06/12/07 (B424) RUE 89 / Le journaliste Guillaume Dasquié en garde à vue à la DST (Info lectrice)

Spécialiste des questions de défense et des services secrets, le journaliste Guillaume Dasquié a été interpellé mercredi matin à son domicile par six policiers de la Direction de la surveillance du territoire, venus perquisitionner en raison de ses révélations sur le 11 septembre 2001 et sur l’affaire Borrel.

Après les cinq heures de perquisition, Guillaume Dasquié a été emmené vers les bureaux du contre-espionnage et placé en garde à vue. Il n’est toujours pas rentré chez lui. Son avocat n’a pas souhaité faire de commentaire, pas plus que le parquet de Paris. Seule certitude: les autorités cherchent à connaître par quels moyens il a obtenu certains documents classifiés relatifs à l’affaire Borrel et au 11 septembre 2001.

Il y a un an presque jour pour jour, le journaliste avait déjà été interpellé et entendu par la police pendant deux heures, notamment pour avoir révélé une note de la Direction centrale des renseignements généraux (DCRG) qui détaillait les turpitudes passées et actuelles du président djiboutien Ismaël Omar Guelleh, dont l’entourage est soupçonné d’être le "donneur d’ordre" de l’assassinat du juge Bernard Borrel. Initialement qualifiée de "suicide", la mort du magistrat, en octobre 1995 à Djibouti, est aujourd’hui considérée par le parquet de Paris comme "un acte criminel". Guillaume Dasquié avait publié cette note sur son site Internet Géopolitique.com.

"Manque de transparence des institutions"

La première audition de Guillaume Dasquié a eu lieu le 7 novembre 2006. Quelques jours plus tôt, le parquet de Paris avait ouvert une enquête préliminaire pour "violation du secret professionnel et du secret de l’instruction et recel". Cette enquête vise son site Web qui, comme le détaillait une source judiciaire citée à l’époque par l’AFP, "propose à ses abonnés un accès direct à des documents confidentiels classifiés ‘secret défense’ ou provenant de dossiers d’instruction".

Toujours à l’AFP, Guillaume Dasquié répondait:

"Notre but, en diffusant ces documents confidentiels, est de lutter contre la confusion entre information et communication (…). Et notre manière de le faire est de proposer à nos abonnés des éléments de preuve, validés et restitués dans leur contexte. [Cette démarche correspond] à une évolution fondamentale de la culture journalistique face à un manque de transparence des institutions."

L’autre article qui a beaucoup énervé les services de renseignement remonte au 16 avril 2007. Sur deux pages dans Le Monde titrées "11 septembre 2001: les Français en savaient long", le journaliste raconte avoir consulté 328 pages de rapports de la DGSE rédigées entre juillet 2000 et octobre 2001. Cet article provoque la colère de Michèle Alliot-Marie, alors ministre de la Défense, qui décide de porter plainte contre le journaliste.

Par ailleurs, le 10 juin dernier, dans Le Monde, Guillaume Dasquié publiait une enquête titrée "Borrel, une affaire d’Etat". Il y relatait, en révélant de nouveaux documents, les derniers développements de l’affaire de la mort du juge, retrouvé au bas d’une falaise le 19 octobre 1995.

Augustin Scalbert et David Servenay