07/02/05 (B284) LIBERATION : Plainte contre le Quai d’Orsay.

Les avocats de la veuve
du juge parlent de «pression sur la justice».
Par
Claude GUIBAL et Brigitte VITAL-DURAND

Olivier Morice et Laurent
de Caunes, les deux avocats d’Elisabeth Borrel, la veuve du juge Borrel, vont,
selon nos informations, déposer une plainte pour «pression sur
la justice» à l’encontre du porte-parole du Quai d’Orsay, Hervé
Ladsous.

Cette nouvelle procédure
est la troisième en France depuis la mort de Bernard Borrel, en 1995
à Djibouti. A l’instruction de départ, toujours en cours à
Paris, pour rechercher l’auteur et les causes de l’assassinat du petit juge
français, s’est ajoutée une seconde procédure, à
Versailles, pour «subornation de témoin». La cour d’appel
de Versailles voudrait entendre le chef des services secrets de Djibouti,
Hassan Saïd, comme simple témoin. Demande qui a donc vivement
mécontenté le président Omar Guelleh.

L’annonce par le Quai
d’Orsay, le 29 janvier, qu’il allait transmettre une copie du dossier à
Djibouti ne soulève pas la seule indignation des avocats d’Elisabeth
Borrel. Dans un communiqué, le Syndicat de la magistrature (SM, gauche)
dénonce, ce week-end, «une nouvelle immixtion inadmissible de
l’exécutif dans le cours de l’instruction judiciaire concernant l’assassinat
du juge Bernard Borrel». Le SM a saisi le Conseil supérieur de
la magistrature.

Interrogé, le Premier
ministre djiboutien, Dileita Mohed Dileita, défend la position de son
gouvernement : «On ne peut pas accepter, alors que nous entrons en campagne
présidentielle, que notre Président puisse être bafoué,
qu’il soit accusé d’être un assassin.» Le Premier ministre
est formel : «C’est un dossier clair, le corps a été retrouvé
par les militaires français, amené dans un hôpital français,
autopsié, il y a deux juges importants, le juge Le Loire et le juge
Moracchini, qui sont venus ici et ont donné leurs conclusions. Chaque
fois, on revient sur les choses.» Ces deux juges ont cependant été
dessaisis du dossier en juin 2000. Ils sont aujourd’hui remplacés par
la juge Sophie Clément. Nouvelles expertises à l’appui, son
enquête s’éloigne de la thèse du suicide, autrefois privilégiée.
«Nous voulons réagir, avertit enfin le Premier ministre. Le Président
l’a dit, pourquoi voulez-vous qu’on tue un coopérant ? Si on n’est
pas d’accord avec ses actions, nous le mettons dans l’avion et nous le faisons
partir.»