05/04/07 (B389) AP / Prisons secrètes américaines en Ethiopie (Info lectrice)

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Note de l’ARDHD
Cette information conforterait le témoignage que nous avions publié
dans le dernier Radio-Trottoir, sur le fait que Djibouti pourrait servir de
centre de regroupement de détenus, capturés en Somalie, au Kenya
ou dans d’autres pays de la région par les US et transféré
menotté sur le Camp Lemonnier avant de repartir vers d’autres destinations.
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NAIROBI (AP) – Des agents de la CIA et du FBI traquant des militants
d’Al-Qaïda dans la Corne de l’Afrique retiennent des personnes soupçonnées
de terrorisme et originaires de 19 pays dans des prisons secrètes en
Ethiopie, révèle une enquête menée dans la région
par l’Associated Press.

D’après les organisations de défense des droits de l’Homme,
des avocats et des diplomates occidentaux interrogés par l’AP, plusieurs
centaines de prisonniers, dont des femmes et des enfants, ont été
transférés secrètement et illégalement ces derniers
mois du Kenya et de Somalie vers l’Ethiopie, où ils sont détenus
sans inculpation, ni accès à des défenseurs ou à
leurs familles.

Parmi les détenus figurerait au moins un citoyen américain,
alors que d’autres seraient originaires du Canada, de Suède et de France,
selon les données rassemblées par une organisation musulmane
kenyane des droits de l’Homme et un listing de vol obtenu par l’AP. Les autorités
des pays concernés n’ont pas réagi dans l’immédiat à
ces informations.

Certains détenus ont été interpellés par les troupes
éthiopiennes qui ont renversé un gouvernement islamiste radical
à la fin de l’année dernière à Mogadiscio, en
Somalie. D’autres ont été expulsés du Kenya, pays où
de nombreux Somaliens se sont réfugiés pour fuir les violences
dans leur pays natal.

L’Ethiopie, qui dément détenir secrètement des prisonniers,
est un pays d’Afrique de l’Est où les droits de l’Homme sont fréquemment
bafoués. Ces dernières années, le régime d’Addis
Abeba a aussi été un proche allié des Etats-Unis dans
la lutte contre Al-Qaïda, qui essaye de s’implanter parmi les musulmans
de la Corne de l’Afrique.

Des responsables américains, contactés par l’Associated Press,
ont reconnu que des prisonniers avaient été interrogés
en Ethiopie. Mais il ont assuré que les agents américains respectaient
la loi et que leur action était justifiée parce qu’ils enquêtaient
sur des attaques passées et sur des menaces terroristes actuelles.

Les prisonniers n’ont jamais été sous la garde des Américains,
a affirmé un porte-parole du FBI, Richard Kolko, démentant que
son agence soutiendrait ou participerait à des arrestations illégales.
A l’en croire, les agents américains ont obtenu l’autorisation des
gouvernements des pays de la Corne de l’Afrique d’interroger des prisonniers
dans le cadre de la lutte antiterroriste.

Selon des responsables occidentaux, parmi les personnes détenues figurent
des suspects connus pour les liens étroits qu’ils entretiendraient
avec Al-Qaïda.

Mais certains alliés des Etats-Unis ont fait part de leur consternation
concernant les transferts dans ces prisons secrètes.

John Sifton, expert de Human Rights Watch en matière d’antiterrorisme,
est allé jusqu’à dire que les Etats-Unis s’étaient comportés
en "meneurs" dans une affaire qu’il a qualifiée de "Guantanamo
décentralisé, externalisé".

Un enquêteur d’une ONG internationale de défense des droits de
homme a lui précisé que l’Ethiopie avait installé des
prisons secrètes sur trois sites: à Addis Abeba, sur une base
aérienne éthiopienne à 59km à l’est de la capitale,
et dans le désert près de la frontière somalienne.

"C’était un cauchemar du début à la fin", a
raconté Kamilya Mohammedi Tuweni, une femme de 42 ans, mère
de trois enfants et titulaire d’un passeport des Emirats arabes unis, dans
ses premiers commentaires après sa libération à Addis
Abeba, le 24 mars. Elle dit avoir passé deux mois et demi en détention
sans avoir été inculpée. Elle est la seule détenue
libérée à s’être exprimée publiquement.

Elle dit avoir été arrêtée au cours d’un voyage
d’affaires au Kenya, le 10 janvier, avoir été battue, puis envoyée
en Somalie où elle aurait partagé une chambre avec 22 autres
femmes et enfants. Elle affirme avoir été conduite en Ethiopie,
où un agent américain l’aurait interrogée et exhortée
à coopérer.

AP