02/07/06 (B357-A) Djibouti – La pire des corruptions n’est pas celle qui brave les lois mais celle qui s’en fait à elle-même, à sa mesure et devient ainsi tyrannie. (Justicia)

Le gruyère vous connaissez ! C’est un fromage inégalable avec cette maturation d’une année en grotte naturelle qui lui donne un côté rustique et un goût plus profond, parfaits pour les plats chaleureux et réconfortants.

Mais il existe un autre gruyère auquel je pense et fais référence.


Ce « fromage » là est bien particulier car simplement un symbole, une allégorie des aides internationales qui affluent à Djibouti et de ce qu’il en est fait sous le régime d’Ismaïl Omar Guelleh..

La caractéristique de ce « gruyère » est qu’il dispose d’une croûte qui est reconnaissable, très épaisse, aux couleurs des pays « donateurs » occidentaux et en premier lieu à celles de la France. Quant à la pâte, celle ci révèle de petits cristaux d’or qui s’évaporent sous le chaud soleil de Djibouti et signent ainsi les mauvaises habitudes de la corruption sous toutes ses formes ; mauvaises habitudes que l’on tente de masquer, vieillies lentement et longuement.

En bouche, cette fine cristallisation stimule le palais (de l’Escale et d’Haramous…évidemment), les saveurs s’affirment avec une belle intensité : des notes de délicates noix de platine, de parfums de diamants les plus fins, de bois précieux, de cuir Louis Vuitton…alors que s’égrènent les heures et les jours des « mensonges d’Etat » au rythme des montres en or de chez Cartier, Rolex et autre Mont Blanc.

Mais peu importent les mots car c’est là le principal plaisir du maître chantage, de « recevoir sans réaliser » en contrepartie – surtout en gros volumes – qui compte pour Ismaïl Omar Guelleh, ses acolytes et auxiliaires, y compris de justice aux grandes « zoreilles » mais aux méninges atrophiées !

C’est ainsi que depuis plus de 7 années, le cumul des aides internationales attribuées au Palais de l’Escale, aux hautes sphères des ministères et des institutions de l’Etat est devenu un énorme gruyère qui s’est multiplié par un coefficient supérieur à 4.

Enorme gruyère d’où s’échappent – en permanence et par les trous – des odeurs nauséabondes de corruptions mais aussi toutes les informations de première importance ; y compris celles les plus jalousement gardées. Dont celles qui concernent l’affaire de l’assassinat du juge Bernard Borrel, dans la nuit du 18 au 19 octobre 1995 à quelques 80 km de la capitale et qui laisse traîner bien plus que des suspicions de responsabilités à l’égard d’Ismaïl Omar comme « donneur d’ordres » dans ce dossier aux multiples facettes et méandres pas forcément politiques mais d’intérêts privés.

Pourtant et malgré les honneurs, titres pompeux, privilèges surdimensionnés et salaires distribués pour acheter les consciences et les faire taire – ça et là et qui coûtent fort cher à l’Etat (mais après tout ce n’est pas lui qui paie) – les méthodes de corruption employées par Ismaïl Omar Guelleh ont des effets pervers qu’il ne peut maîtriser.

Si la corruption des idées et des consciences dont il fait large usage est quelque peu primitive, elle est – à ce titre – d’une dangerosité extrême pour l’avenir de son régime tyrannique qui ne s’appuie que sur l’artificiel, le mensonge, les complicités et les compromissions du moment. Au fil des années, son régime des pires excès et de l’irrationnel en est arrivé à n’être soutenu – quasi exclusivement – que par des serviteurs relégués au rang « d’animaux domestiques » – avec renouvellement périodique du cheptel – auxquels Ismaïl Omar a appris à se tenir au garde à vous, les mains tendus sur la couture du pantalon, les paumes ouvertes vers son Excellentissime avec braiements à l’unisson à sa gloire.

D’autre part, chacun vous le dira : la difficulté pour la nomenklatura qui entoure Ismaïl Omar ce n’est pas de garder un secret, mais de garder secret le fait qu’elle garde un secret…. Tout se sait à Djibouti ; il suffit pour s’en convaincre de croiser un ami que l’on sait être proche du pouvoir d’IOG et de lui confier un soit disant secret, du genre : « Je te l’ai dit par ce que tu es un ami mais tu n’en parles à personne ! Je compte sur toi ! ».

