17/10/05 (B320) LDDH – Note d’information sur les harcèlements quotidiens à l’encontre des travailleurs et des syndicalistes du Port
![]() Le Président |
NOTE DINFORMATION SUR LA REPRESSION |
I) – Rappel Chronologique
– Le 17 mars 2005, suite au refus de la Direction de se conformer aux accords collectifs du 29 mars 2004, le syndicat UTP fait appel aux services du Représentant du Gouvernement pour la conciliation ;
– Le 24 mars 2005 le syndicat UTP a saisi linspection de travail qui, dans ses sentences, a confirmé les irrégularités dénoncées par UTP et a demandé aux autorités du port dannuler des décisions entachées dillégalités. La conclusion de linspection de travail fut classée sans suite par les autorités portuaires ;
– Le 30 juin 2005 le syndicat UTP a alerté les plus hautes personnalités de lEtat (les autorités de port et des zones franches ; le ministre de léquipement et de transport, le ministre de lemploi) sur la dégradation de climat social : découragements, craintes et méfiances des employés ;
– Le 27 août 2005le syndicat UTP a saisi lautorité suprême du Pays son excellence Monsieur le Président de la République S/C Premier Ministre ;
– Le 10 septembre 2005 le syndicat UTP, à lissue dune assemblée générale a lancé un préavis de grève. Ultime recours pour contraindre la direction à accepter louverture de dialogue sociale ;
– Le 14 septembre 2005, déclenchement dun arrêt de travail pacifique. Les plus hautes autorités de lEtat dont son excellence le Premier Ministre et Chef du Gouvernement par intérim et le ministre de lemploi ont demandé aux autorités portuaires daccepter louverture du dialogue social sous légide de ministère de lEmploi. La grève a aussitôt été suspendue ;
– Le17 septembre 2005 à la demande des autorités du port, un délai dune semaine pour faire des propositions concrètes a été accepté ;
– Le 24 septembre 2005 le directeur général du port a brutalement décidé de boycotter la médiation du ministère de lEmploi et ce sans tenir compte des engagements des autorités portuaires du 14 septembre. Immédiatement, 36 membres de lUTP se sont vus retirer leur carte daccès au port et ont été licenciés sur place ;
– Le 24 septembre 2005, au cours dune réunion extraordinaire qui sest tenue au siège de lUTP, les travailleurs en colère et choqués suite aux licenciements expéditifs et abusifs, ont appelé à larrêt du travail à partir de 22h00 ;
– Le 25 septembre à, 00 h 30 les Forces de Police en présence du Procureur de la République ont embarqué manu militari les syndicalistes et les travailleurs qui observaient pacifiquement sur leur lieu du travail une grève entamée suite
1. aux agressions et à la rupture de la trêve du 17 septembre 2005
2. aux décisions unilatérales, arbitraires,
3. obstructions des activités syndicales.
– Toutes ces répressions ont été provoquées par le directeur du port et ensuite approuvées par le Président des autorités du port ;
– .Le 8 octobre 2005 Le Secrétaire Général de lUTP a écrit une lettre au Président de la République et Chef du Gouvernement, en linformant que la Direction du Port a arbitrairement licencié 36 personnes (en laissant 36 familles sans revenu) et continue dharceler les travailleurs (120 agents furent sévèrement sanctionnés : dernier avertissement avant licenciement).
– Dans cette lettre il est demandé à son Excellence de bien vouloir user de son autorité suprême pour trouver une solution à la situation de crise que traverse le Port depuis le 24 septembre 2005, depuis que la Direction du port a décidé de boycotter la médiation du ministère de lEmploi.
II) – Sur la forme.
Rappelant que par Communiqué du 1er octobre 2005 lUnion des Travailleurs du Port avait clairement positionné ses revendications en dénonçant toutes exploitations à « des fins politiciennes « notamment des Partis Politiques de lOpposition, et en lançant un Appel « aux autorités compétentes de lEtat, pour que soient reconsidérées les sanctions sévères prises à lencontre des membres de lUTP et dautres travailleurs suite aux événements du 14 septembre 2005..
