22/05/2000 – DJIBOUTI: Une note de la DGSE mettrait en cause le chef de l’État (Extrait de ‘Le Figaro’ de la semaine dernière )

Mobile possible pour l’affaire Borrel

L’affaire Borrel pourrait à nouveau rebondir, grâce à un document confidentiel attribué à la DGSE. Il s’agit d’une  » note blanche  » de cinq pages consacrées à Ismaïl Omar Guelleh, actuel chef de État djiboutien. Rédigé avant l’élection d’Omar Guelleh à la présidence de la République, ce document ne mentionne aucune information sur les conditions suspectes de la mort de Bernard Borrel, survenue en octobre 1995 à Djibouti. Il évoque en revanche l’attentat du Café de Paris -un mort et quinze blessés en 1990- comme l’une des nombreuses  » affaires  » dans lesquelles serait impliqué le chef de État djiboutien.

Divulgué hier soir sur TF1, ce document-dont la partie civile assure qu’il émane des services d’espionnage français- indique qu’  » Ismaïl Omar pourrait être le commanditaire de l’attentat du Café de Paris « . Peu amène à l’égard de l’actuel chef État, cette note précise :  » Le dossier présenté par les autorités locales sur cet attentat serait en fait une manœuvre d’intoxication « . Instruit à Paris par le juge Roger Le Loire, le dossier du Café de Paris avait abouti, en novembre 1998, à la condamnation par contumace de cinq personnes, dont quatre anciens militaires. Chef de cabinet du président Aptidon, Ismaïl Omar Guelleh n’a jamais été inquiété.

Pour la défense de la veuve du juge Borrel, qui est persuadée que son mari a été assassiné, les soupçons des services français à l’égard d’Ismaïl Omar Guelleh viennent étayer les accusations prononcées à son encontre par un ancien officier djiboutien réfugié en Belgique, accréditant la thèse du meurtre. Or, la justice française est persuadée que Bernard Borrel s’ est suicidé. Selon l’expertise du Professeur Dominique Lecomte, directeur de l’Institut médico-légal de Paris, il se serait immolé par le feu en face de l’Ile du Diable :  » la victime peut s’être déplacée dans une fuite instinctive de douleur « , résume l’expert, qui estime qu’elle aurait pu mourir ensuite de l’effet conjugué des brûlures et d’un œdème pulmonaire. Des conclusions contestées par la partie civile, qui entend demander une contre-expertise.

Les informations nouvelles sur l’attentat du Café de Paris constitueraient par ailleurs, à ses yeux, un mobile possible à un assassinat politique visant un magistrat trop curieux.

En 1995, lorsqu’il était en poste à Djibouti, Bernard Borrel était en effet intervenu auprès des autorités locales afin que les auteurs de l’attentat du Café de Paris ne soient pas libérés pour une erreur de procédure. Bernard Borrel avait également indiqué à son entourage qu’il ne fallait pas se contenter de poursuivre les exécutants de l’attentat.  » Bernard Borrel était en mesure de nuire à Omar Guelleh dans le dossier du Café de Paris « , estime Me Olivier Morice, avocat de la partie civile.

Très circonspect sur l’authenticité du document présenté par la partie civile, Me Francis Szpiner, défenseur du chef de État djiboutien, refusait hier soir, de commenter le contenu de ces curieuses  » notes blanches  » attribuées à la DGSE.  » Je ne réponds pas à des lettres anonymes, nous a indiqué l’avocat parisien. La partie civile n’a qu’à les remettre à la justice. On verra si c’est un document authentique ou un faux. Dans ce cas, ce sera au procureur de prendre ses responsabilités. «