16/07/07 (B404) REUTERS / La conférence de paix à Mogadiscio sous la menace des islamistes

Par Guled Mohamed

MOGADISCIO (Reuters) – Des délégués de l’ensemble de la Somalie arrivent à Mogadiscio pour une conférence de réconciliation prévue dimanche qui est considérée comme la dernière chance du gouvernement de renforcer sa légitimité en assurant un retour à la paix.

Mais l’issue de la réunion inspire peu d’espoirs, des insurgés islamistes menaçant de gâcher les discussions. Beaucoup estiment que la violence ne prendra fin que si le gouvernement intérimaire se résout à négocier avec ses adversaires.

Ce rassemblement d’un millier de chefs coutumiers, d’anciens seigneurs de guerre et de leaders politiques a été reporté deux fois pour des raisons de sécurité qu’on peut encore invoquer.

Explosions d’engins posés dans les rues, attentats suicides et assassinats sont monnaie courante dans la capitale côtière.

Les insurgés attaquent régulièrement l’armée nationale, ses alliés éthiopiens et les soldats ougandais de la force de paix de l’Union africaine, en vue de rétablir la charia (loi islamique) brièvement imposée l’an dernier.

Ils ont juré vendredi de perturber la réunion et de faire échec aux efforts du gouvernement pour consolider son emprise sur le pays.

« Nous frapperons le gouvernement plus durement que mercredi », a déclaré par téléphone à Reuters le chef de guérilla islamiste Maalim Hachi Mohamed d’un lieu indéterminé. « Ce sont des criminels qui ont vendu notre pays à l’Ethiopie. Nous ne discuterons que lorsque notre pays sera libre. »

L’annonce du maintien de la réunion a entraîné mercredi des tirs de mortier en série contre le palais présidentiel et le lieu de la conférence – un ancien QG de la police criblé de balles et repeint à la hâte pour l’occasion.

« OCCASION PERDUE » ?

« Nous mettons en garde les gens contre toute participation aux entretiens, parce que c’est un projet gouvernemental qui a pour seul but d’obtenir des fonds des donateurs », a dit Mohamed.

Le gouvernement du président Abdullahi Yusuf peine à exercer son autorité sur le pays depuis que le mouvement des tribunaux islamiques a été chassé de Mogadiscio fin décembre.

Il espère rallier des soutiens en conviant aux pourparlers une myriade de clans, mais le pari n’est pas gagné dans un pays où ont échoué treize tentatives pour établir un pouvoir central depuis la chute du président Mohamed Siad Barré en 1991.

Jeudi, Yusuf a affirmé à des journalistes que la conférence aurait lieu « même si une bombe nucléaire explose à Mogadiscio ».

Certains habitants de la capitale jonchée de débris pensent que le gouvernement devrait dialoguer avec les islamistes qui ont gouverné le pays durant six mois l’année dernière.

« C’est une occasion perdue », a déclaré à Reuters Abdi Yusuf, 60 ans. « Le gouvernement et les Tribunaux islamiques sont les principaux adversaires. Il faut qu’ils se rencontrent pour une paix véritable. Sinon, les tueries continueront sans répit. »

Une délégation de l’Union européenne venue à Mogadiscio mercredi a salué les préparatifs de la conférence et compte revenir dans la capitale pour la cérémonie d’ouverture dimanche. D’autres diplomates et experts de la sécurité ont jugé les risques d’attaque trop élevés pour faire le déplacement.

Mogadiscio, l’une des villes les plus dangereuses du monde, a accueilli très peu de grandes réunions, aussi les hôtels s’empressent-ils de se préparer aux arrivants tandis que l’on répare des bâtiments dans le même but.

Des centaines de délégués de clans sont déjà dans la ville. D’autres sont attendus dans la nuit ou samedi. Mais rares sont ceux qui comptent sur des résultats spectaculaires.

« Rien de concret ne sortira de ces discussions », estime un analyste politique somalien qui tient à garder l’anonymat. « Si les tribunaux (islamiques) étaient là, cela aurait été positif. A moins d’un miracle, ce sera une réunion vaine. »