25/03/11 (B596) Point de vue (Uguta-Toosa-CODED) Mohamed Warsama Ragueh : un candidat dangereux pour Ismail Omar Guelleh – 24 mars 2011

Mohamed Warsama Ragueh est-il en train de vivre "son quart d’heure de gloire" ?

Où bien le faux "vrai candidat" qui est en train de servir de faire valoir à Ismail Omar, va-t-il entrer dans l’histoire de notre pays ?

Après le 8 avril 2011 : une guerre civile ou des explosions sociales ?

La prochaine guerre civile opposera une armée totalement discréditée parce qu’inféodée à un seul homme à une rébellion armée – Front pour la restauration de l’unité et la démocratie – qui aura cette fois le soutien sans faille de la part de l’ensemble de l’opposition (celle de l’intérieur et celle de l’extérieur) et du peuple djiboutien. Une question qui ne serait pas sans conséquence pour la région et les bases américaine, française et japonaise.

Les illusions d’un dictateur

Le régime a tout planifier pour le scrutin du 8 avril 2011. Comme dans une pièce théâtrale, les acteurs, les costumes, le cadre et le discours ne souffrent d’aucune approximation. Entre juillet et septembre 2010, on a distribué discrètement des cartes d’électeurs aux Somaliens. Des citoyens de fraîche date grâce auquel le régime a l’habitude de bourrer les urnes ont été sensibilisés. Des porteurs de valise d’argent ont sillonné l’Europe et le Canada, organisant des soirées de gala à quelques partisans du dictateur, ravagés par le khat, qui se font passer pour des réfugiés.

Il n’y aura d’élection à Djibouti mais un plébiscite sans histoire. Djibouti vivra, à quelque chose près, au scrutin de l‘année 2005 au cours duquel le président sortant, Ismail Omar Guelleh, avait raflé 100% de suffrages exprimés. Et pour cause ! Le président sortant était seul à se présenter ! D’ores et déjà, nous savons que pour la deuxième fois, les dirigeants de l’opposition ayant décidé de boycotter une mascarade électorale, Ismail Omar Guelleh sera mal élu. Le mot est dit "On contrôle tout".

Un contexte international favorable

Dans le contexte national et international actuel, l’acharnement à vouloir s’accrocher au pouvoir comporte des risques énormes pour Ismail Omar Guelleh, pour son régime et, bien entendu, pour notre pays. La légalité de sa candidature est contestée par son peuple et une classe politique dopée par la révolution arabe. PLus difficile à admettre : les membres de son propre parti, RPP, souhaitent son départ. Ils aimeraient que leurs enfants vivent dans un Etat démocratique. Allant un peu vite en besogne, les Djiboutiens interprètent l’intervention des forces occidentales en Libye comme un encouragement. Donc la contestation sociale est loin d’être circonscrite. Le dernier mot serait-il à chercher à l’échelle de la société ?

Un candidat improbable: Mohamed Warsama Ragueh

Cette course électorale pourrait bien être la dernière pour Ismail Omar Guelleh. L’affaire du juge Borrel, l’assassinat commandité des centaines de civils innocents et surtout la tuerie d’Arhiba de décembre 1992, pèsent sur son avenir. S’il en a un. Cette élection est certainement la plus dangereuse à laquelle la république de Djibouti fait face. Et au milieu d’un bras de fer que l’on croyait limité à une confrontation entre majorité présidentielle moribonde et opposition de l’intérieur, démocratique mais fermée sur elle-même, a surgi un candidat improbable. Un certain Mohamed Warsama Ragueh. Un singleton fragile et dédaigné par tout le monde.

Ancien président de la cour d’appel, il tient le rôle de « lièvre » ou de candidat alibi pour Ismail Omar Guelleh. Ce faisant, on imagine que le challenger ou le faux candidat sera gracieusement récompensé en espèces sonnantes et trébuchantes. Mais il ne faut pas se leurrer. L’impétrant doit être averti. La générosité du dictateur djiboutien, souvent à double tranchant, ne le mettra jamais à l’abri des besoins ! Une grosse corde au cou cache mille ficelles invisibles qui vous lie à votre obligé.

Un candidat dépressif ? Non. Un candidat dangereux ? Oui.

Dans le scénario qui se profile à Djibouti, après l’échec de la "Mobilisation générale" conçue "à la tunisienne", tout le monde est suspendu à la tyrannie du hasard et les caprices de l’actualité. C’est là où le faux candidat, pas si démuni qu’on le prétend, attire notre attention.

Les partisans d’Ismail Omar Guelleh font circuler sur l’ancien procureur des rumeurs comme quoi il est dépressif et incapable de prendre des décisions. C’est pourquoi le choix du président se serait porté sur lui. Il serait facile à manipuler en raison de ses penchants maladiFs pour la réussite matérielle. Les témoignages que j’ai eu infirment ces propos.

Imaginons un instant que la dépression de Mohamed Warsama Ragueh soit exagérée. Que cette rumeur veut prouver que le président contrôle tout. Imaginons que Mohamed Warsama se retire de cette compétition ubuesque. Alors qu’adviendra-t-il ? Le roi sera nu.

"Un quart d’heure de gloire" ou "entrer dans l’histoire" ?

Aujourd’hui, à Djibouti, un seul homme, profitant de l’opportunité de l’histoire, peut fait tomber comme un fruit pourri une dictature arc-boutée à un formidable système répressif généreusement engraissé par « ses » amis occidentaux.

C’est là qu’on voit toute l’impuissance d’un dictateur désavoué par son peuple. Malgré sa garde présidentielle armée jusqu’aux dents, sa prétendue « créature » peut le renverser en disant tout simplement non.

Un seul homme peut entraîner la chute d’un régime vieux pourtant de trente-trois ans qui, à vouloir être plus malin que les autres, s’est laissé entraîner dans une souricière.

Mohamed Warsama Ragueh a-t-il la trempe d’un héros ? La question est posée.

Mesure-t-il la responsabilité historique que le destin, toujours capricieux et imprévisible, a placé entre ses mains ?

M. Ali coubba
Président d’Uguta-Toosa.
Chargé de Coordination au CODED