13/10/05 (B319) La vieille habitude ioguiste (1) de faire de tout mensonge d’État une vérité indiscutée montre l’abîme qui sépare la logique du pouvoir autocratique djiboutien de celle des opinions démocratiques.(Lecteur)

Un débat ? Devant tant de malheur !

Les organes de propagande d’iog – La Nation et l’Adi (2) – préfèront asséner
des vérités indiscutables afin de mieux enfermer ceux qui les discutaient –
RFI, TFI et autres – dans la posture de polémistes au cour de pierre ou de
complices dévoyés à la cause de l’ennemi – la France.

Puisqu’il s’agit de la mort d’un juge que ces deux organes répandraient en
notre nom, les Djiboutiens ont le droit de savoir la vérité et le droit de
ne pas accepter que ces derniers leur refusent les moyens de penser contre
la volonté de leurs gouvernants.

La Nation et l’Adi avaient expliqué : « Ceux qui mettent en cause les
autorités djiboutiennes veulent déstabiliser la RDD ».
Tragique et criminelle manipulation de la part des autorités djiboutiennes.
Entre tragique et grotesque, à quel saint se vouer ?

La nécessité d’une analyse asymétrique s’impose en effet : RFI, TF1, ne
visent pas la population djiboutienne alors qu’IOG s’en fait le porte-parole
? Lui avait-elle délégué ?

Avait-il cette légitimité morale et politique ?
Pas sûr.

Et l’on frôla la caricature quand la RTD, d’une dociliité ioguiste pourtant
toujours prise en défaut, dénonça en les médias français « un formidable
outil de propagande ».

Mr "I", un journaliste djiboutien, déclare que « sans le totalitarisme du
monopole d’État sur la communication audiovisuelle à Djibouti, certains
d’entre-nous ne seraient peut-être jamais partis au loin pour y être réduits
à faire n’importe quoi pour survivre ». Triste constat !

Les professionnels des médias sont nombreux à fuir aujourd’hui Djibouti pour
échapper à l’intolérance et au comportement dictatorial d’IOG. Ces organes sont une arme à sa solde. Mal informée, la population djiboutienne est forcément partisane.

On l’a compris : la bonne propagande de La Nation et de l’Adi, c’est de
savoir appâter les Djiboutiens devant le souvenir de très vieilles histoires
sans images (le colonialisme) et l’imagination de conséquences encore
inimaginables – et forcément dépourvues d’images, qui charirent une émotion
mille fois plus ductile que l’intelligence.

Cette dictature qui n’a plus de bornes aujourd’hui, qui a tout investi, en
particulier les modes de pensée si bien mis en place, dont l’empreinte est
partout, prête à tout s’adjuger.

Mais, en vérité, tout ne lui appartenait-il pas déjà ?
Hors du club ioguiste, point de salut.

Il a su imposer sa philosophie sans avoir dû vraiment la formuler ni même
élaborer de doctrine.
Imagine-t-on ce que les Djiboutiens éprouvent dans la lenteur des journées
qui traînent à n’avoir droit à rien de ce qu’on leur expose comme composant
la vie ?

Ils ne sont pas des despotes qui auraient inventé cette dictature
et éradiqué cette liberté qui leur fait tant défaut, comme à leurs familles
?

Leur existence fonctionne comme un cauchemar vague et sans fin, issu d’une
société sans eux, de plus en plus fondée autour de leur rejet plus ou moins
implicite.

Destins annulés, jeunesse détériorée. Avenir aboli.

Exclus d’une société basée sur un système qui ne fonctionne plus, mais hors
laquelle il n’y a ni salut, ni statut. Du moins dans l’illégalité.

De qui se moque-t-on ?

De ces répudiés, de ces laissés pour compte jetés dans un néant social.
De ces oubliés-là, abandonnés, proscrits. Hors jeu !

Ayant ainsi neutralisé chez RFI, TF1 la possibilité de préjuger, La Nation
et l’Adi vont dénier la possibilité de parler « d’assassinat », réutilisant,
pour conclure, cette étape de leur prise de parole (s’agissant techniquement
d’une péroraison), le recours à la peur et à l’autorité « vise à
déstabiliser la RDD ».

