18/10/05 (B320) CISL : Extrait du rapport 2004 sur les violations des Droits syndicaux (Djibouti) : une longue énumération de toutes les violations, de tous les harcèlements et de toutes les injustices et illégalités commises par le régime de Guelleh.

DJIBOUTI
Mis à l’écart du marché du travail, privés de salaire, arrêtés sous de faux prétextes, les
syndicalistes indépendants vivent dans la peur et la précarité. Le projet de nouveau Code du
travail, élaboré unilatéralement par le gouvernement, risque de rendre encore plus difficile
l’exercice de leurs activités.

DROITS SYNDICAUX DANS LA LÉGISLATION

Le projet de nouveau Code du travail a été adopté par le Conseil des ministres en 2004 et doit encore être approuvé par l’Assemblée
parlementaire. S’il passe cette ultime étape, il entrera en application en 2005 et constituera une nette régression sur le plan social par
rapport au Code du travail du 15 décembre 1952.

Ce texte remet en cause les droits fondamentaux de l’OIT, notamment la liberté
syndicale, la négociation collective et le droit à l’organisation.
Nécessité d’une autorisation gouvernementale : La loi actuelle reconnaît le droit des travailleurs à adhérer à un syndicat mais
impose des restrictions à ce droit. Un syndicat ne peut être constitué que s’il dispose de l’autorisation préalable du gouvernement.

Seuls
les ressortissants de Djibouti peuvent détenir une fonction syndicale. Avec le nouveau Code du travail, il faudra, pour créer un syndicat,
l’autorisation du ministère de l’Intérieur, du ministère de l’Emploi, de l’inspection du travail, du ministère de la Justice et du Procureur
de la République. Et si ces ministères demandent la dissolution du syndicat, le Procureur de la République pourra, sur simple décision
administrative, dissoudre le syndicat.
Restrictions au droit de grève dans le secteur public : Ici aussi, alors que le droit de grève est reconnu, il est restreint.

Les
autorités jouissent d’amples pouvoirs qui leur permettent de réquisitionner des fonctionnaires en grève; un syndicat qui prévoit de faire
grève doit en informer le ministère de l’Intérieur 48 heures à l’avance.

DROITS SYNDICAUX DANS LA PRATIQUE

Dans la pratique, les droits syndicaux ne sont quasiment pas respectés.

Les actions syndicales ont été réprimées à maintes reprises
depuis le licenciement par le gouvernement, en 1995, de neuf dirigeants de l’Union djiboutienne du travail (UDT), affiliée de la CISL, et
de l’Union générale des travailleurs de Djibouti (UGTD), en représailles à une grève de protestation contre des mesures d’ajustement
structurel. Depuis lors, la plupart de ces syndicalistes n’ont plus été payés – certains ont d’ailleurs émigré – et le gouvernement a
activement soutenu des groupes syndicaux non représentatifs.

Le gouvernement avait promis, à plusieurs reprises, une amélioration de la
situation,
notamment avec l’autorisation de la tenue des congrès de l’UDT et de l’UGTD, mais jusqu’à présent ces promesses sont restées
lettre morte.
Le gouvernement s’efforce de bloquer chaque aspect de l’activité des syndicats indépendants. Les dirigeants syndicaux sont harcelés sans
cesse, notamment en étant licenciés de leur poste, et des manifestations de protestation se sont heurtées à la violence policière.

Le
gouvernement a ignoré les propositions réitérées de dialogue et de conciliation
, et a constamment manqué à ses promesses de mettre
pleinement en oeuvre les recommandations de l’OIT sur les libertés syndicales. En 2004, la décision de mettre sur pied une organisation
tripartite pour discuter du nouveau Code du travail a poussé le gouvernement à faire passer le texte au « forcing » au sein du Conseil des
ministres.

VIOLATIONS EN 2004

L’attitude du gouvernement envers l’UDT et l’UGTD au cours de l’année a été caractérisée par le harcèlement, les intimidations et le
refus d’entreprendre d’authentiques consultations et négociations avec les dirigeants syndicaux élus démocratiquement.

