29/01/05 (B283A) La meilleure attitude à tenir face à Guelleh, c’est de s’abstenir de présenter lors des futures echeances presidentielles, un candidat qui légitimerait une imposture. Les conditions ne sont pas remplies aujourd’hui pour de vraies élections transparentes. (K.R.)

Mon propos est de donner
mon avis sur une tragedie -la mort du juge Borrel- et de ses implications
dans les relations entre la France et Djibouti, d’une part, et sur la politique
à Djibouti d’autre part.

Pour commencer, j’aimerais
rendre hommage à la veuve Borrel et à sa famille pour dire combien
je regrette la mort du juge Borrel, un humaniste doublé d’un serviteur
de la France et de la Republique de Djibouti.

J’aimerais par ailleurs
ajouter que je fais partie de ceux qui croient que la presence française
à Djibouti est, à plus d’un titre bénéfique au
peuple de la Republique de Djibouti.

Cela étant dit,
il est de plus en plus clair que cette tragédie humaine remet en question
la solidité d’une certaine politique et d’un mode de pensée
initié sous de Gaulle. Après la Côte d’Ivoire, voilà
que la France s’enlise, victime de ses propres turpitudes, sommée de
choisir entre la vérité et ses intérêts stratégiques
à Djibouti.

L’exercice n’est pas
facile pour un Etat qui n’a pas compris que le monde a evolué et qu’il
faille adapter sa politique africaine à la nouvelle donne : la démocratie.

A vouloir protéger
des dictateurs, la France récolte ce qu’elle a semé ::la sournoiserie
et la perfidie d’un régime pour qui l’homme n’est pas une fin en soi
mais un outil que l’on utlise pour assouvir une soif de pouvoir et surtout
d’argent : c’est le cas d’Ismail Omar Guelleh.

La France avait imposé
Gouled, un Président, dont le moins que l’on puisse dire est qu’il
ne brillait ni par sa culture ni par son intelligence mais plutot par sa volonté
d’exploiter les Djiboutiens de souche, qui ne l’ont jamais aimé. Gouled
accoucha de Guelleh. Il s’agissait d’assurer la continuité de l’Etat
au profit de certaines personnes et de leurs acolytes.

Mais surtout la transition
faisait place à un affairisme tous azimuts et à une certaine
volonté de renier la parrain, à savoir la France. Autant Gouled
était reconnaissant vis à vis de la France qui a su, à
chaque occasion, lui trouver un électorat au sein des militaires francais
dans la circonscription d’Ambouli, à l’epoque coloniale, ou qui l’a
installé confortablement pendant plus de deux decennies comme premier
Magistrat de la République

Autant Guelleh, soucieux
de se démarquer de Gouled, fera tout pour essayer de donner l’impression
d’être un nationaliste Somali tel Harbi qui a été malmené
par l’ex puissance coloniale.

La leçon qu’il
faudra titer de tout cela, c’est que Guelleh est en campagne et la tragédie
Borrel est pour lui une aubaine.

Cet ancien policier
subalterne, dont le rôle fut naguère d’espionner les indépendantistes
Djiboutiens au profit de la France, va se faire passer pour une victime du
neo-colonialisme. D’autant plus que cette image de victime de la France lui
est facilitée par une certaine opposition pour qui la fin justifie
tous les moyens.

Faire de l’affaire Borrel
une affaire de politique interieure Djiboutienne, c’est à mon sens
travailler pour la pérennisation de l’ordre dictatorial de Guelleh.
Il serait plus que judicieux de laisser à la justice francaise le soin
de trancher cette affaire qui ne concerne en rien la politique intérieure
djiboutienne.

Que la France perde
à Djibouti l’un de ses citoyens n’a jamais été un problème
pour elle ; son problème cest la volonté sans faille de la veuve
Borrel qui se bat pour connaître la verite sur l’assassinat de son mari.

La meilleure attitude
à tenir face à Guelleh, c’est de s’abstenir de présenter
lors des futures echeances presidentielles, un candidat qui légitimerait
une imposture. Les conditions ne sont pas remplies aujourd’hui pour de vraies
élections transparentes.

Autre conseil qu’il
faille donner à la France, c’est d’entourer cette affaire de toute
la sérennité requise pour que la justice s’exprime librement
et de façon indépendante. A la presse francaise, je conseillerais
d’etre respectueuse des Djiboutiens et de leur pays.

Djibouti n’est la chasse
gardee de personne. C’est un Etat souverain, même s’il est mal dirigé
actuellement. Et c’est mon pays et cette terre est à nous.

K.
R.