09/03/11 (B594) Communiqué de Monsieur Ali Abdillahi Iftin. Ministre d’Etat, chargé de la Défense nationale au sein du Gouvernement en Exil de Djibouti

« Djibouti ne saurait changer de face sans qu’il y ait douleur et sang versé par la seule volonté de la tyrannie imposée par Monsieur Ismaïl Omar Guelleh »
Tant sur le plan national qu’au niveau de la représentativité des diplomaties occidentales, avec qui nous avons de fréquentes réunions sur l’évolution de la situation dans notre pays, constat est fait que l’anarchie sévit dans l’appareil d’Etat djiboutien actuel.

Un simulacre d’appareil d’Etat totalement à la dérive, dirigé conjointement par Ismaïl Omar Guelleh et Kadra Mahamoud Haïd, où la confusion est partout et la responsabilité nulle part.

Cette désinvolture reconnue a comme indubitable conséquence d’encourager le charlatanisme et de favoriser toutes les corruptions au niveau de certains pouvoirs intermédiaires et décisionnaires.

Djibouti tente ainsi de survivre à l’heure des pouvoirs informes que l’on peut définir comme étant de petits Etats dans l’Etat sous la gouverne du peu d’autorité qu’il subsiste au clinquant et très artificiel Palais d’Haramous.

Une gouvernance illégitime par ce que autoproclamée par deux fois, sordide et ayant dépassé, de très loin, tous les seuils de l’incompétence la plus élémentaire.
L’une des clés de ma candidature à l’élection présidentielle, envisagée puis annoncée en temps et en heure, fut de me ménager en préalable à cela le temps de la réflexion, celui du dialogue et des conseils reçus par la concertation avec ma grande famille, mes amis et mes soutiens, y compris étrangers, tout en conditionnant officiellement ma participation à ce scrutin, entre autres, au retrait préliminaire d’Ismaïl Omar Guelleh de la scène politique dans notre pays, sans condition d’aucune sorte.

Ce faisant et contrairement à ce qu’il s’était produit par le passé, j’avais l’espoir que toutes les exigences imposées par notre Constitution Nationale en 2009 allaient être respectées deux ans plus tard et qu’elles seraient enfin appliquées pour que ce type de scrutin – tant attendu par tous les Djiboutiens – se déroule dans la plus grande transparence possible.

Nous étions nombreux à formuler le souhait que ces élections soient considérées, a postériori tant sur le plan national qu’international, comme étant des élections justes et équitables ; donc démocratiques et crédibles sous le regard des autres pays.

A titre personnel, j’avais l’espoir en un scrutin se déroulant dans un cadre de stricte légalité républicaine, respectant le droit de participation au vote de toutes les Djiboutiennes et de tous les Djiboutiens, tout en préservant leur droit d’expression.

Une espérance en une campagne d’élections présidentielles privilégiant une réelle ouverture au multipartisme politique, à toutes les candidatures, garantissant à chacune et à chacun le respect du droit de réunion comme celui de manifester ; reflétant, au final et par les résultats du scrutin, l’expression de la volonté des populations de notre pays et exclusivement que cela.

Selon mes considérations, une élection présidentielle se doit d’être la rencontre d’un homme avec son pays, d’un homme et d’un peuple et non point celle d’un tyran face à une population qu’il asservit et spolie de tous ses droits.

Les événements de ces dernières semaines m’ont donné tort, tout le moins pour un changement politique dans le calme et en toute sérénité.

Croyez bien que je le regrette amèrement et que j’ai chaque jour une pensée pour les familles djiboutiennes dans la peine ainsi que pour mes anciens compagnons d’armes et subordonnés d’antan.

En effet, ces événements ont été tristement édifiants quant à l’impossibilité actuelle qu’il puisse y avoir l’instauration d’un dialogue entre l’opposition et le pouvoir discrétionnaire en place ; un dialogue allant vers l’amorce d’une ouverture à la démocratie dans notre pays.

Nous ne connaissons rien de plus vil, de plus méprisable, de plus lâche et de plus borné que l’attitude indigne et sauvage avec laquelle les populations de manifestants et l’ensemble des Djiboutiens en général ont été traités depuis le mois de février de cette année par les forces de la répression et le sont, hélas, encore aujourd’hui.

Loin de répondre à l’attente justifiée de l’immense majorité des populations, le pouvoir d’Ismaïl Omar Guelleh – qu’il partage avec Kadra Mahamoud Haïd – a fait le choix délibéré de refuser toute concertation avec l’opposition politique en préférant se fourvoyer dans une forme de terrorisme d’Etat permanent.

Une décision totalement irresponsable, dépassant de loin les simples et traditionnelles « bastonnades » du passé, car ordonnant qu’il soit fait usage dorénavant – par les mercenaires de la répression – des armes pour des tirs à balles réelles à l’encontre des manifestants pacifiques ; tirs qui ont occassionné ces dernières semaines un nombre de tués, de blessés et surtout de « disparus » dont il est difficile de chiffrer le nombre avec précision.

Ce que l’on peut en dire sur ce dernier point c’est que des dizaines de familles recherchent vainement encore, à ce jour, une mère, un fils, un père, un oncle venu manifester et disparu depuis.