Dans ce même Communiqué lUTP demande louverture dune enquête afin de déterminer lexactitude matérielle des accusations portées par les autorités portuaires à lencontre de lUTP ;
III) Sur le Fond
Constatant que le Représentant du Gouvernement chargé de veiller à lapplication des normes législatives et réglementaires ( Décret n°2004-0178; ne remplit pas son rôle
Rappelant que la Fédération Internationale par informations on-line a :
1. sous la signature de son Secrétaire Général Guy Ryder a écrit une lettre du 27 septembre 2005 au Président djiboutien Ismaël Omar Guelleh pour manifester sa profonde inquiétude ;
2. prévenu, quen absence dune réaction positive du Président de la République de Djibouti, la CISL porterait plainte auprès de lOrganisation Internationale du Travail pour violation de la Convention n°87 sur la liberté syndicale et de la Convention n°98 sur le droit à la négociation collective, toutes deux ratifiées par Djibouti ;
3. rappelé que le Secrétaire de la Section des dockers de lIFT , M. Frank Leys avait déclaré : « les employeurs préfèrent envenimer les choses que dialoguer. Les droits humains et syndicaux – dont ceux inscrits dans les Conventions de lOIT qui ont été ratifiées par Djibouti ne sont pas que des simples bouts de papier. Ces syndicalistes doivent être libérés, réintégrés et autorisés à exprimer leurs revendications »
IV) – Contexte général
Deux faits démontrent une défaillance de lEtat de droit :
1) labsence dun véritable dialogue entre la puissance publique et les syndicats,
2) le refus dune instance subordonnée de se soumettre aux décisions dune instance supérieure.
Sur le premier point, labsence de dialogue entre les différents partenaires sociaux impliqués dans la crise que traverse le Port de Djibouti témoigne des difficultés que connaissent les syndicats dans leur reconnaissance de la part de lEtat djiboutien et de la société privée en charge de la gestion du Port.
Djibouti a un lourd passif en matière de déni du droit syndical, ce qui a souvent valu à la République de Djibouti de multiples condamnations dans les instances internationales, notamment au sein de lOrganisation Internationale du Travail. La répression que subit aujourdhui lUnion des Travailleurs du Port nen est donc que la malheureuse illustration.
A ce déni sajoute le flou juridique relatif à lactuel statut du Port : bien public concédé en gestion privée.
Dans des conditions jamais rendues publiques de fait, en raison de ces conditions contractuelles opaques et imprécises entre le DPI (société propriétaire) et le GGR (Groupe de Gestion Responsable) il savère que le sous-traitant (GGR) effectue les véritables services de gestion normalement dévolus au DPI. Il en découle une double rémunération des services supportée par le Port de Djibouti, donc le contribuable djiboutien, qui paye ainsi deux fois la même prestation. Surcoût de frais dexploitation sélevant en 2002 à 368.678.438 FDJ.
Sur le second point, le fait que la Direction du Port ait refusé de se plier aux directives du ministère djiboutien de lEmploi appelant au dialogue et au respect de la règle de droit dans lintérêt de ce service public, montre clairement que le flou juridique sur le statut du Port profite en fait à la société chargée de sa gestion privée.
A tel point que, dans une note de service n°607/DP en date du 24 septembre 2005, la société gestionnaire Dubaï Port International (DPI) sautorise à porter à la connaissance de lensemble du Personnel du Port que « la retenue sur salaire au profit du syndicat est supprimée ». Décision unilatérale constituant une violation des textes en vigueur.
En lespèce, comme le regrette le syndicat des travailleurs du Port, cest ce flou quant au véritable statut du Port qui explique la non application des rares textes de loi en vigueur et labsence dun Règlement intérieur actualisé uniformément applicable à tous les travailleurs du Port.
Lon est donc bel et bien dans une situation de non-droit dans laquelle il est légitime de se demander à qui appartient le Port de Djibouti : aux citoyens djiboutiens ou seulement à quelques individus au-dessus des lois ?
La réponse à cette question conditionne le sort réservé aux travailleurs dans leur ensemble, au droit syndical dune manière générale et à la crédibilité de cet outil de développement quest le Port de Djibouti en particulier.
PAR CES MOTIFS
La Ligue Djiboutienne des Droits Humains (LDDH) Invite instamment le Gouvernement djiboutien à
1. rendre public le contrat de concession du Port,
2. reconnaître la liberté syndicale,
3. mettre en place un véritable cadre juridique réglementant le travail au sein du Port ;
La Ligue Djiboutienne des Droits Humains (LDDH) demande aux instances internationales de condamner avec fermeté :
1. les entraves au droit syndical en République de Djibouti dune manière générale et au sein du Port en particulier ;
2. de porter plainte contre de tels abus afin de sanctionner le régime djiboutien coupable de tels abus ;
3. dencourager les syndicats djiboutiens dans leurs droits inaliénables à défendre les intérêts des travailleurs djiboutiens.
M. NOEL ABDI Jean-Paul