12/05/03 (B197) Lettre ouverte de Mohamed Saleh Alhoumekani, ancien officier de la Garde présidentielle djiboutienne à Ismaël Omar Guelleh, Président de la République.

Mohamed Saleh
Alhoumékani

Bruxelles

M Ismaël
Omar Guelleh

Palais de l’Escale
Djibouti

Bruxelles
le 11 mai 2003

 

Monsieur,

Vous avez pris l’initiative
de me faire assigner par personnes interposées devant ce que dénommez
« votre justice » et dans le cadre d’un procès burlesque où
il a été fait état de supposées diffamations qui
ne sont, dans les faits ni démontrées ni confirmées.
Le fond du problème étant qu’il s’agit de Vérités
qui nuisent à votre image et à qui contrdisent votre stratégie
de défense dans une affaire pénale.

Pour quelles raisons,
votre réaction a-t-elle été si tardive ?

Chacun sait que cela fait
plus de trois ans que j’ai déposé auprès de la Justice
française dans l’Affaire du décès du Juge Borrel
…. Et votre justice n’intervient qu’aujourd’hui !

Serait-ce en raison de
la conjoncture délicate à laquelle vous êtes confronté
depuis quelques mois et à toutes les autres accusations qui sont portées
à votre encontre dans divers dossiers par une Justice étrangère
? Il est clair que vous ne sauriez contraindre ces magistrats intègres
et indépendants, comme vous le faites avec votre supposée magistrature,
par l’utilisation de moyens de corruption les plus diverses, des trafics
d’influences dans lesquels vous êtes passé maître.

En agissant de la sorte,
avec ce même despotisme marqué que l’on vous connaît
et dont les Djiboutiens et les Djiboutiennes subissent les effets, hélas
depuis bien des années, vous n’avez fait que dégrader votre
image personnelle. Vos excès en tous genres et sans limite d’aucune
sorte, vous ont poussé à contraindre la haute magistrature de
mon pays à se fourvoyer dans un Procès « Politico-juridique
» dépassant de très loin le grotesque.

Elle se serait bien passée
de cette situation qui est très préjudiciable à sa crédibilité
sur le plan national et international, mais au fond, vous n’en avez rien
à faire. Ceci confirme votre manque le plus total de respect pour la
légalité et pour l’indépendance des institutions
nationales ou internationales en matière de Justice.

A ceci il est observé,
lors d’entretiens confidentiels, que ce que pensent la grande majorité
de nos magistrats djiboutiens est en totale contradiction avec le sens des
décisions qu’ils sont contraints de rendre. Vos propres magistrats
vous ont jugé depuis fort longtemps mais sachant, les extrémités
auxquelles peut conduire la paranoïa d’un despote sans limite, tel
que vous, ils n’ont actuellement d’autres choix que de se taire et d’éxécuter
vos décisions personnelles.

Une véritable Justice
indépendante existe cependant dans le monde et tout me laisse supposer,
Monsieur Guelleh, que vous pourriez avoir des comptes à lui rendre
un jour sur toutes ces années de despotisme primaire.

Au cours de ce procès,
mis en scène comme une comédie de bas niveau, avec des mauvais
acteurs (témoins – faux témoins ? – subordonnés à
vos largesses, magistrats tenus par la pression que vous exercez sur eux,
…) , vous avez tenté de me discréditer auprès des populations
djiboutiennes et étrangères à Djibouti et plus grave
encore de salir mon Honneur d’Officier de la Gendarmerie nationale. Cependant,
vous avez négligé l’opinion publique : même si en face
de vous, certains font semblant de vous croire, je epux vous dire que personne
n’a pas été dupe de vos manoeuvres et qu’elles n’ont pas atteint
leur objectif.

Je fais donc usage de
mon droit de réponse, grâce à des média indépendants
bénéficiant d’une trés large audience, qui ont accepté
de le publier sans réserve. Cela n’aurait pas été possible
dans les supports nationaux qu’à l’instar de la magistrature, vous
maintenez sous votre contôle le plus absolu, ne leur accordant aucune
liberté de manoeuvre et d’expression.

Il me semble nécessaire
d’élargir le débat pour rétablir des vérités
afin que l’opinion publique puisse juger librement et se faire sa propre
opinion : qui de vous ou de moi est le menteur ?

Mettons d’abord en évidence
non seulement les causes mais aussi les échecs qui vous ont incité
à agir de la sorte.

