29/01/06 (B335-A) Les USA complices de Guelleh dans le processus de la régionalisation ? (Militant de l’ARD à Tadjourah)

TADJOURAH : LES USA COMPLICES
DE LA COMEDIE DE LA DECENTRALISATION ?

La RTD de Guelleh s’en est donné à cœur joie, en cette période de campagne pour de pseudo élections régionales : l’ambassadrice de USA, accompagnée de la directrice de l’USAID, s’est déplacée jeudi dernier à Tadjourah à l’occasion de la restauration d’une école publique financée par son pays.

Les deux représentantes de la première puissance mondiale en ont profité pour procéder à la distribution d’une importante quantité de matériels de voirie : brouettes, pelles et pioches par ordre alphabétique.

On savait que les USA n’avait rien compris à notre pays depuis leur arrivée en 2002. On comprend aujourd’hui qu’ils cautionnent (en toute naïveté ?) la vision clanique de la Décentralisation que le RPP prétend imposer aux Djiboutiens.

On savait déjà que, depuis leur installation au Camp Lemonier, les centaines d’emplois créées par la base militaire américaine n’ont profité qu’aux agences d’intérim crées par le régime et recrutant leur main-d’oeuvre peu qualifiée sur la seule base tribale.

Conséquence : 1 emploi sur 10 n’a échu qu’aux pauvres djiboutiens non pistonnés tribalement ou politiquement.

Les Djiboutiens regrettent fortement que les Etats-Unis d’Amérique n’aient à peu près rien compris à leurs attentes en matière de droits de l’homme : la superpuissance est uniquement investie dans la géostratégie de la région et ses problèmes, et elle est par conséquent trop affairée à rechercher des forces terroristes islamistes non encore visibles à Djibouti.

Ce qui est grave, c’est que les Américains viennent de se compromettre cette fois-ci en sponsorisant à leur corps défendant une parodie de développement décentralisée, basée sur la mendicité.

Ainsi, jeudi dernier, pays s’est ridiculisé en distribuant dans la ville abandonnée de Tadjourah des pelles, pioches et brouettes aux malheureux habitants de cette ville.

Le scandale, ce n’est pas que cette distribution pallie un désengagement flagrant des pouvoirs publics djiboutiens en ce qui concerne les politiques de développement régional : ces pelles, pioches et brouettes si généreusement offertes doivent être comparées aux unités industrielles récemment créées dans tel autre district du Sud-Est, ou encore à l’état d’abandon dans lequel le régime a maintenu l’usine d’eau minérale de Tadj ourah, avant de l’offrir à des appétits privés et partisans sur la même base opaque qui caractérise la gestion des deniers publics.

Le scandale, ce n’est pas non plus que les autorités traditionnelles de Tadjourah aient accepté de jouer le rôle de subdivision de la Voirie : elles se sont compromises dans de besognes autrement plus basses que celle-ci. A tel point qu’elles sont totalement et pour longtemps discréditées pour avoir même cautionné l’arrestation abusive en pleine nuit de militantes de l’opposition, lors de la présidentielle d’avril 2005.

Non, le scandale c’est que cette distribution de ce matériel de voirie offert par les Etats-Unis d’Amérique ait eu lieu en fonction de l’appartenance aux différents quartiers de la ville de Tadjourah.

Or, nul n’ignore que lesdits quartiers n’ont aucune réalité juridique et leurs chefs ne sont pas non plus rétribués par le ministère de l’Intérieur. C’est simple : la seule réalité de ces quartiers, c’est qu’ils représentent un certain peuplement régional et clanique, tenant à l’historique du peuplement de cette ville plusieurs fois centenaire et qui est, rappelons-le, la plus ancienne du pays. Mode de peuplement clanique que l’on retrouve également à l’oeuvre à Djibouti-ville : nu l n’a le monopole du regroupement sur une base traditionnelle.

Une telle distribution de l’aide étrangère, pour la première fois depuis l’Indépendance, sur la base de l’appartenance à un quartier, donc à une zone géographique et à un clan spécifique, a conduit les habitants de Tadjourah à se poser une question : pourquoi maintenant ? Car, sommés d’exhiber leur quartier d’origine, les « heureux » récipiendaires de cette générosité américaine étaient sommés de brandir une pancarte sur laquelle était inscrit le nom de leur quartier : Fia, Ellamo, Gablasan, Marsaki, etc. Les absents m’excuseront de ne pas les exhiber ici.

A l’heure où approche l’échéance de prétendues élections régionales, cette distribution en fonction des clans et des zones montre clairement que les Etats-Unis d’Amérique ont été manipulés par un régime qui veut imposer une vision tribaliste de la Décentralisation.

Pour qui aurait la mémoire courte, un simple rappel historique s’impose. Après avoir obtenu la capitulation des Agaba en 1994, Ismael Omar aurait dit à ses cousins : « La guerre entre Afars et Issas est dorénavant terminée. Laissez-moi désormais organiser le conflit entre Afars et Afars ». Ce qui en dit long sur la perception de la guerre et de la paix et explique l’acharnement qu’il met à violer l’accord de paix du 12 mai 2001.

A voir la gesticulation des prétendus concurrents alignés par le régime pour ces élections (dont deux frères, l’un du RPP et l’autre du FRUD Agaba, et même et surtout ceux qui se disent indépendants), force est de reconnaître qu’il n’a pas totalement échoué dans ce « diviser pour régner ». D’ailleurs, un proverbe afar ne dit-il pas que « les esclaves se battent pour du bois qu’ils rapporteront à leur maître commun » ? Pour s’étriper à ce point en quête d’un siège au sein d’un conseil régional sans attribution ni budget, il faut vraiment avoir une disposition d’esclave.

De plus, ces « élus » du peuple seront les seuls au monde à n’avoir aucune source de revenu garantissant leur indépendance et les mettant à l’abri du besoin et de la corruption. Ces marionnettes d’un théâtre d’Etat seront peu applaudies par un peuple qu’ils croient berner au bénéfice d’un régime foncièrement antidémocratique : comment peut-on parler de démocratie locale quand le droit de librement choisir ses représentants n’existe pas au niveau national et quand les représentants des travailleurs sont à ce point réprimés ?

Il est donc regrettable que les USA aient eu tout faux en donnant l’impression d’une complicité avec un régime pour lequel la décentralisation signifie surtout zizanie (fitna) et désengagement : les seules attributions qui ne seront pas déniées aux futurs conseils régionaux, ce sont celles de la réhabilitation des pistes et de la Voirie, qu’ils ne pourront pas assurer faute d’un budget clairement défini.

Les Etats-Unis d’Amérique auront donc tout faux toutes les fois qu’ils chercheront à s’impliquer dans un pseudo développement voulu par un régime clanique et divisionniste.

Mieux vaut ne pas s’impliquer que d’agir dans un contexte foncièrement injuste. Car ce n’est pas ce placebo qui prémunira ce régime contre un inévitable soulèvement populaire.

Et si les USA « s’adaptent » à cette dictature en crédibilisant Guelleh et sa clique, nous serions au regret de leur dire tout simplement : USA GO HOME !

Notre propre Liberté nous préoccupe avant celle que le monde libre prétend militairement défendre et garantir chez nous en soutenant la dictature du RPP.

Un militant ARD de Tadjourah