27/04/08 (B445) Portail des sous-marins : Une journée de piraterie ordinaire au large de la Somalie. (Info lecteur)

Cinq attaques de pirates en moins de 24 heures dans la zone la plus dangereuse au monde

Par Rédacteur en chef

Johan Lillkung est le capitaine suédois du Dolphin, un voilier de 27 mètres, qui se trouve actuellement au large de la Somalie, sous la menace d’attaques de pirates. Dans son journal de bord, il décrit plusieurs attaques récentes sur des bateaux et comment le sien l’a échappé belle.

Tout commence le 20 avril à 20:35 (heure locale) avec un SOS entendu à la radio. Le Faisal Mustafa, un dhow en bois, faisait route de la mer Rouge vers l’Inde. Leur position se trouvait à seulement 4 nautiques sur notre tribord. Nous avons vu 4 embarcations rapides approcher rapidement du navire. Le dernier message radio envoyé par le capitaine disait “Dieu tout puissant, quelqu’un peut-il nous aider, les pirates nous attaquent. Dieu miséricordieux, aidez-nous s’il vous plaît !”

On entendait des cris à l’arrière-plan, puis la radio est devenue silencieuse.

Nous avons immédiatement changé de routes et avons pris contact par radio avec un navire de guerre américain. Ils nous ont conseillé de faire route au sud-ouest à pleine vitesse, pour nous écarter aussitôt que possible des pirates en direction d’un navire de guerre britannique, le HMS Chatham, qui se trouvait à 30 nautiques de notre position.

Ils ont aussi envoyé un hélicoptère, qui est resté au-dessus de nous jusqu’à ce que le Chatham nous ait repéré sur son radar. Pendant ce temps, le navire américain se dirigeait vers le navire en détresse pour l’aider. Nous ne savons toujours ce qu’il s’est passé ensuite.

Les pirates existent encore, malheureusement, ils ne sont pas aussi sympathiques que le capitaine Jack Sparrow. La piraterie en haute-mer, en particulier dans cette partie du monde, n’a rien de nouveau. Depuis la chute de l’Union Soviétique et du régime satellite communiste en Somalie, des attaques de pirates ont lieu très régulièrement.

Plus tard ce même jour d’avril, l’officier opérations du Chatham nous a conseillé de continuer vers notre destination, Djibouti, en faisant route à l’ouest, ce qui nous amènerait dans une zone patrouillée par un navire de guerre allemand, l’Emden.

Sept heures plus tard, nous avons à nouveau entendu les mêmes mots arrachant le cœur : “SOS, SOS, attaque de pirates”. Cette fois, l’appel venait du Takayama, un pétrolier japonais qui se dirigeait vers le canal de Suez. Le Takayama se trouvait à seulement 25 nautiques devant nous, là où nous avions prévu de passer.

Surgissant de nulle part, une embarcation rapide est venue le long du pétrolier et a ouvert le feu avec des mitrailleuses et des roquettes. Ils ont tiré sur le gouvernail dans l’intention de stopper le pétrolier. Il a été durement atteint sur bâbord, le canot de sauvetage était réduit en miettes, et le réservoir de carburant était percé, ce qui a provoqué une fuite de fuel lourd à la mer.

Le capitaine du Takayama a mis en avant toute et a changé de route dans l’espoir de rejoindre le navire allemand. L’Emden a envoyé un hélicoptère qui se trouvait sur place en moins de 10 minutes et les pirates rompaient le combat.

A ce moment-là, le côté bâbord du Takayama ressemblait à du gruyère, du fuel s’échappant par là. Finalement, l’Emden a rejoint le pétrolier et aidé à colmater provisoirement les réservoirs de carburant.

Il se trouvait maintenant à 30 nautiques devant nous, boitant vers le port d’Aden au Yémen, pour y être réparé, escorté par la frégate allemande. Pendant l’attaque, on nous a conseillé de changer de route pour rejoindre le pétrolier et la protection de la frégate.

Tout le monde pensait que c’était fini, qu’il n’était pas possible qu’il reste encore des pirates. Nous nous trompions gravement puisque vers 12:28, un nouveau SOS a été envoyé. Un petit cargo était attaqué et abordé près de la côte somalienne [1].

Nous n’avons encore aucune information concernant cet incident. A 13:05, un thonier espagnol, qui se trouvait à environ 100 nautiques à l’est de notre position, était attaqué et abordé. Le navire se dirige vers la Somalie, les pirates à bord et l’équipage retenu en otages [2].

Nous avançons maintenant à faible vitesse vers l’ouest (8 nœuds), nos yeux ne quittant pas le radar, surveillant constamment l’horizon avec des jumelles. Tous les navires sont en alerte et sont devenus paranoïaques, changeant de route dès que quelque chose de suspect ou d’inconnu apparait sur le radar ou à l’horizon.

Chacun redoute le prochain SOS.

Heureusement, inshallah, ce ne sera pas nous qui lanceront cet appel alors que nous retournons en Espagne, après avoir passé l’hiver dans les Seychelles et les Maldives.

Si Dieu le veut, nous atteindrons Djibouti, et nous pourrons nous reposer de la tension mentale de naviguer dans le golfe d’Aden. Là, notre seul confort était de voir un hélicoptère nous survoler pendant un moment, et un navire de guerre passer au loin.

Pendant que je traduisais ce message du suédois en anglais, c’était à notre tour de lancer un SOS. A 16:51, à seulement 28 nautiques au large du Yémen, par 12º 22´N 045º 17´E, un membre de l’équipage a repéré 2 petites embarcations à 4 nautiques devant nous et qui s’approchaient rapidement de chaque bord.

Nous avons immédiatement envoyé un SOS et fait demi-tour à toute vitesse.

Notre message a été reçu par la frégate espagnole Mendez Muñez, qui se trouvait à environ 15 nautiques de notre position et un avion de surveillance de l’US Marine Corps se trouvait dans le voisinage.

En moins de 9 minutes, l’avion nous survolait, faisant des cercles à très basse altitude au-dessus de nous et des bateaux qui nous poursuivaient. Les attaquants ont arrêté l’attaque et se sont dirigés vers le sud.

Au plus près, ils se sont approchés à 0,8 nautique (1,5 km) — trop proche pour notre confort.