  • En me faisant condamner
    au cours d’un procés où je n’ai jamais été convoqué
    (contrairement à vos affirmations), puis en faisant incarcérer
    sous de fallacieux prétextes M Daher Ahmed Farah que vous aviez «
    sous la main », vous avez tenté maladroitement de lancer un
    message aux populations djiboutiennes et à l’opposition politique.
  • Ce message, nous le
    connaissons parfaitement car il constitue votre seul leitmotiv. Mais il
    est utile de le reformuler :

« Le châtiment
sera impitoyable et exemplaire pour celles et ceux qui oseraient à
l’avenir s’opposer à toutes vos malversations, à vos
actes odieux à Djibouti ou ailleurs, et qui dénonceraient les
crimes dont vous vous rendez coupable ou ordonnez »

Vous confirmez, en l’espèce,
la démonstration la plus évidente d’un despotisme sans
limite et de la volonté d’imposer une pensée unique à
Djibouti. En cela on peut estimer que vous rejoignez les pratiques initiées
par Staline et instaurées à Cuba par votre ami Fidel Castro.

Les exactions, meurtres
prémédités et autres qui ont été commis
sur vos ordres et que je mentionne sont à dissocier des conditions
du décès du Juge Bernard Borrel le 19 octobre 1995 à
Djibouti. Dans cette affaire qui n’en est encore qu’au stade de l’instruction,
je n’ai fait que témoigner de faits dont je fus le témoin,
je n’ai répété que ce que j’ai vu et entendu.

Quels que pourraient être
les moyens employés pour me faire taire, vous ne pourrez pas m’empêcher
de dire ces Vérités.

· Vous estimez
avoir à titre personnel, tous les Droits et toutes les Libertés,
même ceux de transgresser notre Constitution et nos Lois alors que les
populations djiboutiennes et la presse locale, libre et objective, n’en
ont aucun.

Reporters Sans Frontières,
Voice of América et le Département d’Etat US dans un document
récent sans sectarisme d’aucune sorte, ont dénoncé
tout cela. De longs rapports très explicites auxquels vous vous gardez
bien de répondre, en despote absolu. Il est étrange que dans
un pays, a fortiori dans un pays supposé républicain faisant
partie de la grande famille de la Francophonie et dont le « grand maître
» de cette noble institution, bien que « dérangé
» par vos excès, reste totalement muet, vous puissiez encore
appliquer vos méthodes …

Le régime que vous
avez instauré dans notre République est mis au banc des accusés
par les Instances internationales et par l’opinion publique. Ce qui impose
de renforcer toutes les terreurs qui régnent sur les populations djiboutiennes,
y compris sur celles qui se sont exilées.

· Vous estimez
pouvoir disposer de la vie des êtres suivant votre bon vouloir et vous
vous arrogez le droit de les faire lâchement exécuter lorsqu’ils
pourraient vous mettre en cause dans divers dossiers. A mon sens, vous oubliez
qu’une autre Justice que la vôtre aura à statuer sur vos
actes un jour. Ne vous trompez pas sur ce point, tôt ou tard cette Justice
produira ses effets, quelle qu’en soit la forme.

· Dans les suites
de l’Affaire du décès du Juge Bernard Borrel, vous estimiez
qu’il était légitime de donner l’ordre à M Hassan Saïd
Kaireh, directeur du SDS, de menacer le Commandant Ali Abdillahi Iftin de
faire supprimer ses enfants s’il n’établissait pas un faux
témoignage contre moi. D’abord ce témoignage a été
obtenu par des pratiques odieuses qui sont punies par toutes les cours pénales
: contraindre une personne à faire une fausse déclaration pour
sauver la vie de ses enfants !!! Ensuite, une fois libre, avant de le révoquer,
M Iftin a expliqué les conditions dans lesquelles il avait été
contraint de signer ce faux-témoignage. Ce témoignage qui était
capitale pour votre défense personnelle se retourne aujourd’hui contre
vous et contre tous vos subordonnés qui ont été impliqués
d’une manière ou d’une autre dans cet épisode qui
ajoute une nouvelle ombre à votre image de marque, déjà
bien ternie.

Notez que le Royaume de
Belgique vous donne une leçon en l’espèce. Dans ce petit
pays de l’Europe, le Droit de dénoncer les actes perpétrés
par des régimes despotiques tels que le vôtre, à condition
d’apporter des preuves, constitue l’un des garants de la Liberté
et des Droits de l’Homme.

· Vous estimiez
être fondé, dans cette même Affaire, à m’envoyer
à Bruxelles le Procureur Djama Souleiman Ali qui s’est rendu coupable
d’une tentative de subornation de témoins et qui a vainement tenté
de me faire revenir sur le contenu de ma déposition auprès de
la Justice française.

Le Procureur Djama Souleiman
Ali m’a présenté, en votre nom, un projet consistant dans son
esprit, très étroit et indigne d’un homme de loi, à
revenir sur mes déclarations auprès de la Justice française
précisant que je pourrais m’être trompé sur l’indentification
des terroristes mentionnés dans mon témoignage.