Je constate l’abondance et l’enchevêtrement de procédés manipulatoires que
ces deux organes enchaînent sans répit. Tantôt l’Adi a recours ici à un énoncé de faits qu’elle présente
immédiatement comme non connus du public puisque les médias n’en ont pas
parlé. Plus loin, elle reprend alors, sur le mode de la répétition « suicide» thème déjà utilisé.

Nul besoin pour l’Adi de le déveloper longuement, chacun l’a déjà entendu
des milliers de fois.

Cet amalgame permet d’ouvrir une chaîne de fausses causalités, qui va lier
entre eux les Djiboutiens et les Français (en réalité les commanditaires de
cet assassinat et la justice française).

La situation ainsi manipulée est complètement retournée – le juge Borrel
parce qu’il s’est suicidé, Elisabeth [son épouse, ndlr] n’a plus qu’à s’en
prendre à elle-même.
Le recours à la peur alterné avec la séduction démagogique illustre bien le
message manipulatoire. La Nation, l’Adi auront-elles le courage, le génie de dénoncer tous les
effets pervers de cette dictature ?

Que peuvent les djiboutiens attendre d’elle (dictature) ?
Que peuvent-ils attendre de l’avenir ? Avenir sans projet ?

Un avenir qui leur réserve « chomage », « misère », « rejet » ? Le sentiment d’être inutiles ou, même, parasitaires ?

Des virtuoses de l’exclusion !

Quand tiendront-elles compte, non pour s’en indigner ou s’y opposer, mais
pour en repérer la logique ?

Combien de temps leur faudra-t-il pour s’en éveiller ?

Hélas, à Djibouti on peut-être émigré, immigré sur place ; être par
pauvreté, en exil dans son propre pays. Et cela, encore une fois, La Nation ou l’Adi ne le disent pas !

Ces malheureux Djiboutiens n’étaient pas fabriqués pour devenir des
misérables, des affamés, des victimes, mêmes s’ils y étaient destinés.
Combien sont-ils à déplorer le fait que la citoyenneté ait été vidée de son
contenu ? Reste-t-il un être humain sur la terre qui ait encore l’illusion
du contraire ?

Ils sont rejetés sur les bords de la route, qui ne mène plus aux mêmes
lieux.

Où conduit-elle ? Nul ne sait.

Lutte comparable à celle menée pour sa vie par la chèvre pathétique de
Monsieur Seguin ?

Il est certes question, ici encore, d’un côté de ne pas périr, de l’autre,
d’assouvir un appétit inextinguible. A comparer nos situations, on peut se demander quelle devrait être la
réaction de l’opinion occidentale face aux discours de leurs politiciens sur« les droits de l’Homme, la démocratie et la liberté ». Quelle confiance
leur accorder quand les djiboutiens les voient pour des raisons d’intérêts
économiques, géostratégiques, collaborer avec les régimes les ignobles, les
plus terroristes et les plus corrompus ?

On soutient des dictatures qui étouffent leurs peuples et les oppositions
sous une répression quotidienne.

Dire de si belles choses, en faire ou en laisser faire de si noires.

On le savait, on le disait, on le voit confirmé tous les jours : ce sont les
intérêts géostratégiques qui ont un prix, le droit d’un peuple, son choix et
sa liberté seront sacrifiés sur l’autel de l’intérêt ou pour parler comme
l’ancien ministre de l’Intérieur, Pasqua, au nom de la raison supérieure de
l’État.

La notion de démocratie et l’idéal de liberté sont, dans la pratique, vidés
de leur contenu. A qui donc faire confiance ?

Imposer un tel ordre dictatorial à Djibouti et continuer à user des notions
de « droits de l’Homme » et « démocratie » c’est faire mentir les mots et
dévoiler les hypocrisies. Il faut faire le compte aujourd’hui de l’horreur provoquée par l’endettement de Djibouti et par l’asservissement général qui en découle et il faut, de la
même façon, prendre la mesure de l’écart qui existe entre les beaux discours
parsemés de références à la grandeur de l’islam et les pratiques financières
les plus troubles et les moins avouables.

L’hypocrisie est totale. L’air est à la démission.

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(1) [Ndlr] "Ioguiste", de la politique de "IOG", celui dont certains ne
prononcent plus le nom : Ismaël Omar Guelleh, président de la République de
Djibouti.

(2) [Ndlr] La Nation, bi-hebdomadaire gouvernemental ; ADI, Agence
djiboutienne d’information.