03/05/08 (B446) Et si la position de Ras Doumeira représentait un enjeu économique de taille, contrairement à ce qu’a dit Guelleh. Cela pourrait-il expliquer l’incursion érythréenne ? Et pour quelles raisons, la France reste-t-elle muette ?(Lecteur et ARDHD)

Les rivalités et les guerres entre pays ou entre peuples ont souvent un enjeu économique. Celui-ci est rarement affiché. On préfère trouver d’autres arguments : souveraineté nationale, droit des peuples, histoire, etc…

Souvent, il convient dans tous les conflits de rechercher l’enjeu économique. Prenez par exemple, le Puntland : on parle de recherche pétrolière … !

Alors essayons de comprendre s’il n’y a pas un enjeu économique derrière l’incursion érythréenne à Ras Doumeira. Hormis la beauté du site, ce rocher ne semble pas avoir une si grande importance….

Et pourtant !

Rappellons-nous que l’indépendance de l’Erythrée a coupé l’accès à la mer de l’Ethiopie : c’est un grand handicap pour un pays aussi vaste et très peuplé, que de ne plus avoir d’accès maritime. En raison du conflit larvé entre les deux états, l’Ethiopie ne peut plus utiliser les deux ports érythréens : en dépit des investissements réalisés, ceux-ci périclitent au profit surtout de celui de Djibouti et à moindre échelle de ceux du Somaliland dont Berbera.

Une opportunité s’offre : le fameux pont entre le Yémen et Ras Doumeira !

Et si, par mesure de compensation, le Yémen avait décidé de profiter de cette opportunité pour « souffler » à Djibouti, les retours économiques potentiels de la construction de ce pont (s’il se réalise effectivement un jour) ?

Cette hypothèse qui reste à vérifier, pourrait bien expliquer le subit intérêt des érythréens pour cette partie de la côte et les moyens mis en oeuvre pour l’occuper : construction d’une forteresse, occupation par l’Armée érythréenne, etc…

Et que fait la France pendant ce temps ?

Manifestement, elle fait « profil bas ». Contrairement à ce qu’elle avait fait en 1996, depuis deux semaines la France ne s’exprime pas sur le sujet. L’Armée française reste dans ses campements et ne prépare, à notre connaissance, aucune action dissuassive contre la présence érythréenne. Il est vrai que Guelleh disait dans Jeune Afrique, il y a quelques semaines, qu’il n’avait plus besoin de la France.

Cela peut-il expliquer le fait que la France dont Guelleh n’a plus besoin, préfère rester au chaud, à « savourer » le confort de ses installations dont le montant du loyer est disproportionné ? Le discours officiel pourrait être : « puisque l’on nous fait payer un loyer exagéré, nous n’allons pas, en plus, investir, prendre des risques et engager des dépenses supplémentaires pour protéger notre propriétaire abusif.


Ou l’on a besoin de nous pour protéger le pays et le logement est offert.


Ou le logement est facturé et nous n’avons pas d’obligation à défendre le propriétaire .. »

La France attend peut-être sagement le revirement de Guelleh en sa faveur, pour prendre parti contre cette annexion de fait d’une partie du territoire national djiboutien ? Elle a tout son temps. Guelleh en a beaucoup moins.