Et comme si cela ne suffisait pas au bien triste et déshonorant tableau de la répression inhumaine à l’égard des populations djiboutiennes, de jeunes enfants – innocents de tout délit – sont pris en otage puis incarcérés à la prison de Gabode ou dans les cellules de la Police et de la Gendarmerie afin que leurs familles ne viennent pas grossir les rangs des manifestants.

De tels actes de prise en otage et de l’odieux chantage exercé par le pouvoir arbitraire en place à l’encontre de familles djiboutiennes ne pourront jamais se justifier devant un tribunal, quelque raison que l’on pourrait tenter de faire valoir.
Face à une telle situation de terrorisme d’Etat, j’ai décidé de mettre fin à ma candidature pour les élections présidentielles de 2011 à Djibouti, telles qu’envisagées par Monsieur Ismaïl Omar Guelleh, et souhaite m’en expliquer par le présent communiqué.

Loin de se retirer de la scène politique djiboutienne, sans condition d’aucune sorte, Monsieur Ismaïl Omar Guelleh a transgressé délibérément le contenu de notre Constitution nationale pour pouvoir s’autoproclamer, une nouvelle fois, à la présidence de notre pays.

Ce faisant, par ce geste insensé il confirme qu’il n’a que faire des Lois et des Droits et lance ouvertement un défi au peuple djiboutien pour l’avenir.

Sur le plan du regard que peuvent porter les instances internationales sur notre pays, Monsieur Ismaïl Omar Guelleh dévoile sa véritable nature de tyran en s’ouvrant la possibilité de s’autoproclamer à la présidence aussi longtemps et aussi souvent qu’il viendrait à le souhaiter.

– En plaçant à la tète des forces mercenaires du pouvoir et en donnant ordre à Monsieur Hassan Saïd Kaireh, Directeur des SDS (Police politique), d’intensifier la répression à l’égard des manifestants et de prendre en otage les enfants des familles djiboutiennes qui s’opposent à lui, Monsieur Ismaïl Omar Guelleh le rend coresponsable de crimes contre les populations dont ils auront conjointement à répondre ultérieurement devant les tribunaux compétents.

– En agissant ainsi, Monsieur Ismaïl Omar Guelleh se rend aussi coupable de forfaiture à l’égard de notre Constitution nationale et porte, de surcroît, une atteinte à tous les textes signés précédemment sur le plan international « au nom de Djibouti » concernant, notamment, le Respect des Droits de l’Homme et ceux de l’Enfant,

– En favorisant la candidature de quelques politiciens fantoches à ces mascarades d’élections présidentielles qui se préparent, Monsieur Ismaïl Omar Guelleh ne cherche que des « faire valoir » afin de tenter de rassurer artificiellement les pays bailleurs de fonds et les fournisseurs d’aides à Djibouti.

Ces quelques candidats fantoches, s’il arrive à en trouver, seront financés pour leur présence et leur cautionnement en échange des mystifications conduisant inévitablement à un résultat de scrutin connu par avance.

– De surcroît et aux fins de s’assurer une nouvelle autoproclamation à la présidence dans les meilleures conditions qu’il soit tout en trompant les observateurs étrangers lors du scrutin, Monsieur Ismaïl Omar Guelleh a ordonné la distribution préalable de plusieurs milliers de fausses cartes d’identités djiboutiennes à des étrangers choisis dans des tribus au delà de nos frontières et introduits à Djibouti pour la circonstance.

Le financement de ces étrangers «djiboutiannisés» en prévision de la falsification d’élections présidentielles a déjà commencé et s’effectue à partir des détournements financiers des Aides internationales et Publiques au Développement.

– Alors que les aides alimentaires en produits de première urgence arrivent dans le Port Autonome et International de Djibouti ainsi que sur l’aéroport international d’Ambouli, ces aides sont ouvertement détournées puis revendues au profit de Monsieur Ismaïl Omar Guelleh et de son épouse Kadra Mahamoud Haïd qui entretiennent ainsi la malnutrition des populations djiboutiennes, particulièrement dans toutes les régions de l’arrière pays et dans certains quartiers de la capitale pour les seuls intérêts et profits qui les rendent totalement insensibles à tous leurs malheurs.

– En agissant tel qu’il le fait et ordonne de le faire à ses complices et mercenaires, Monsieur Ismaïl Omar Guelleh se conforte intentionnellement dans une attitude de provocation pour une épreuve de force ouverte et déclarée à l’égard des populations djiboutiennes.

Outre le fait que la révolte de la faim risque d’émerger à tout moment, l’attitude du pouvoir actuel constitue un évident appel à la radicalisation de la situation pour le large mouvement de contestation populaire et de rejet de la tyrannie sous toutes ses formes.

– Pour toutes ces raisons, chaque Djiboutienne, chaque Djiboutien vivant à Djibouti ou en situation d’exil se voit ainsi contraint d’abandonner son comportement initialement pacifique, lors des manifestations, pour préserver sa propre vie et celle de ses enfants en faisant barrière, par tous les moyens, à la répression sauvage dont elle est la victime.

Toutes les formes de cette répression, aussi sanguinaires qu’elles puissent être, n’empêcheront pas le flot de la Liberté de se soulever à de longs intervalles répétitifs et d’entraîner dans sa vague notre jeunesse et toute une population meurtrie, asservie depuis trop longtemps, mais avide de changement en faveur de l’émergence d’une ouverture à la démocratie dans notre pays.

Vive Djibouti
Vive notre élan commun de Libération nationale
Vive le changement vers une amorce de Démocratie