21/04/2020 (Brève 1597) Lieutenant Fouad Youssouf : lettre ouverte du Comité Fouad Canada au PM éthiopien

Texte intégral de la lettre que le « Comité de Soutien Fouad Canada » a adressé au Premier Ministre éthiopien pour lui demander de ne pas extrader le Lieutenant Fouad Youssouf
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19th of April 2020

LETTRE OUVERTE
Réf:05/GSF/2020

Son Excellence, le Premier Ministre
de la République fédérale d’Éthiopie
Dr. Abiy Ahmed Ali

Object: Appel solennel pour ne pas extrader le pilote de l’armée de l’air, le Lieutenant Fouad Youssouf Ali vers Djibouti.

Son Excellence,

Par cette présente, nous attirons votre attention sur ce cas urgent du pilote djiboutien, le lieutenant Fouad Youssouf Ali, exposé à une mort certaine.

Le lieutenant Fouad Youssouf Ali est un pilote consciencieux de l’armée de l’air djiboutienne. Depuis  plus de dix ans, il a travaillé dans cette institution, avec persévérance, diligence et abnégation. Il a enduré les pires humiliations, injustices et persécutions psychologiques. Suite à ses premières réactions contre la mal gouvernance, les fonctions et les rôles qui lui revenaient au sein de l’armée ont été délibérément et progressivement vidés de leur sens et leur contenu. Puis, avec préméditation, et sous une pluie de réprimandes et d’intimidations successives, le commandement de l’arme de l’air djiboutienne le plonge  dans un chaos calculé et sans précédent. De fil en aiguille, il s’est finalement retrouvé dans le placard.  Le comble de cette folie meurtrière est qu’en bout de ligne, son salaire a  été suspendu. Et, il s’est retrouvé incapable de nourrir sa famille de sept enfants, son épouse, et ses parents. Même s’il a essayé de régler sa situation, avec sang-froid, à travers la hiérarchie et en suivant les procédures militaires, il a toujours heurté un mur.

Cette situation ne lui est pas propre, mais est très répandue à travers le pays et de nombreux citoyens djiboutiens sont victimes des abus de ce régime despotique et moyenâgeux. En effet, ce régime dictatorial impose un climat délétère qui plonge la nation djiboutienne  dans une misère profonde,  et dans climat d’incertitudes, et d’instabilité.  Sans vision aucune, sa  stratégie politique de gouvernance consiste à garder un rapport de force vis-à-vis de son peuple. En effet, les comportements classiques du régime de Djibouti sont, parmi tant d’autres, le  tribalisme, le clientélisme, la corruption, la violence verbale ou psychologique, et la propagande dirigée contre son peuple. Par le truchement de ces  tactiques utilisées pour faire taire quiconque a une conscience, un sens de l’éthique et s’interroge sur la mal gouvernance qui gangrène ce pays, le régime a pour objectif final de distiller la crainte et la peur dans les cœurs de ses citoyens

En ce qui concerne, le cas de Lieutenant Fouad Youssouf Ali, nous savons qu’il a déserté l’armée djiboutienne et quitté Djibouti le 27 mars 2020 pour l’Éthiopie afin de demander l’asile politique et la protection de l’État éthiopien. Selon son avocat, le lieutenant Fouad a été appréhendé par les forces de sécurité éthiopiennes,  le 8 avril 2020. Il est actuellement en attente d’une décision d’extradition vers Djibouti.

Lieutenant Fouad Youssouf Ali, court un risque élevé d’être remis aux autorités djiboutiennes qui, sans aucun doute, le tortureront jusqu’à sa mort. Pour cela, votre soutien est essentiel. Un petit geste de votre côté sauvera une vie. Nous vous demandons vivement à agir. Car, sachant les traitements habituels du régime de Djibouti vis-à-vis des prisonniers extradés de l’Éthiopie, remettre Fouad au régime de Djibouti, c’est le condamner à mort. Nous avons de nombreux exemples des cas comme lui une fois extradés, qui furent maltraités, torturés et qui ont enfin rendu l’âme à Gabode, la prison centrale de Djibouti. Cette prison coloniale est l’équivalent de ‘’ Jeel Ogaden’’, que vous avez récemment fermée à Jigjiga, et qui fut utilisée par Abdi Iley, pendant des décennies, pour faire  taire le peuple somali d’Éthiopie. Il est clair que si vous acceptez les demandes de Djibouti, vous  condamnerez  Lieutenant  Fouad à une mort certaine, comme ce fut le cas de Jabha, capturé en Éthiopie, remis aux autorités djiboutiennes, en 2010 ?.

Par ailleurs, et pour justifier l’extradition du Lieutenant Fouad, l’Éthiopie pourrait évoquer les  accords entre les deux pays, datant de l’ère du gouvernement éthiopien précédent. Elle serait également tentée de renvoyer l’ascenseur et considérer le fait que Djibouti ait retourné à l’Éthiopie deux pilotes de l’armée de l’air éthiopienne qui ont demandé refuge à Djibouti en 2005.

Aussi, étant donné la situation de dépendance économique  de l’Éthiopie vis-à-vis du port de Djibouti, elle pourrait se voir les mains liées et obligée de répondre positivement aux demandes de Djibouti. Dans ce sens, le régime de Djibouti a fait un geste de séduction, non gratuit et calculé, qui consiste à réduire de 82.5% les tarifs d’exportations de produits éthiopiens via le port de Djibouti. Toutefois, nous nous attendons à ce que l’Éthiopie, dotée de sa grande civilisation et de son histoire, ne tombe pas dans le piège d’un régime despotique qui n’a d’autres objectifs que celui d’opprimer son peuple.

Une telle éventualité nuirait énormément à la réputation de votre leadership sur la scène internationale. Ce serait également une violation des dispositions légales de l’Ethiopie en vertu  de la Convention de Genève, art.51, de la Chartre Africaine des droits de l’homme, et autres  conventions des Nations-Unies.
Nous, les signataires de cet appel, travaillons sans relâche et investissons chaque seconde que nous disposons, pour secourir humainement le Lieutenant Fouad. Nous restons mobilisés et vous envoyons, et aux organisations internationales et aux pays amis de l’Ethiopie un cri de cœur pour vous demander d’agir.

Les Signataires
Comité de Soutien Fouad- Canada