30/06/07 (B402) Ecrans.fr / Mort du juge Borrel : le doute règne. Dans un documentaire, Bernard Nicolas reprend l’enquête et explore d’autres pistes. (Info lectrice)

Il était une fois un assassinat que ses auteurs, voulant cacher leur crime, ont voulu faire passer pour un suicide. Ce scénario, pourtant bien convenu, a toujours du succès.

Ainsi Bernard Borrel, magistrat français en poste à Djibouti, est mort à l’âge de 39 ans, dans la nuit du 18 octobre 1995, le crâne fracassé par des inconnus. Son corps retrouvé dans des rochers de Djibouti a été ensuite en partie brûlé, et les éléments d’une scène de suicide par immolation, briquet, bidon d’essence, disposés sur place.

Bernard Borrel était un procureur droit comme Saint-Just, marié, père de famille, catholique. Pour expliquer sa mort, les enquêteurs de la brigade criminelle en ont fait un pédophile mâcheur de qat qui n’avait que le feu comme issue à ses turpitudes.

Le journaliste Bernard Nicolas rappelle comment cette thèse du suicide a été maintenue pendant des années et des années, imposée à la veuve du magistrat, Elisabeth Borrel, par d’importantes instances —diplomatie, justice, police—, et leurs auxiliaires de tout poil. A cet égard, ne ratez pas la descente dans les rochers de la patronne de la médecine légale de Paris en train de reconstituer ­ —en riant !—­ le cheminement du corps de Bernard Borrel. Un morceau d’anthologie. Les juges Moracchini et Le Loire, alors en charge de l’instruction, ont été dessaisis en juin 2000, trois mois après cette pseudo-reconstitution judiciaire. Depuis, l’enquête reprise par d’autres juges n’a pu qu’accréditer la bonne thèse : celle de l’assassinat.

Il reste deux questions sans réponse. Qui a tué le magistrat ? Pourquoi l’a-t-on tué ? Mystère, même si le film de Bernard Nicolas esquisse quelques pistes. Le journaliste a déniché trafics d’armes et de matières fissiles, réels dans cette région, mais sans établir de lien avec la mort du juge.

Son enquête est surtout formidable quand il donne la parole à des membres de la communauté française de Djibouti, des gens qui connaissaient bien le magistrat, et affirment aujourd’hui avoir toujours pensé à un assassinat. Les pressions de l’Etat étaient telles que certains d’entre eux avouent avoir été « écoeurés » de l’enquête de la brigade criminelle.