08/03/2014 (Brève 369) Récit de voyage en enfer : la sinistre prison de Gabode (1er épisode) par Saad Ali Awalleh

gabode

Un témoignage authentique
sur les conditions effroyables
des prisonniers à Gabode.

 

Episode 1

 


Avant-propos

En ma qualité d’ancien fonctionnaire de l’administration pénitentiaire djiboutienne, affecté à la prison de Gabode, je tiens à apporter mon témoignage sur les conditions effroyables de détention des prisonniers au sein de cet établissement.

J’ai choisi de décrire dans le détail la situation que j’ai constatée, dans plusieurs articles qui seront publiés régulièrement sur le site de l’ARDHD. Mon objectif est d’informer la communauté internationale sur les sévices que subissent au quotidien les prisonniers, parce qu’il faut que les organisations humanitaires se mobilisent pour faire cesser les mauvais traitements inhumains et dégradants.

Qui suis-je ?
Je m’appelle Saad Ali Awaleh, né le 16 Octobre 1985 a Ali-Sabieh. J’ai effectué mon cursus scolaire à l’école primaire d’ Ali-Sabieh 2, ensuite au collège d’Ali-Sabieh puis au lycée d’état en série scientifique. Ayant obtenu le Baccalauréat en 2005 série S, je me suis inscrit à l’Université de Djibouti filière Physique-Chimie, études qui m’ont permis d’obtenir une licence en Physique en 2008. Je me destinais à l’enseignement et en attendant un poste, j’ai donné des cours de soutien de math et de physique à domicile.

Finalement j’ai intégré l’administration pénitentiaire en 2010, non pas par choix, mais parce que je me rendais compte que les règles d’attribution des postes de professeur étaient variables et que les critères fluctuaient en fonction de l’origine et des relations familiales des candidats … mes chances étaient minces ..

J’ai suivi plusieurs formations dont une au sein de la Garde républicaine, car l’administration pénitentiaire confie la formation de ses agents à ce corps ou à la Gendarmerie.

Titulaire d’une licence, j’avais le diplôme le plus élevé de tous les participants qui suivaient avec moi cette formation militaire et j’ai été promu au grade de sous-Lieutenant dans l’Administration pénitentiaire.

Les premières surprises n’ont pas tardé !
Dès mes premières heures passées à Gabode, j’ai constaté que les locaux étaient totalement abandonnés en particulier sur le plan de l’hygiène. Les agents sont divisés en deux factions :

– celle du Capitaine Ali Aden Bouraleh dit « Ali Hood », ancien gendarme et tortionnaire, ancien directeur du SRD (Section de Recherche et de Documentation). Il a été nommé à ce poste en 2007, avec le soutien de la première dame,

– celle du Capitaine Mohamed Djama Yonis, ancien fonctionnaire de la Police nationale, passé Capitaine en 2001, avec le soutien de l’ancien ministre de la Justice Mohamed Barkhat Abdillahi.

Ayant le même grade, les deux hommes voulaient, chacun, diriger la prison et ils s’affrontaient vainement chaque jour : parfois, ils en venaient aux mains et il y a eu un jour un vrai combat. Ali Aden a porté plainte contre Mohamed Djama Yonis, etc..

Dans un prochain article, je vous parlerai de l’état des locaux et des conditions des prisonniers.