exception parmi les plus grandes figures handballistiques mondiales.

Tout aurait pu basculer du côté français qui perd finalement le match par un but d’écart mais l’équipe de france bat l’Allemagne lors de la petite finale pour repartir avec la médaille de bronze.

Claude Onesta mène ensuite pour la première fois de son histoire l’équipe de France au titre olympique, en août 2008 à Pékin.

L’équipe de France est première de son groupe, elle rencontre la Russie lors du premier tour, s’imposant sur le score de 27 à 24.

En demi-finale, elle retrouve une nouvelle fois la Croatie.

Les Français prennent leur revanche sur le Championnat d’Europe perdu en demi-finale deux ans plus tôt, remportant la rencontre sur le score de 25 à 23.

En finale, la France impose sa défense aux Islandais et remporte le premier titre olympique de son histoire sur le score de 28 à 23.

En 2009, alors que les « spécialistes » pensent que la Croatie va logiquement rester maître chez elle devant un public totalement « déchaîné » et voué à sa cause, Claude Onesta mène l’équipe de France au titre de Champion du monde, en remportant la finale face aux Croates.

L’équipe de France entre ainsi dans le cercle fermé des équipes ayant réalisé le doublé « titre olympique-titre mondial » ; après l’Allemagne (1936-1938), la Yougoslavie (1984-1986) et la CEI-Russie (1992-1993).

Le 31 janvier 2010, l’équipe de France réalise un triplé inédit et historique: consécutivement, titre olympique – Champion du monde – Champion d’Europe en battant en finale du Championnat d’Europe, disputé en Autriche, la Croatie sur le score de 25 à 21.

Avec ce titre, Claude Onesta devient le premier entraîneur national français à avoir obtenu les 3 titres majeurs : Championnat d’Europe, Championnat du Monde et Jeux Olympiques.

Il est aussi le deuxième à l’avoir réalisé en hand-ball après l’entraîneur russe Vladimir Maximov .

Durant cette compétition, débutée de manière un peu laborieuse pour les grands favoris que sont les Français – deux matchs nul lors du premier tour contre la Hongrie puis contre l’Espagne -, Claude Onesta va surprendre quelque peu les observateurs et les entraîneurs adverses.

En effet, il fait débuter les rencontres sans aligner Daniel Narcisse, le poste d’arrière gauche étant occupé par le capitaine Jérôme Fernandez et le poste d’arrière droit par un véritable gaucher Sébastien Bosquet.

Cette tactique a pour conséquence de pouvoir ménager quelque peu les joueurs habituels de la base arrière, l’équipe de France profitant alors de la seconde période pour faire la décision.

Bien que diminuée par l’absence de quatre titulaires sur blessure, dont Narcisse, le 30 janvier 2011, Claude Onesta amène l’équipe de France de hand-ball en finale du Championnat du monde.

Elle remporte la compétition en battant une grande équipe du Danemark 37-35 après la prolongation.

-Comment sont-ils parvenus à de tels résultats ?

Après l’échec aux Jeux Olympiques d’Athènes en 2004 – l’équipe de France terminant à la cinquième place – Claude Onesta et son équipe étaient au bord du gouffre.

Comme nous l’avons écrit, ci-dessus, l’année suivante ils obtinrent un sursis salvateur en ramenant une médaille de bronze au Championnat du Monde en Tunisie.

C’est à cette époque que le « boss » va décider après concertation de laisser la clé aux joueurs en les responsabilisant de manière différente, basculant ainsi dans une forme de régime de participation active de chacun et d’autogestion qui va très vite porter ses fruits.

Le véritable déclic viendra en 2006 en Suisse où l’équipe de France va s’offrir le titre le plus difficile et de son histoire, celui de Champion d’Europe.

C’était alors la consécration d’une génération de joueurs exceptionnels marquée par l’émergence d’un Nikola Karabatic surdoué et qui n’a que 26 ans. Le jeune joueur français, d’origine serbo-croate, considéré comme le meilleur joueur du monde de par sa puissance physique, son habileté technique et surtout son intelligence tactique sans oublier le meilleur gardien au monde, l’alsacien Thierry Omeyer.

Une équipe nationale constituée majoritairement de jeunes qui n’ont rien à envier à leurs aînés et fonctionnant selon l’idée basée sur le partage des responsabilités et la participation de tous.

A partir d’un tel mode de fonctionnement inédit s’est installée une sorte de république des joueurs, sans distinction de couleur, d’appartenance ethnique et présidée un « boss » éclairé qui sait leur témoigner sa confiance.

L’aura de Claude Onesta grandit depuis ce jour.
Leçon à méditer.

Que ce soit au niveau du sport et de la vie courante, pour gagner de manière durable, il faut faire confiance à l’humain et l’accompagner dans sa manière de se découvrir et de se transcender ; plutôt que d’utiliser « le bâton » voire même la terreur à longueur de journée.

Suivez mon regard…