23/05/07 (B396) RSF / ERYTHREE A l’occasion du 16e anniversaire de l’indépendance, Reporters sans frontières appelle l’Union européenne a prendre des sanctions personnelles contre le président Issaias.

A
l’occasion du 16e anniversaire de l’indépendance de l’Erythrée,
le 24 mai 2007, Reporters sans frontières appelle l’Union européenne
à revoir sa politique envers l’un des pays les plus fermés au
monde et, notamment, à prendre des sanctions personnelles contre son
président, Issaias Afeworki.

L’organisation estime incompréhensible que, par exemple, le président
zimbabwéen, Robert Mugabe, ou le président du Bélarus,
Alexandre Loukachenko, fassent l’objet de mesures d’interdiction de circuler
sur le territoire européen, tandis que l’un des dictateurs les plus
brutaux du continent africain peut être reçu par un Commissaire
européen qui, de plus, se dit "très, très honoré"
de sa visite.

"Au-delà du ‘deux poids, deux mesures’ de cette politique, la
nouvelle approche européenne de la question de l’Erythrée est
désastreuse pour ceux qui subissent la terreur de son gouvernement
et les treize journalistes disparus dans les geôles érythréennes
depuis 2001. Incohérente et dangereuse, cette nouvelle politique offre
au président Issaias Afeworki l’occasion de célébrer
sa victoire, d’imposer davantage son pouvoir et de continuer à renier
impunément ses engagements. Sans remettre en cause l’aide à
la population érythréenne, ne plus permettre à l’avenir
au chef de l’Etat érythréen de venir parader à Bruxelles
serait la moindre des choses", a déclaré Reporters sans
frontières.

L’Erythrée, officiellement indépendante depuis le 24 mai 1993,
est l’un des rares pays du monde sans presse privée. Depuis septembre
2001, parmi les centaines de prisonniers politiques, au moins treize journalistes
sont détenus au secret, sans procès et sans contact avec l’extérieur.
Selon les informations de Reporters sans frontières, au moins quatre
d’entre eux ont trouvé la mort en prison, suite aux conditions de détention
épouvantables dans lesquelles ils sont maintenus. Le président
Issaias Afeworki est considéré comme l’un des "prédateurs
de la liberté de la presse" par Reporters sans frontières.

Le 4 mai, lendemain de la Journée internationale de la liberté
de la presse, le Commissaire européen au développement et à
l’aide humanitaire, Louis Michel, a reçu le président érythréen
Issaias Afeworki à Bruxelles. Se disant "très, très
honoré de [le] recevoir à la Commission", Louis Michel
a annoncé l’octroi d’une enveloppe de 122 millions d’euros d’aide sur
cinq ans au petit pays de la Corne de l’Afrique, permettant de "financer
prioritairement les programmes de renforcement des capacités administratives,
les infrastructures et l’aide alimentaire". L’accord financier est assorti
d’une clause disant qu’en "contrepartie, l’Union européenne demande
au gouvernement d’Asmara d’adopter une approche constructive dans la résolution
des crises régionales, ainsi que des progrès en matière
des droits de l’homme et de liberté de la presse".

Lors de la conférence de presse commune que les deux hommes ont tenue
à Bruxelles, le président érythréen a balayé
avec mépris les questions critiques des journalistes sur la question
des droits de l’homme. Interrogé par Reporters sans frontières
sur la chaîne de télévision France 24 sur sa stratégie
vis-à-vis de l’Erythrée, Louis Michel s’est défendu en
affirmant que le sort des journalistes incarcérés faisait partie
des questions systématiquement soulevées dans ses rencontres
bilatérales avec le président Issaias, mais en vain. Selon lui,
l’octroi de l’aide financière s’inscrit dans une "stratégie
globale pour la Corne de l’Afrique", estimant qu’il n’y aura "de
solution pour aucun pays de la région sans solution globale".