Il me demandait de spécifier
dans un nouveau témoignage que c’était un homme «
blanc », sans spécifier son nom, et non pas Alain Romani qui
participait à ladite réunion au Palais de l’Escale alors
que vous savez pertinemment qu’il était présent dans les
conditions que j’ai décrites et sur lesquelles j’ai témoigné
devant la Justice française.

Toutes les falsifications
des documents administratifs qui ont suivi mon témoignage, pour blanchir
M Alain Romani et pour égarer la Justice française, seront mises
à jour par la Police scientifique et par les enquêteurs nommés
dans cette affaire ce qui ne fera que renforcer le contenu de mon témoignage
et sa véracité.

Si je voulais m’autoriser
une remarque en la circonstance je dirais que je vous savais manipulateur
et falsificateur, mais surtout que je vous découvre inconséquent
et très imprudent dans vos falsifications car persuadé à
tort que vous êtes couvert une immunité à laquelle vous
êtes bien le seul à croire.

Toujours en votre nom,
le Procureur Djama Souleiman Ali m’a fait diverses propositions mirobolantes
et insultantes pour mon honneur pour m’inciter à revenir sur mon
témoignage. Le contenu de cet entretien qui s’est déroulé
dans un hôtel à Bruxelles a été enregistré,
une copie des cassettes a été remise à la Justice française,
à l’appui de mes déclarations et de ma plainte.

· Face à
mon refus de modifier d’une quelconque manière mon témoignage
initial auprès de la Justice française, vous avez missionné
ensuite M Adel Mohamed Abdallah pour tenter de me convaincre par de nouveaux
arguments.

· De même,
les divers appels téléphoniques émanant de M. Ali Mohamed
Awad Roubah n’ont en rien changé ma décision. Les enregistrements
et les preuves des interventions de ces personnes missionnées par vous
sont désormais entre les mains de la Justice française.

· Dans l’impossibilité
que vous étiez de me faire accepter de modifier mon témoignage
auprès de la Justice française vous avez vainement tenté
de monter divers « traquenards » en vue de mon élimination
physique à Bruxelles.

Fort heureusement, pour
ma famille, pour moi et pour la vérité, elles ont toutes échouées
et je n’en retiendrai qu’une pour l’exemple.. et pour remercier la Police
belge de son efficacité.

Grâce à la
diligence des « services belges », qui ont procédé
à l’arrestation de deux de vos « envoyés spéciaux
», surpris à la gare de Bruxelles midi, vos exécuteurs
des basses œuvres, en possession de passeports diplomatiques émis
par la République de Djibouti, ont échoué dans leur tentative
d’assassinat sur ma propre personne.

Le troisième «
larron » est le chef de l’opération. Il réussit à
échapper à l’opération des « services belges
» et il précipita son retour sur Djibouti pour vous rendre compte
de cet échec. L’un de nos amis, sur place, m’a rapporté l’une
de ces plus épouvantables colères dévastatrices que l’on
vous connaît.

Là ne s’arrête
pas l’inventaire des actes despotiques ayant dépassé de
très loin les manipulations et autres exactions pour tenter de maintenir
en équilibre votre trône vacillant.

· Vous estimez
pouvoir falsifier en toute impunité toutes les élections en
accordant aux populations djiboutiennes, aux opposants politiques et au Gouvernement
en Exil de Djibouti qu’un Droit, celui de se taire ; heureusement nous
pouvons passez outre, ce que vous constaterez dans cette lettre..

· Vous estimez
pouvoir diviser l’opposition en faisant acte de clientélisme à
l’égard de « quelques-uns », de ceux qui ont trahi
leurs valeurs et leurs engagements vis-à-vis du peuple exclusivement
par intérêt personnel.

Sachez qu’ils vous
trahiront demain avec la même absence de dignité humaine et sans
aucun état d’âme.

Il est à noter
que la psychologie de l’homme explique parfaitement le phénomène.
En ce qui vous concerne, c’est certainement l’absence de structures éducatives
et culturelles stables au cours d’une enfance perturbée (nous
ne saurions vous le reprocher, mais il explique votre comportement). Il en
est de même pour vos « obligés ». Certains êtres
s’assemblent et trahissent toute leur vie. Tandis que les autres, marqués
au quotidien par ces acquis éducatifs et culturels, restent debout
et ils font face dans la dignité, aux mensonges et à l’adversité.

Vous y trouverez là
M Ismaël Omar Guelleh, sujet à méditer avec vos «
obligés » entre les valeurs de l’âme humaine et celles
du ventre et de la cupidité.