Quelques mots prononcés sur le ton de la conspiration et de l’intrigue en insistant sur le fait que c’est un «secret d’Etat»… Une heure plus tard la moitié de la capitale aura pris connaissance dudit secret qui vous reviendra aux oreilles, amplifié voire déformé et ce durant une semaine.

En fait, le secret c’est qu’il n’y a pas de secret à Djibouti et qu’il n’y en a jamais eu : ce qui arrange bien les « affaires » de tous les services de renseignements militaires en particulier.

Ce que l’on appelle l’affaire Borrel et les conditions de la mort du juge français – trop fouineur au goût d’IOG – est connue dans le détail et depuis octobre 1995 par la nomenklatura locale qui d’évidence ne souhaite pas perdre tous ses privilèges – voire perdre la vie …par accident, rupture d’anévrisme ou crise cardiaque …- en allant témoigner devant la Juge Sophie Clément. Pour ne prendre qu’un exemple de ce que nous affirmons, imaginez qu’un Moumin Bahdon aille se confier à la Justice française … Qu’il ait ce courage qu’on ne lui connait pas de dire la vérité. Impensable et pourtant il sait PARFAITEMENT ce qu’il s’est passé dans la nuit du 18 et 19 juin 1995….

« Il n’est point de secret que le temps ne révèle » Racine.

Bon nombre de « secrets » s’échappent tout de même par les trous du grand gruyère ismaïlien allant jusqu’à percer la chape du silence posée sur le pays où « l’Ordre…des désordres doit absolument régner », alors que les défections se font de plus en plus nombreuses au sein des institutions ( pour le moins ce qu’il en reste) comme aux échelons subalternes. Entre autres, dans la prison de Gabode.

Le pavé dans la marre des « mauvaises habitudes », des falsifications, des mensonges entretenus et cautionnés de « l’étranger » !

L’émission 90 minutes de Canal + – en date du 28 juin de cette année – a mis en évidence de nouveaux éléments qui génèrent des rebondissements et non des moindres dans l’affaire de l’assassinat du juge Bernard Borrel.

Trois éléments nouveaux et d’importance sont posés sur la table de la juge Sophie Clément qui a en charge ce dossier. En premier lieu, il convient de citer le témoignage déterminant d’un gardien de prison de l’époque, Ahmed R., réfugié depuis peu en Belgique qui – à lui seul – taille en pièces l’affirmation mensongère du pouvoir Guelleh jurant par tous les saints que « Nul ne peut s’échapper de la prison de Gabode !!! ».

L’ancien gardien de prison – qui a déposé en toute liberté devant la Juge Sophie Clément – aurait déclaré sous serment que le 18 octobre 1995 à 6 heures, au matin de la mort du juge Borrel, il a pris son poste de travail. Il avait notamment la charge de surveiller «l’unité criminelle» des «12 cellules» où était détenu un condamné à perpétuité pour le moins coupable d’un attentat terroriste perpétré à Djibouti ayant fait de nombreuses victimes : le dénommé Adouani.

Comme le souligne dans son reportage Bernard Nicolas de Canal +, Ahmed R. raconte non sans détails comment, vers minuit, son supérieur direct s’est présenté accompagné de deux responsables de la gendarmerie et a ouvert d’autorité la cellule d’Adouani. Les hommes l’en ont extrait avec ménagement (ce qui n’est pas coutume pour un condamné …) et l’ont emmené hors de l’établissement pénitentiaire en voiture. Ce n’est que le 19 octobre, vers 23 heures, qu’il a déclaré avoir revu le condamné regagnant sa cellule.

Une fois encore, le Palais de l’Escale est pris en flagrant délit de mensonge car les déclarations de l’ex gardien de prison corroborent le contenu de la déposition de Mohamed Saleh Alhoumékani faite devant les justices belges et françaises affirmant que ledit Adouani – censé être emprisonné – était en fait présent sur les marches du Palais de l’Escale le 19 octobre 1995 au matin lorsque le Colonel Mahdi rassurait Ismaïl Omar Guelleh en lui déclarant que le cas du petit juge « fouineur » était réglé définitivement.

Cette pratique consistant à utiliser « les services » des condamnés et emprisonnés pour des délits graves en les extrayant momentanément de leur cellule est courante à Djibouti. Bien qu’elle se fasse discrètement, il se trouvera toujours un témoin pour contrecarrer – parfois des années plus tard – les affirmations d’un régime politique sans foi ni loi.

