14/09/04 (B263) Ahmed Dini : un homme pas comme les autres. (Lecteur)

C’était une
journée de canicule du mois de juillet, telle que les Djiboutiens la
connaissent. La foule se pressait devant une estrade érigée
devant l’annexe du LPAI, avenue Gamal Abdel Nasser. Tout d’un coup,
le brouhaha de la foule monta en clameur. Au milieu de cette clameur, me sont
arrivés (à mes oreilles de petit gamin) des phrases en rime.
La foule répétait de façon lancinante « Waa Dini
iyo dinta» : littéralement « Dini, c’est l’homme
de la religion ». J’essayais tant bien que mal de me faufiler parmi
la foule pour apercevoir ce fameux « Dini ». Arrivé devant
l’Estrade, la vision de cet homme longiligne à la peau très
foncée et au verbe magique parlant le Somali avec aisance, ne me quittera
jamais. Ainsi je venais, ce que j’ai compris avec le temps, de rencontrer
l’un des plus grands héros de notre pays : feu Ahmed Dini.

Cet homme, fils du pays
Afar, visionnaire précoce, homme de principe, homme d’honneur,
homme de courage, reste le symbole d’une République, et d’un
pays que je partage avec lui.

Il est minuit en ce jour
du 27 juin : les projecteurs des journalistes, n’aveuglent pas cet homme,
fraîchement élu Président de la première Assemblée
d’une République nommée Djibouti. Il se lève puis
d’une démarche solennelle en harmonie avec l’intensité de ce
moment historique, il se dirige vers le perchoir de l’Assemblée
nationale. D’un ton calme qui n’est pas affecté par la solennité
du moment, le premier fils de cette terre, ou d’après certains
adages, le chacal, lui-même ferait sa prière avant de la traverser,
prononce la phrase pour laquelle tant de héros sont morts : «
…la République de Djibouti, une, indivisible et souveraine est
née… ». Ainsi, est née la République de la
bouche d’Ahmed Dini.

Dini, a été
trahi par son honnêteté, son intégrité et sa piété.
Dans un monde où les intriguent, les trahisons et les voltes faces
sont de règle, Dini lui, n’a pas voulu se compromettre et il a
suivi sa conscience et sa foie religieuse.

Dini fut doublement victime
: les Afars ne lui ont jamais pardonné d’avoir apporté une certaine
crédibilité à Gouled dont ils se méfiaient a juste
titre ; les Somalis n’ont pas su reconnaître ses qualités
ni exprimer leur gratitude à un homme, sans la caution duquel, la République
de Gouled aurait été livré à la Comorienne, avec
un bout de Désert grand comme la partie Sud du territoire pour tout
pays et République.

Ahmed avec Ahmed Hassan
Cheiko fait parti de ces grands hommes Afar que notre pays doit enterrer dans
le Panthéon « …A la nation reconnaissante, ces illustres
héros… ».

Au revoir, Ahmed, que
Dieu t’accueille en son Paradis éternel. A défaut d’avoir
reçue la reconnaissance officielle de la République que tu nous
as offerte et que tu as fait naître, tu resteras pour nous autres Djiboutiens
et enfants de l’indépendance, l’un des plus grands de notre histoire
au même titre que Harbi et Gashanleh.

« Ina Iila, wa ina
ilahu rajicin », Amen

Ahmed
Ibrahim