11/06/08 (B451) AFRIK.COM Fragile accord de paix en Somalie / Des leaders islamistes critiquent le cessez-le-feu conclu entre le gouvernement et une partie de lopposition
Nouvelle tentative de paix. Les dirigeants somaliens ont rencontré lundi, sous légide de lONU, une délégation de lopposition. Le premier ministre du Gouvernement fédéral de transition (GFT) et des chefs de lAgence pour la re-libération de la Somalie (ARS) sont parvenus à un accord pour un cessez-le-feu, une intervention internationale et un retrait des troupes éthiopiennes. Cette décision ne fait pas lunanimité au sein de lopposition.
Un accord de plus a été signé, lundi, entre le Gouvernement fédéral de transition et la coalition dopposition de Somalie. Les deux délégations étaient réunies à Djibouti, sur une initiative onusienne. A la mi-journée léchec des tractations a officiellement été annoncé, mais les négociations ont pu reprendre et, dans la soirée, le premier ministre de transition Nur Hassan Hussein et Sheikh Sharif Cheikh Ahmed de lARS sont finalement tombés daccord. Lopposant Sharif Hassan Aden, ancien président du Parlement, a pris part à la signature du texte.
Cet accord prévoit un cessez-le-feu effectif sous 30 jours, pour une période de 90 jours renouvelables. Il sera assorti dun déploiement dans les 120 jours dune force internationale de stabilisation gérée par lONU. Celle-ci sera composée de pays « amis » de la Somalie, mais non frontaliers, afin dexclure lEthiopie. Lexigence de lopposition, en contrepartie, est justement le retrait des troupes éthiopiennes, qui soutiennent le gouvernement provisoire dans sa lutte contre la guérilla islamiste. LARS sest engagée à prendre ses distances avec tout groupe armé ou tout individu qui se positionnerait contre cet accord de paix.
Cest la première fois ces derniers mois que les deux délégations acceptaient de sentendre sur un traité, en y réfléchissant conjointement. Lors des dernières tractations, les débats avaient eu lieu séparément, les dirigeants du pays et ceux de lopposition refusant de se rencontrer. Cet accord naît donc sous de bons auspices et pourrait représenter une véritable avancée vers la paix.
Un accord fragile
Pourtant, lopposition elle-même est très divisée sur la question et lun des dirigeants de lARS, absent lors de la signature, a demblée rejeté cet accord. Cheikh Hassan Dahir Aweys, partisan de la « ligne dure » de lAgence, sest exprimé mardi en dénigrant laccord de Djibouti. Hostile à toute présence étrangère sur le sol somalien, il a par ailleurs appelé à continuer la Guerre Sainte contre lEthiopie. Il ne croit pas au retrait des forces éthiopiennes prévu par le traité, puisquaucun calendrier na été fixé. Leur présence, depuis 2006, cristallise le principal point dachoppement des négociations. Lopposition les considère comme une force doccupation depuis le revers imposé, début 2007, aux Tribunaux islamiques qui contrôlaient le pays.
Cet accord semble, de plus, avoir été « arraché » par le représentant spécial de lONU pour la Somalie, Amehdou Ould Abdallah. LARS est composée de plusieurs factions rebelles modérées pour certaines, radicales pour dautres, qui nont pas toutes pris part aux pourparlers. Cette mosaïque dopinions rend difficile un consensus sur la position à adopter. Le 16 mai dernier déjà, un appel commun avait été formulé par les participants aux tractations afin dengager une action immédiate de laide humanitaire.
La population somalienne, très éprouvée, était à bout de souffle. Le lendemain de cette requête solennelle, le responsable dune ONG humanitaire somalienne avait été assassiné par des islamistes présumés. Ainsi, la bonne volonté et la collaboration entre gouvernement et opposition nentraînent pas nécessairement lassentiment de toutes les forces en jeux. Dimanche 8 juin, à la veille du sommet de Djibouti, le président en exercice du Parlement de transition a été brutalement assassiné par les membres dune milice islamiste. Ce week-end encore, 28 morts ont été dénombrés à Mogadiscio, victimes daffrontements entre force somalo-éthiopiennes et milices islamistes.
Un processus de paix interminable
Depuis la chute du dictateur Siad Barré en 1991, les nombreuses tentatives pour ramener la paix en Somalie ont été vaines. Les successeurs du despote se sont retournés les uns contre les autres. Depuis 17 ans, le pays est ravagé par la guerre civile et compte au moins 1 million de réfugiés, pour une population de 7 millions dhabitants. Les troubles engendrés par lescalade de la violence ont déjà fait plus de 300 000 morts à travers la Somalie. La crise humanitaire qui ne cesse de prendre de lampleur menace de devenir la plus grave et la plus importante du continent africain. Une série daccords humanitaires signés lan dernier à Mogadiscio sont restés lettre morte, et la Force de Paix Africaine déployée dans la région, avec 2 200 soldats, na pas su calmer les tensions.