06/03/07 (B385-B) Appel aux autorités françaises et aux présidentiables pour stopper les massacres et protéger les populations (ACAT, SURVIE, MRAP, CCFD)

Darfour
:Appel aux autorités françaises et aux présidentiables
pour stopper les massacres et protéger les populations


Paris, le 2 mars 2007


Objet : sanctions individuelles et implication
de la France
dans le déploiement des casques bleus au Darfour


Monsieur le Président,
Madame la candidate, Monsieur le candidat,

Nos associations
sont horrifiées par l’intensification des exactions commises,
en toute impunité, à l’encontre des populations du Darfour.
En quatre ans, plus de 300.000 personnes ont été tuées
et plus de 2,4 millions de personnes ont été chassées
de leurs foyers. Dans le même temps, dix résolutions ont été
adoptées par le Conseil de sécurité des Nations unies,
sans aucun résultat concret sur le gouvernement de Khartoum. Cette
situation insupportable déstabilise le Tchad et la République
centrafricaine et risque d’embraser l’ensemble de la région.

En refusant, le 15 février 2007, d’octroyer des visas aux membres
de la mission d’enquête du Conseil des Droits de l’Homme
des Nations unies se rendant au Darfour, et en niant le 26 février
2007 toute compétence à la Cour pénale internationale
(CPI) au Darfour, le gouvernement soudanais vient de prouver une nouvelle
fois qu’il n’est pas prêt à mettre un terme aux exactions
commises au Darfour.

Face au refus des autorités soudanaises de protéger ses populations,
il est du devoir de la communauté internationale d’intervenir
urgemment.

Le 15 février 2007, les députés du Parlement européen
ont adopté une résolution sur la situation au Darfour qui «
invite les institutions de l’Union européenne à appliquer des
sanctions visant toute partie, y compris le gouvernement soudanais, qui viole
le cessez-le-feu ou s’en prend aux civils, et à mener toute action
nécessaire contribuant à mettre fin à l’impunité
par l’application du régime de sanction du Conseil de sécurité
des Nations unies qui prévoit des sanctions économiques ciblées,
y compris des interdictions de voyager et des gels d’actifs, à l’instar
des mesures prises par l’Union européenne par le passé à
l’égard d’autres pays ».

Le Parlement européen « souligne que les sanctions à l’encontre
du Soudan devraient également inclure la menace d’un embargo pétrolier
».

…/…

Le 27 février
2007, le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) Luis Moreno
Ocampo, a demandé aux juges d’assigner ou d’émettre des mandats
d’arrêt à l’encontre de deux hauts responsables des crimes commis
au Darfour : Ahmad Muhammad Harun, ancien ministre de l’Intérieur du
gouvernement soudanais et Ali Muhammad Ali Abd-Al-Rahman, commandant d’une
milice janjawid, alliée aux forces gouvernementales.

Même si nous
avons bien conscience que la résolution de la crise au Soudan en général,
et au Darfour en particulier, devra nécessairement passer par un accord
de paix inclusif et accepté par les parties, nous sommes convaincus
que les sanctions ciblées individuelles sont indispensables pour contraindre
les belligérants à arrêter les combats et à accepter
le déploiement de casques bleus au Darfour, conformément à
la résolution 1706 des Nations unies.

Jusqu’à présent, malgré ses discours et condamnations
de principe, la France s’en est tenue à une simple diplomatie «
classique », refusant de mettre en oeuvre des sanctions et voyant même
son commerce avec le Soudan croître.

Convaincus du principe qu’on ne doit pas commercer avec des régimes
responsables de crimes contre l’humanité quand on se revendique patrie
des Droits de l’Homme, nous vous demandons de mettre immédiatement
en œuvre, sur le territoire français, une série de sanctions
ciblées individuelles à l’endroit de toute partie qui
viole le cessez-le-feu ou s’en prend aux populations civiles au Darfour :

  • refus de visas, gel
    des avoirs en France de toutes les personnes nommées dans les rapports
    de la Commission d’enquête et du panel d’experts des Nations
    unies et enquête sur les comptes en France des entreprises proches
    du gouvernement afin de préparer la mise en œuvre de nouvelles
    sanctions ciblées ;
  • gel des relations
    commerciales de la France avec les pouvoirs publics et le gouvernement de
    Khartoum et gel des investissements français dans le secteur pétrolier
    soudanais.

Dans
l’hypothèse où le gouvernement soudanais continuerait
de ne pas respecter ses obligations de protection vis-à-vis de ses
propres populations et n’autoriserait pas le déploiement de casques
bleus au Darfour, à l’échéance du mandat de la
Mission préparatoire des Nations unies au Soudan (MINUS), le 30 avril
2007, nous vous demandons d’apporter une contribution financière,
humaine et matérielle au déploiement d’une force onusienne
ayant pour mandat, conformément à la résolution 1706,
sous chapitre VII de la Charte des Nations unies :

  • de
    favoriser les conditions d’un véritable accord de paix
    entre toutes les parties, permettant aux populations déplacées
    ou réfugiées de retourner sur leurs terres, en toute sécurité
    ;

  • de protéger efficacement les populations des violences, notamment
    à travers l’établissement d’une zone d’exclusion
    aérienne sur tout le Darfour ;

  • de mettre en place des corridors humanitaires sécurisés
    permettant aux organisations humanitaires d’accéder à
    l’ensemble des populations nécessitant une aide vitale.
Nous
vous prions d’agréer, Monsieur le Président, Madame la
candidate, Monsieur le candidat, l’expression de notre très haute
considération.

Pour les associations signataires :

Jean-Etienne
de Linares
Délégué Général de l’ACAT-France

Contact
:
Clément Boursin, Chargé de mission Afrique, ACAT-France, 7
rue Georges Lardennois, 75019 Paris, Fax : 01.40.40.42.44, clement.boursin@acat.asso.fr