Pour ce qui me concerne,
je mesure jour après jour ce que peut être l’ampleur des
angoisses et des problèmes quasiment insolubles que je vous pose comme
membre du Gouvernement en Exil de Djibouti et qui par toutes les dénonciations
justifiées notamment auprès des Instances et de l’opinion
publique internationales s’oppose sans cesse à vos exactions despotiques.

Comme je l’ai précisé
plus avant dans ces écrits, toutes vos tentatives d’élimination
physique à mon encontre, que vous avez ordonnées pour me faire
taire, ont avorté. Le fait même que vous les ayez organisées
suffit à confirmer non seulement la véracité de mes dépositions
auprès de la Justice française mais aussi le fait qu’elles
vous indisposent au point d’imaginer que vous n’avez d’autre alternative
que de me supprimer pour que votre Vérité soit reconnue. Grave
erreur de jugement, car en m’éliminant, vous ne supprimez pas les dossiers
et les preuves qui sont détenues par la justice française et
vous ne ferez que produire un effet inverse.

Comment pourriez-vous
justifier les tentatives de subornation de témoins et les tentatives
d’éliminations physiques lancées contre M Ali Abdillahi
Iftin et moi- même ?.

Il ne fait nul doute que
la multitude des témoignages, non des moindres, à votre encontre
dans l’Affaire du décès du Juge Bernard Borrel, qui a été
reconnu scientifiquement comme un crime et non comme un suicide, vous mettront
en cause dans un proche avenir, d’abord par une implication de vos proches,
puis de votre personne.

Pour tenter de vous protéger
de tous les témoignages qui ne cessent de proliférer, allez-vous
M Ismaël Omar Guelleh lancer ou relancer une vaste opération d’élimination
des témoins gênants dans cette Affaire, y compris ceux qui sont
en exil ?. Nous attendons vos « exécuteurs » de pieds fermes
et leur réserverions, une fois encore, d’autres surprises et des
plus désagréables.

De même, dans l’opération
que vous avez discrètement lancée en vue de l’agrandissement
de la Prison de Gabode nous serions curieux d’en connaître les raisons
et quelle destination vous souhaitez donner aux nouvelles cellules ainsi créées
à court terme ?.

Seraient-elles affectées
aux opposants politiques, aux fonctionnaires de l’Etat qui contestent un peu
plus chaque jour les conditions de travail que vous leur imposez et l’absence
de versement de leurs salaires depuis de nombreux mois mais aussi aux Députés
que vous avez désignés et qui commencent à contester
l’absence totale de pouvoir dont dispose l’Assemblée nationale djiboutienne
?.

Pour conclure en ce qui
concerne plus particulièrement l’Affaire des conditions du décès
du Juge Bernard Borrel, les opinions publiques locales et internationales
jugeront qui de M Ismaël Omar Guelleh, « donneur d’ordre »
de faire exécuter un témoin gênant ou dudit témoin
M Mohamed Saleh Alhoumékani dit la Vérité.

Comme le furent en leur
temps les régimes de feu M Mohamed Ziad Barreh en Somalie, celui de
M Menguistu Heïlé Mariam en Ethiopie et plus récemment
celui de M Saddam Hussein en Iraq, votre régime despotique est en pleine
agonie, miné qu’il est par toutes les corruptions que vous avez instaurées
et qui vous dépassent ; il ne pourra donc de ce fait survivre très
longtemps, ne serait-ce qu’au mouvement de contestation interne qui s’affirme
et s’amplifie au sein même de toutes les administrations de notre pays,
y compris dans l’Armée Nationale, dans la Gendarmerie et dans les Forces
Nationales de Police.

Dans notre pays où
chacun commence à réfléchir sur ce que pourrait être
son propre avenir après l’instauration d’un Etat de Droit
qui est inévitable, comme bon nombre de mes amis, dont le Commandant
Ali Abdillahi Iftin, je représente aujourd’hui pour vous une ombre
insaisissable.

Les quelques « mercenaires
» qui vous sont encore fidèles et qui nous cherchent ou nous
surveillent, nous voient à Djibouti, en Ethiopie et simultanément
au Yémen ou au Somaliland. Durant ce laps de temps où l’on
monopolise leur attention, nous sommes satisfaits qu’ils n’aient
pas le loisir de torturer des êtres sans défense dont ils se
sont faits une triste et peu digne spécialité.

Vous avez pleine conscience,
M Ismaël Omar Guelleh, que votre régime despotique et corrompu
est à l’agonie ; le jour est proche où avec les populations
djiboutiennes le Gouvernement en Exil vous forcera à abdiquer si vous
en avez le temps ou si vous ne vous êtes pas enfui du pays d’ici là.

Mohamed
Saleh Alhoumékani
Ancien
Officier de la Garde présidentielle