06/06/08 (B450-B) Le Figaro : Les Nations unies s’attardent au chevet de l’Afrique

De notre envoyé spécial à Djibouti, Tanguy Berthemet

Des représentants du Conseil de sécurité de l’ONU ont commencé lundi une tournée de neuf jours dans six pays africains pour tenter de promouvoir la paix.

La tournée africaine commencée lundi par le Conseil de sécurité des Nations unies n’a qu’un objectif : tenter de mesurer l’impact des efforts de l’ONU sur les crises les plus aiguës du continent.

La délégation des ambassadeurs passera notamment par le Soudan, déchiré par la guerre du Darfour et les tensions autour du processus de paix entre le nord et le sud du pays, puis chez le frère ennemi tchadien.

Ces dernières semaines, les frictions ont conduit les deux États au bord de la guerre. «Nous réitérerons la conviction du Conseil que la réduction des tensions entre les gouvernements du Soudan et du Tchad est essentielle pour parvenir à la sécurité régionale», a expliqué le Britannique John Sawers.

Les diplomates s’envoleront ensuite pour la République démocratique du Congo, qui peine à sortir d’une décennie d’instabilité, puis pour la Côte d’Ivoire. Cette tournée, inhabituelle par sa longueur, un mois après un voyage du secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, en Afrique de l’Ouest, entend donner un coup de projecteur sur les conflits du continent, qui mobilisent plus des deux tiers des Casques bleus déployés dans le monde mais occupent rarement les débats.

À la première étape de leur voyage, lundi, à Djibouti, les diplomates se sont penchés au chevet de la Somalie, qui demeure l’un des plus grands échecs de l’ONU. Depuis 1991, la Somalie se débat dans une interminable guerre civile nourrie par d’aigres rivalités claniques.

L’intervention des troupes onusiennes de maintien de la paix à Mogadiscio, au milieu des années 1990, s’était soldée par un retrait sanglant et sans gloire. Le pays végète depuis dans l’anarchie et l’indifférence gênée de la communauté internationale.

En décembre 2006, la prise de pouvoir du gouvernement fédéral de transition (TFG), appuyé par les troupes éthiopiennes, a un peu relancé l’espoir de trouver une issue à cette guerre. Ce week-end, le TFG et son opposition, regroupée au sein de l’Alliance pour libérer la Somalie de la domination des islamistes, ont repris leurs pourparlers. Le premier tour de ces négociations intersomaliennes s’était achevé le 16 mai sur un constat d’échec.

Haines tenaces

Deux semaines plus tard, la situation ne semble guère avoir évolué. L’attaque dont a été la cible dimanche l’avion du président du TFG, Abdullahi Yussuf, sur la piste de l’aéroport de Mogadiscio est le symbole le plus évident de ces haines tenaces.

«Les discussions achoppent toujours sur les mêmes points», résume un diplomate. L’opposition exige le départ des troupes éthiopiennes, considérées comme des «envahisseurs», en préalable au moindre accord.

Lundi, une fois encore Abdullahi Yussuf a opposé une fin de non-recevoir à ce retrait des soldats d’Addis-Abeba. Adbullahi Yussuf n’ignore pas que la perte de son principal allié le placerait dans une situation militaire quasi intenable : «Il faut savoir que la présence des troupes éthiopiennes est le fruit d’un accord entre la Somalie et l’Éthiopie. Un éventuel retrait est lié au déploiement d’une force de maintien de la paix des Nations unies», a-t-il réaffirmé.

Or, selon Dumisani Kumalo, ambassadeur d’Afrique du Sud, l’envoi de Casques bleus n’est envisageable qu’«après une véritable amélioration de la situation sur le terrain».«Les deux parties nous demandent de prendre des risques à leur place, ce qui n’est pas acceptable», résume un diplomate tout en s’avouant confiant.

Un optimisme loin d’être partagé.

Les uns rappellent les divisions qui minent tant le TFG que l’Alliance et leur faible représentativité. Les autres pointent l’absence des insurgés islamistes. Lundi, le porte-parole d’al-Chabab, le plus important de ces groupes, a condamné vivement ces pourparlers «mort-nés».