DES VIOLATIONS DES DROITS SYNDICAUX 2 0 0 5

Discrimination en raison d’activités syndicales :

En janvier 2004, Abdoulkalek Waberi Ouffaneh, secrétaire général du
Syndicat du personnel du bâtiment et des travaux publics (SP-BTP), a été transféré à un autre emploi au sein de la Direction de la
formation, de la communication et de la documentation (DFDC) du ministère de l’Habitat, de l’Urbanisme, de l’Environnement et de
l’Aménagement du Territoire (MHUEAT). Le MHUEAT a justifié cette mutation en arguant de l’expertise technique d’Abdoulkalek
Waberi Ouffaneh.

Le fait que ce dernier ne possède aucune expertise technique en électricité du bâtiment prouve que cette mutation
était une mesure disciplinaire. Sa mutation a également coïncidé avec la suspension du paiement de son salaire.
Licenciements abusifs : En février et mars 2004, deux délégués syndicaux du Syndicat du personnel de l’hôtellerie des forces
françaises stationnées à Djibouti (SPH-FFDJ) ont été licenciés « pour raison économique ».

Les licenciements d’Abdi Moussa Ahmed,
secrétaire à la coordination, et d’Abdi Bileh Darar, délégué du personnel, font suite à ceux de trois autres membres du syndicat en 2003
pour les mêmes raisons. En réalité, ces licenciements constituent des mesures répressives liées à leurs activités syndicales. La direction
qui n’est pas déclarée en faillite et qui n’a introduit aucune mesure légale requise en cette matière n’a en effet licencié que ces
syndicalistes.

Le gouvernement cherche à manipuler une réunion avec l’OIT :

Le 13 mai, une réunion devait se tenir dans les locaux du
ministère de l’Emploi et de la Solidarité Nationale entre deux experts du BIT et des délégués des centrales UDT et UGTD. A 11 heures,
des prétendus membres de l’UGTD, et quatre délégués de l’UDT qui se trouvaient déjà dans la salle ont été rejoints par Ali Yacoub, le
conseiller du ministre et secrétaire général du ministère par intérim.

D’un ton menaçant, ce dernier a ordonné aux délégués de l’UDT de
quitter les lieux.
Mohamed Ahmed Mohamed, Mohamed Ahmed Abdillahi, Farah Abdillahi Miguil et Souleiman Ahmed Mohamed ont
refusé de répondre à la provocation, mais en vain. Alors que les deux experts du BIT, Telou Keneado et Ngandu Mukendi, arrivaient sur
les lieux, le représentant du ministère a ordonné à six policiers armés d’expulser les délégués de l’UDT.

Le BIT a décidé d’annuler la
réunion.

Le gouvernement continue ses manipulations : Au cours de l’année, l’UDT a également appris que quatre courriers portant
quatre signatures différentes avaient été envoyées au BIT en son nom.
Tentatives de déstabilisation du syndicat du port : La direction du port de Djibouti a fait obstacle à l’organisation des
élections des délégués du personnel par le Syndicat du personnel du port (SPP), organe le plus représentatif de l’établissement.

Elle a
aussi remis en cause le système de perception des cotisations syndicales alors que celles-ci sont librement consenties par les 800
travailleurs, membres du syndicat.
Harcèlement persistant : Depuis cinq ans, Cher Hared Hassan, secrétaire aux relations internationales de l’UDT et secrétaire
général du syndicat des postiers de Djibouti (SP) est la victime d’actes répétés de harcèlement.

Après avoir reçu une note de suspension
de salaire pour « refus de coopérer » en 1999, puis une note de suspension de fonction en 2002, il s’est vu, en avril 2004, purement et
simplement rayé des listes de son entreprise suite à « la disparition » de son dossier au sein du service des ressources humaines.

Licenciement d’un syndicaliste pour allégations mensongères :

En juillet 2004, Ahmed Mohamed Djilani, trésorier adjoint
du Syndicat du personnel du service maritime et de transit (SP-MTS), un affilié de l’UDT, a été licencié sous le prétexte d’avoir volé des
sacs à grain. La direction n’a pu fournir, au travailleur qui le lui demandait, aucune preuve étayant ces accusations. Ahmed Mohamed
Djilani a également fait remarquer qu’aucune plainte n’avait été déposée à la police de Djibouti.

Ce licenciement constitue clairement
une mesure répressive à l’encontre de ses activités syndicales.