10/03/2014 (Brève 370) Récit de voyage en enfer : la sinistre prison de Gabode (2ème épisode) par Saad Ali Awalleh

gabode

Un témoignage authentique
sur les conditions effroyables
des prisonniers à Gabode.

 

Episode 2

 


Dans cet article N°2, je vais brosser un tableau général de la situation dans la prison de Gabode.

La construction de la prison civile de Gabode a été réalisée dans les années 60 par les Français. Cette prison comprend en 3 secteurs : 
– Un quartier pour les femmes 
– Un quartier pour les mineurs appelé CES (centre d’éducation surveillé )
– Un quartier pour les hommes avec les dortoirs et la Cellule 12 qui est composée de 12 cellules + une dite « de punition », qui n’a pas de toilettes et qui est trop petite pour pouvoir dormir allongé.

Après l’Indépendance la sécurité de la prison a été placée sous la responsabilité de la Police nationale et son administration sous la tutelle du ministère de la Justice.

La Police nationale et le ministère ne s’entendaient pas pour gérer la prison. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a créé la sécurité de l’administration Pénitentiaire en 2007 .

Par décision du Président, bien que passé capitaine beaucoup plus récemment (2007), Ali Aden Bouraleh a été nommé directeur de la prison et promu commandant, tandis que Mohamed Djama Yonis, pourtant capitaine depuis 2001, est devenu (seulement ?) directeur adjoint avec lui aussi le grade de commandant. Doit-on voir l’influence de la première dame dans ce choix qui ne respecte par l’ancienneté ?

Comme l’on pouvait s’y attendre, il y a eu des malentendus et des disputes entre les deux responsables qui voulaient obtenir le poste de directeur afin de pouvoir détourner à leur profit les budgets alloués à la prison.

La prison de Gabode est composée de dortoirs. Chaque dortoir est prévu pour accueillir 35 détenus, mais dans les faits il sont souvent 60 et même parfois 70. Ils sont entassés les uns contre les autres.

C’est une véritable surpopulation.
Ajoutez à cela le manque d’aération et deux latrines pour 60 détenus …Les canalisations ont tendance à se boucher. Quand cela survient, les immondices commencent à envahir l’intérieur des cellules. Les nattes sont imbibées car les canalisations posées par les colons n’étaient déjà pas de bonne qualité et elles n’ont pas été rénovées ni entretenues convenablement. Rien n’a été fait depuis la construction, sauf pour la partie visible de l’extérieur pour conforter le Président quand il passe devant.

Vous comprendrez que les détenus vivent un véritable calvaire, d’autant que certains croupissent « en préventive » dans ces locaux, sans jugement depuis 5 années et même 10 pour certains.

Les agents sont mal payés et ils sont mal équipés. La prison ne dispose que de deux véhicules pour assurer les transferts de 700 détenus (palais de justice, autres locaux d’interrogation, …). Il est fréquent que l’un des véhicules avec des détenus entassés à l’arrière doivent soit contraint de s’arrêter en pleine route par manque de carburant. En effet la prison reçoit une dotation mensuelle de 700 litres, mais une partie non négligeable est détournée à son profit par le directeur.

Un budget mensuel important qui serait détourné par le directeur Ali Aden Bouraleh sous le regard complice et bienveillant du ministre de la Justice ?
Le directeur de la prison reçoit :
– chaque mois,
un million de FDJ pour l’entretien de la prison et les réparations de matériel : ventilateur, lampes, nettoyage, et médicaments pour les détenus qui n’ont pas de famille. Mais la prison n’achète aucun médicament, par exemple…..
– chaque mois, deux millions et demi de FDJ pour la nourriture des détenus
– tous les deux ans, une allocation de trois millions de FDJ pour remplacer les couvertures.
La question est posée de savoir combien il garde pour lui et ce qu’il accepte de consacrer effectivement aux besoins de l’établissement et des détenus…

Pas de service santé pour les agents affectés à Gabode.
Contrairement aux autres corps (gendarmerie, garde républicaine, police nationale) l’administration pénitentiaire ne dispose pas d’un centre de soins pour ses agents. Ce qui génère des situations invraisemblables. Par exemple, lorsqu’un fonctionnaire de l’administration pénitentiaire est malade, ses collègues doivent le menotter pour le conduire à l’hôpital où il sera soigné gratuitement, comme s’il était un prisonnier.