15/03/99 (LIB 002) 2 – LETTRE DE L’AFADD

à
Monsieur Charles JOSSELIN
Ministre de la Coopération
Tarbes, le 15 mars 1999

Monsieur
le Ministre,

Le peuple
de Djibouti vient d’entendre les propos que vous avez tenus sur R.F.I. ce
14 mars et se trouve légitimement interpellé par l’absence de discernement
et de connaissance du sujet dont vous avez fait preuve
lors de cette intervention radiophonique.

Vous
avez indiqué n’avoir aucun élément d’information sur la situation de Me AREF
MOHAMED AREF, illégalement condamné et détenu à la prison de Gabode depuis
le 15 février 1999, alors même que vous avez été rendu destinataire de tous
les documents, communiqués et lettres d’intervention émanant tant de l’Association
Française des Amis des Démocrates de Djibouti que d’autres O.N.G. de défense
des droits de l’homme, comme l’Association pour le Respect des Droits de l’Homme
à Djibouti, Amnesty International etc…

Vous
avez été informé également en temps utile du dépôt de la plainte, sous ma
constitution d’avocat, contre MM. GOULED et GUELLEH, devant le Tribunal de
Grande Instance de Paris, pour actes de torture et crimes contre l’humanité.
Le Nouvel Observateur, l’Express, le Monde ont relaté cette situation.

La préfecture
de police de Paris vous a sans doute avisé de la conférence de presse qui
a été tenue le vendredi 12 mars et de la manifestation du même jour à 18 heures
30 devant l’ambassade de Djibouti.

Votre intervention
radiophonique semble laisser supposer que vous ne prenez pas connaissance
des informations qui vous sont adressées ou que les conseils qui vous sont
prodigués sont manifestement mal adaptés.

Ainsi, est-il
aisé de constater une réelle volonté de dénaturer la réalité des faits sur
la situation de Me AREF en général et des droits de l’homme à Djibouti en
particulier.

Dois-je
porter à votre connaissance que votre cabinet m’a téléphoné, sur mon poste
personnel, vendredi 12 mars à 10 heures 45, pour m’informer d’une dépêche
que vous auriez reçue du poste français à Djibouti selon laquelle Madame Madiha
AREF contestait formellement les accusations dénoncées par les O.N.G. en Europe
relativement à la situation de son mari.
Interrogée directement par nos soins, Madame AREF a élevé une solennelle protestation
contre de tels procédés qui ne grandissent pas ceux qui les utilisent et qui
constituent une faute grave à la charge des fonctionnaires français en poste
à Djibouti.

Devant
cette grossière tentative de déstabiliser les défenseurs des droits de l’homme
et de porter un discrédit sur la personne de Me AREF, nous sommes légitimement
fondés à nous interroger sur le rôle joué dans cette affaire par vos services.

Je dois
rappeler que nous avons reçu de nombreux témoignages de soutien d’hommes et
de femmes politiques et de militants des droits de l’homme parmi lesquels
notamment Monsieur Michel ROCARD, Monsieur Arnaud MONTEBOURG et Monsieur Jean-Marie
BOCKEL.

Les agences
des Nations Unies et les grandes O.N.G. se sont toutes mobilisées pour soutenir
et défendre AREF. Le 9 avril prochain auront lieu les élections présidentielles
à Djibouti. GUELLEH, contre qui une plainte pour crime contre l’humanité a
été déposée, est candidat.

Le feu
et le sang sont près des urnes et il convient d’être extrêmement vigilants
dans l’observation de ce scrutin par des personnes indépendantes connaissant
la situation.

Me serait-il
pas possible de vous rencontrer prochainement pour vous apporter d’autres
informations ?

Dans l’attente
de vous lire, Je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de
ma parfaite considération.

LE
PRESIDENT,
Roger-Vincent
Calatayud