25/09/04 (B265) SURVIE / CAMEROUN Communiqué de presse, Déni de démocratie au Cameroun

Paris, le 23 septembre
2004

L’élection présidentielle
d’octobre 2004 au Cameroun va se dérouler dans des conditions qui défient
ouvertement les droits politiques élémentaires.

La date du 11 octobre
a été fixée à peine un mois avant, ce qui empêchera
toute mobilisation et toute organisation pour l’opposition. L’annonce a été
faite au Cameroun en l’absence du Président, qui n’a pas reparu au
pays depuis la mi-août, où il avait répondu à l’invitation
de Jacques Chirac.

Les deux tiers des Camerounais
en âge de voter au Cameroun ne sont pas inscrits sur les listes électorales.
Les Camerounais vivant à l’étranger – plus de dix pour cent
de la population camerounaise – ne pourront pas, malgré leurs protestations,
exercer leur droit de vote. L’exigence d’une Commission électorale
nationale indépendante (CENI) a été refusée. L’Observatoire
national des élections (ONEL), dont les membres sont nommés
par la Présidence et qui a déjà fait la preuve de son
inutilité, a été reconduit.

Tout est donc prêt
pour une nouvelle mascarade électorale.

Paul Biya, après
avoir exercé diverses fonctions sous la présidence d’Ahmadou
Ahidjo, a évincé ce dernier en 1982 par une révolution
de palais. Après avoir, en 1984, réprimé dans le sang
une tentative de retour de l’ancien Président, il est reconduit en
1987 à la Présidence comme candidat unique. En 1992, après
la répression des manifestations pour un changement démocratique,
qui a fait plusieurs centaines de morts, les résultats de l’élection,
favorables au candidat de l’opposition John Fru Ndi, sont grossièrement
truqués et Biya se proclame élu. En 1997, l’opposition boycotte
une élection qui n’offre aucune garantie de loyauté. Une réforme
a changé la durée du mandat présidentiel et remis à
zéro le compteur limitant les réélections : Biya repart
pour un quatrième mandat, de sept ans cette fois.

Tout en subissant pendant
vingt-deux ans un pouvoir sans contrôle, la masse des Camerounais n’a
cessé de s’appauvrir, la moitié d’entre eux vit au-dessous du
seuil de la pauvreté, tandis qu’un affairisme insolent étale
le scandaleux enrichissement de quelques-uns sur un pays doté d’abondantes
ressources naturelles. Le Cameroun de Biya a réussi à prendre
place au rang des pays pauvres très endettés (PPTE). Il vient
d’être exclu de ce bénéfice, faute d’avoir rempli les
conditions élémentaires de gestion, en raison de la corruption
qui mine l’État, et qui a valu au Cameroun de figurer à la première
ou dans les toutes premières places des pays les plus corrompus. Les
services publics d’éducation et de santé sont sinistrés,
les entreprises publiques en faillite ont été bradées,
obligeant les Camerounais à vivre de longs jours sans eau, sans électricité.
La Caisse d’Épargne Postale et la Caisse Nationale de Prévoyance
sociale sont en banqueroute, vidées de leurs fonds.

Pourtant, le Président
du Cameroun est choyé par les hommes politiques français.

De Pasqua à Rocard
on s’affiche en sa compagnie. Il jouit de la protection et de l’amitié
de Jacques Chirac, qui vient pourtant de proclamer, à l’ONU, sa volonté
de lutter contre la pauvreté. Nul doute que sa réélection,
inévitable et programmée, sera saluée par les vœux
et les félicitations du Président français, une véritable
insulte au peuple camerounais souffrant.

La passivité des
Camerounais devant cette situation ne doit pas faire illusion. Réduit
à l’impuissance, muselé, le peuple est conscient du mépris
dans lequel on le tient et du gâchis qui a été fait de
ses possibilités de développement humain. Pourra-t-on s’étonner
demain si, en désespoir de cause, il verse dans l’extrémisme
ethnique ou religieux ? C’est tout ce qu’une politique cynique et irresponsable
lui aura laissé.

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