Le second élément nouveau dans cette affaire et qui devrait permettre à la justice française d’éclaircir les nombreux « mystères » qui planent autour de ce sulfureux dossier, est la découverte de trois empreintes d’ADN relevées sur le short du juge Borrel par le Dr Olivier Pascal, pionnier en matière de recherche sur les macromolécules biologiques en France et expert près de la Cour de cassation.

Dans son rapport daté du 4 avril 2006, l’équipe du Docteur Olivier Pascal – aux compétences mondialement reconnues dans ce secteur d’investigations scientifiques – a mis en évidence la présence de deux ADN « étrangers » dont l’une des traces serait une « empreinte forte » signifiant que l’homme qui fut au contact du juge Borrel – au point d’y laisser sa trace d’ADN – l’a été durant un laps de temps important. Ceci confirmerait bien qu’il y ait eu déplacement et transport du corps du défunt avant son immolation – avec deux carburants différents !!! – au bas de la falaise.

Une fois encore, les nouveaux éléments apportées au dossier sur les conditions de la « disparition » du Juge Bernard Borrel mettent à mal la thèse d’un hypothétique suicide par immolation du magistrat français. Thèse soutenue mordicus par le pouvoir du Palais de l’Escale et ses « avocats » qui n’a trompé que ceux qui voulaient l’être et ce depuis des années ; y compris et surtout hélas au sein d’une supposée magistrature « étrangère ».

Ne vient-il pas un temps dans la vie où le devoir pour une « certaine » magistrature est le plaisir de faire justice équitable, plutôt que de faire du plaisir …un devoir ?

Face à ces nouveaux éléments apportés au dossier et confirmant les falsifications d’Ismaïl Omar Guelleh, chacun s’attendait à ce que le Palais de l’Escale prenne quelques jours de recul aux fins d’analyser la situation et de préparer une « réaction officielle ». Point de cela !

L’angoisse est une réaction inévitable de la tyrannie face à la vérité qui l’enserre et qui abat ses cartes, une à une.

L’incommunicabilité du Palais de l’Escale en arrive presque à être légendaire. Ce n’est pas qu’il ne communique pas assez, c’est qu’il communique trop et très mal ; et qu’il n’est surtout que réactif, a fortiori sur le dossier de l’assassinat du Juge Bernard Borrrel.

En l’espèce, le contenu de la réplique du procureur Djama Souleiman parue dans l’ADI – face aux nouveaux éléments – confirme bien que ses explications et ses intransigeances relèvent, une fois encore, d’une mauvaise foi et d’une piètre conscience. Cette réaction mal à propos et insultant pour la magistrature française ayant en charge ce dossier témoigne – une nouvelle fois – de la peur qui s’est saisie d’Ismaïl Omar Guelleh – et de ses « amis » et cautions… en Occident – depuis qu’Elisabeth Borrel a eu ce courage d’épouse, de mère et de femme de faire éclater la vérité sur les conditions de la mort de son époux.

En « Estimant que la « prétendue » découverte d’empreintes génétiques inconnues sur le short du magistrat français retrouvé mort en 1995 à Djibouti constituerait un « non-événement » et que cela ne changera en rien la position de Djibouti, selon laquelle le juge Borrel s’est donné la mort » et « qu’il n’est plus question que la République de Djibouti accueille une commission rogatoire de la justice française.  » le supposé procureur général de Djibouti Djama Souleiman contrevient gravement et une nouvelle fois au contenu des accords franco djiboutiens en matière judiciaire.

Démonstration est faite une fois encore que la nomenklatura du pouvoir d’IOG ce ne sont que des « petits enfants » égoïstes, caractériels et versatiles lorsque l’on ne fait pas à leur volonté ; malheureux car éternels insatisfaits.

La faute en incombe au « grand frère » qui – pour sa tranquillité et ses seuls intérêts – a fait le choix de privilégier la cupidité et la tyrannie par le bâton plutôt que celui de l’ouverture à la démocratie. Il récolte aujourd’hui – dans l’affaire de l’assassinat du Juge Borrel – ce qu’il a semé en un temps passé.

L’argent facilement gagné a corrompu les esprits. Il a transformé ces hommes et ces femmes en couards ; pleins de peurs les plus diverses et de colères lorsqu’il s’agit d’assumer la responsabilité de leurs actes – y compris les plus criminels -…à l’image de leur Guide …Seigneur et Maître Ismaïl Omar Guelleh